1/ peu de promotions

Trois seulement des 72 "B" dont on a retrouvé le dossier de retraite obtiennent le statut de cadre au cours de leur vie professionnel, un homme et deux femmes. Claude Dormoy est le seul "B" à faire carrière au sein de la société du Grand Bazar1805. Embauché comme manutentionnaire en 1954, à 24 ans, il est promu premier vendeur six mois plus tard. L'ouverture du Grand Bazar du Bachut, en mars 1958, est pour lui l'occasion d'un nouvel avancement. Il devient chef du groupe "alimentation" et donc cadre dans le nouveau magasin. Il conserve alors ce statut pendant une grande partie de sa carrière. Après dix années de travail au Bachut, il déménage en Bretagne puis en Lorraine. Pendant treize nouvelles années, Claude Dormoy est cadre dans deux sociétés commerciales différentes, les Nouvelles Galeries et un commerce agricole. Mais l'ascension professionnelle des cadres autodidactes (il n'a aucun diplôme) est fragile et à partir de 1981, à 51 ans, il est au chômage jusqu'à la retraite, à l'exception d'un emploi de quelques mois au milieu des années 1980. Arlette Deleau et Marie Doreau, qui ne font pas carrière au Grand Bazar, parviennent, en revanche, à conserver leur statut de cadre jusqu'à la retraite. Pour la première, c'est au prix d'une grande stabilité dans l'emploi. Elle est embauchée au Grand Bazar comme vendeuse à temps partiel en 1954, à 19 ans, à son arrivée à Lyon – elle était auparavant vendeuse dans une épicerie dans la Drôme1806. Titularisée quelques mois après son entrée, elle démissionne cinq ans plus tard, lorsqu'elle se marie, pour travailler plus près de chez elle. Elle est alors embauchée chez Renault Véhicules Industriels comme "employée", devient cadre à 35 ans et reste dans l'entreprise jusqu'à sa retraite. Marie Doreau ne se stabilise pas dans une seule entreprise, mais dans un secteur d'activité, le commerce de vêtements1807. Elle a déjà été vendeuse dans plusieurs commerces avant d'entrer au Grand Bazar en 1959, à 25 ans. Titularisée au rayon crémerie en janvier 1961, elle démissionne deux ans et demi plus tard, n'ayant pu obtenir le changement de rayon souhaité. Elle travaille alors un an aux Galeries Lafayette puis une autre année pour la société Etam, avant d'être embauchée par une autre entreprise commerciale, Mila, où elle reste 12 ans. C'est là qu'elle obtient un statut de cadre, sept ans après son entrée, à 37 ans. A 43 ans, elle travaille à nouveau pour Etam, cette fois comme cadre pendant un an, puis 10 ans pour une autre société lyonnaise, puis, entre 55 et 60 ans, à nouveau pour Etam.

L'ascension professionnelle de ces trois salariées n'est pas seule à rendre leurs carrières exceptionnelles par rapport à celles des 69 autres salariées dont le dossier de retraite a été retrouvé. La grande stabilité sectorielle de ces parcours est un autre motif de distinction.

Notes
1805.

GBL, C15n°27, entré le 1er décembre 1954 et CIRRIC, DR n° 02.3.397.499 Y H 1.

1806.

GBL, C1n°51, entrée le 13 mars 1954 et CIRRIC, DR n° 02.3.804.679 LF2.

1807.

GBL, C9n°51, entrée le 3 octobre 1959 et CIRRIC, DR n° 02.3.797.969 FF2.