III/ LA REMUNERATION

Après la précarité des emplois, la faiblesse des salaires était le deuxième levier de la gestion flexible de la main-d'oeuvre au Grand Bazar avant 1936. Les salariées du Grand Bazar étaient globalement très mal payées, quel que soit leur poste de travail (à l'exception des membres de l'encadrement). Mais l'individualisation des salaires et la "politique sociale" de l'entreprise permettaient à la direction de réserver à quelques unes, jugées "méritantes", une meilleure rémunération. La signature des premières conventions collectives dans le commerce, sous le Front populaire, a mis fin à l'entière liberté légale dont disposaient les employeuses et employeurs en matière de fixation des salaires. Entre 1951 et 1974, la politique salariale des entreprises est strictement encadrée par les barèmes négociés avec les syndicats de salariées, qui imposent le respect de tarifs minima pour chaque poste de travail et édictent une hiérarchie précise qui n'existait pas au Grand Bazar avant 1936. Les effets des classifications professionnelles sur la distinction des postes sont, cependant, atténués par la réorganisation de la structure du travail dans le nouveau Prisunic et par l'existence de "primes" propres au Grand Bazar qui s'ajoutent aux salaires minima.

En revanche, la composition des revenus des salariées est simplifiée par rapport à la période antérieure à 1936. Tous les éléments qui relevaient de la "politique sociale" du magasin (le versement de pensions de retraite, l'indemnisation de la maladie et les allocations familiales) sont désormais pris en charge par l'Etat. En la matière, la création de la Sécurité sociale en 1946 a constitue une étape importante dans l'évolution de "l'Etat providence". La rémunération des salariées n'est, par conséquent, complétée que par une prime d'ancienneté et d'éventuelles heures supplémentaires. Plus aucune archive ne permet cependant d'avoir la moindre donnée quant à l'existence et au volume d'heures supplémentaires, qui constituaient, avant 1936, un élément de revenus parfois très important pour les salariées. Pour la période 1951-1974, il n'existe, en effet, aucune source comparable aux registres de déclarations de salaires des années 1920. La rémunération des salariées du Grand Bazar n'est donc quasiment connue que par les contrats de travail.