1/ les auxiliaires à temps partiel

a- le roulement et les postes de travail

Riche de l'expérience d'avant-guerre, la direction du Grand Bazar n'installe pas le "roulement" également à tous les postes de travail. Après 1951, les embauches de salariées à temps partiel demeurent essentiellement destinées (à plus de 80%) aux postes de vente – voir tableau ci-dessous. La division sexuelle du travail, qui a fait de la vente une tâche exclusivement féminine, signifie alors que les emplois de deux jours par semaine sont quasi exclusivement (à 95%) occupés par des femmes.

Tableau n°54 : Répartition par poste des "B" embauchées pour travailler les samedis et lundis, du 1er septembre 1951 au 31 août 1974.
Poste Femmes Hommes Total
Vendeuse 267 0 267
Réserviste 4 13 17
Caissière et gondolière 1 0 1
Standardiste 2 0 2
Employée de la réception 1 0 1
Caissière libre-service 4 0 4
Non mentionné 25 3 28
Total 304 16 320

L'organisation matérielle de l'espace de vente, en bergeries où travaillent en permanence deux vendeuses, se prête d'ailleurs particulièrement bien à la mise en place du roulement. L'une des deux titulaires est en congé le samedi, l'autre le lundi et toutes les deux sont successivement remplacées par la même vendeuse à temps partiel. Parmi les "B", les auxiliaires à temps partiel composent même plus du tiers des vendeuses présentes – voir tableaux suivants. Claudette Dimier, Mathilde Daumont et Marie Doreau, par exemple, sont toutes les trois embauchées comme vendeuses auxiliaires à temps partiel en septembre 19601614. La première ne travaille qu'à la lingerie, la seconde à la droguerie et la dernière à l'alimentation. Le système ne va cependant pas sans poser de problème, toutes les titulaires souhaitant avoir leur samedi1615. C'est peut-être la raison pour laquelle, en 1949, il a fallu plusieurs mois à la direction pour mettre cette organisation en place. Par la suite, lorsqu'un emploi avec repos le samedi se libère, c'est la première vendeuse qui l'attribue à l'une des autres salariées du groupe de rayons.

Tableau n°55 : Statut des "B" présentes dans chaque service du Grand Bazar le 1er mars 1960.
Service Poste Sexe Titulaires Aux. tps partiel Aux. tps complet Total
Rayons Vendeuse Fe 16 13 0 29
Manutentionnaire Ho 2 0 0 2
Bureaux Mécanographe Fe 1 0 0 1
Caissier Ho 1 0 0 1
Réception Empl de bur Fe 2 0 0 2
Manutentionnaire Ho 1 0 0 1
Lingère Fe 1 0 0 1
Total 24 13 0 37
Tableau n°56 : Statut des "B" présentes dans chaque service du Grand Bazar le 1er mars 1970.
Service Poste Sexe Titulaires Aux. tps partiel Aux. tps complet Total
Rayons Vendeuse Fe 13 11 1 25
Manutentionnaire Ho 4 1 0 5
Fe 0 0 1 1
Bureaux Employée de bureau Fe 1 0 0 1
Caissier Ho 1 0 0 1
Standardiste Fe 0 1 0 1
Standardiste dactylo. Fe 1 0 0 1
Réception Employée de bureau Fe 1 0 0 1
Manutentionnaire Ho 1 0 0 1
Lingère Fe 0 1 0 1
Inspection ho 1 0 0 1
Total 23 14 2 39

Parce que leur poste doit, comme celui des vendeuses, être impérativement occupé tous les jours de la semaine, les standardistes et les caissières du libre-service (ouvert en 1968) sont, elles aussi, systématiquement remplacées pendant leur deuxième journée de repos. Simone Dietrich travaille ainsi comme standardiste à temps partiel pendant dix ans au Grand Bazar, de 1962 à 19721616. Sans doute est-ce aussi le cas des inspectrices et inspecteurs, même s'il n'y a aucun exemple de "B" embauchée à temps partiel à ces postes.

Dans les réserves, en revanche, l'embauche d'auxiliaires à temps partiel n'est pas systématique. D'après Janine Gay, elle n'a lieu que dans les rayons où il n'y a qu'un poste de manutentionnaire1617. Dans les autres rayons, les réservistes ne doivent pas prendre leur repos le même jour, mais elles et ils ne sont pas remplacées. Les effectifs ne sont donc au complet ni le lundi ni le samedi, ce qui signifie une surcharge de travail pour les présent-e-s, le samedi en particulier, le jour où l'affluence est la plus forte et où le magasin doit alors être réapprovisionné le plus souvent. L'importance du travail le samedi est partiellement compensée par une absence quasi totale de livraisons ce jour-là. Inversement, le lundi, l'activité du magasin est plus calme, mais il faut reconstituer les stocks, étiqueter et ranger toutes les marchandises qui arrivent. Les lundis et samedis, les réservistes sont alors aidé-e-s, ponctuellement, par les vendeuses titulaires ("vendeuses-réservistes"), habilitées à descendre chercher en réserve le réassortiment qui a été préparé. En outre, contrairement au travail des vendeuses, celui des réservistes peut prendre un peu de retard et être rattrapé le lendemain. A tous les autres postes du magasin, enfin, ceux de la réception et des bureaux, la deuxième journée de repos est donnée collectivement le samedi et le personnel n'est pas remplacé. Marie-Antoinette Delbau est la seule "B" recrutée pour travailler les samedis et lundis à la réception1618. Mais elle est embauchée pour les fêtes de fin d'année, c'est-à-dire pour une période où l'activité commerciale, particulièrement importante, justifie des livraisons exceptionnelles le samedi.

Une telle organisation de l'emploi laisse alors la majeure partie des postes de travail occupés par des hommes à l'écart des emplois à temps partiel. Seuls quelques manutentionnaires des rayons doivent être remplacés. Ce sont bien, alors, d'autres hommes qui sont embauchés pour le roulement. Hassen Diffalah travaille ainsi les lundis et samedis seulement au rayon droguerie1619, Henri-Claude Decleire à la parfumerie1620, Léon Demol ou Joseph Donsimoni à l'alimentation1621.

Notes
1614.

GBL, C5n°16, entrée le 15 septembre 1960 ; C5n°63, entrée le 3 septembre 1960 et C9n°51, entrée le 24 septembre 1960.

1615.

Entretien avec Janine Gay, cité.

1616.

GBL, C3n°37, entrée le 3 août 1962.

1617.

Entretien avec Janine Gay, cité.

1618.

GBL, C4n°49, entrée le 6 novembre 1954.

1619.

GBL, C7n°7, entré le 7 janvier 1970.

1620.

GBL, C6n°4, entré le 17 septembre 1966.

1621.

GBL, C8n°55, entré le 7 octobre 1960 et C4n°50, entré le 14 mars 1960.