Le fleuve

Pour qui habite Lyon, une des rare villes à être traversée par un fleuve et une rivière, ces espaces sont partie intégrante du paysage urbain : repères géographiques - la presqu’île, les bords de Saône, les berges du Rhône -, espaces de loisirs urbains où les cyclistes, les amateurs de rollers, les promeneurs, investissent les berges le week-end pour déambuler le long de l’eau. Le fleuve est aussi une scène où se mêlent ponts et passerelles, constructions remarquables, transfigurés en objets esthétiques par leur mise en lumière qui, le soir venu, ajoutent de la splendeur à la brillance de l’écrin qu’est la ville ; les péniches dont les habitants-concepteurs rivalisent d’ingéniosité pour transformer ces bateaux de transport de marchandises en maisons flottantes dotées de tous les conforts et, depuis peu, ces paquebots fluviaux, véritables bateaux de croisière qui viennent faire escale dans la ville de lumière avant de descendre en Provence.

Espace scénique et paysagé pour des déambulations urbaines évoquées partiellement ici, le fleuve est aussi un objet de connaissances biologique, géographique, historique, économique, sociologique et ethnologique qui permettent d’atteindre d’autres niveaux de ses réalités. Le Centre pour une anthropologie du fleuve, de la Maison du Rhône, s’est emparé de cet objet et a mis en place un programme de recherches en Sciences Sociales afin d’en saisir plus finement ses multiples dimensions. Depuis dix ans, le Centre s’attache au travers d’une approche pluridisciplinaire à analyser le fleuve en tant que territoire support d’activités économiques, sociales et culturelles et à développer à partir de là une réflexion autour de la notion de « culture de fleuve », considérant les différentes relations entretenues entre l’homme et le fleuve. André Vincent, ethnologue et chargé du programme scientifique de la Maison du Rhône, commente cette approche : ‘«  un fleuve est un territoire - au long cours - formant parfois frontière ou limite, sur lequel les hommes ont développé et développent des activités économiques, sociales et culturelles. Organisateur du temps et de l’espace de ses riverains, il est au même titre que la mer et la montagne un élément de nature auquel les hommes se sont de tous temps confrontés, contre lequel ils ont essayé de se prémunir tout en essayant d’en retirer les moyens de vivre. Partant de là, se sont construits autant de savoirs, savoir-faire, techniques, croyances, représentations, dont l’étude nous donne à voir ce que nous nommons à partir du Rhône « une culture de fleuve’ »5.

Notes
5.

Vincent A, « Culture de fleuve » in Le Rhône. Un fleuve et des hommes, Le monde alpin et rhodanien, 1-3/1999 p. 7.