3) Histoire de la ville

Aux origines de la fondation, entre légende et histoire

Les origines de la capitale actuelle de la Roumanie relève d’un récit légendaire de fondation auquel viennent s’adjoindre des faits historiques attestés ainsi qu’une réalité géo-politique et économique. Lorsque l’on suit le trajet la Dîmbovita dans la capitale, peu après avoir traversé la Place de l’Union (Piata Unirii) et à l’endroit où la rivière prend la forme d’un coude pour bifurquer sur la droite, sur la rive droite et au milieu des nouveaux immeubles, on peut apercevoir la petite église de Bucur (annexe photographique n°17). Pour certaines villes, la légende, les mythes de fondation et l’histoire constituent deux modes de leur connaissance. Selon la légende, retranscrite par le moine fransiscain Blasius Klainer en 1761, cette église, la plus vieille de la ville, aurait été construite par un berger du nom de Bucur, considéré, selon cette perspective, comme le fondateur de la ville. En réalité, il semblerait plutôt, au vue des dernières recherches, que l’église date du XVIIIème siècle et qu’elle ait été une partie - la chapelle du cimetière - de l’ensemble monastique de Radu Voda qui date du XVIème siècle. Les premiers documents qui mentionnent la ville de Bucarest date de 1459, ils émanaient de la chancellerie du Prince régnant de Valachie176, Vlad Tepes177.

A l’époque, on ne parle pas encore d’une capitale mais d’un bourg susceptible d’accueillir la résidence du Prince. Bucarest est la capitale de la Valachie depuis le XVIIème siècle. L’existence de Bucarest en tant que capitale est étroitement liée à la chute de Constantinople en 1453 et des Vovoïdes178 qui ont pensé le Danube comme une barrière contre les invasions turques, pour sauver le christianisme. Bucarest devra le fait qu’elle passe du statut de résidence des Princes à capitale parce qu’elle est située à proximité du Danube et qu’elle s’inscrivait dans un projet de territoire de défense. L’historien Constantin C. Giurescu considère que ‘« la préférence marquée par Vlad Tepes pour la ville des bords de la Dimbovitsa, au détriment de la résidence antérieure de Tirgoviste, est justifiée non seulement par des considérations stratégiques, mais, peut-être aussi, par des possibilités économiques supérieures, et elle a eu, à son tour, des conséquences très favorables pour le développement de Bucarest’ »179.

Pendant encore quelques années, le choix de la capitale n’est pas encore définitif et dépendant de la volonté des princes régnant, certains préférant résider à Tîrgoviste d’autres à Bucarest. La ville est résidence princière et capitale de la Valachie en 1659, puis capitale des Principautés Réunies de la Valachie et de la Moldavie en 1859 et enfin, capitale de la Roumanie en 1859, date à partir de laquelle la ville connaîtra une réelle expansion. La résidence du Voïvode puis du gouverneur de l’état d’Ilfov se situait sur la rive gauche de la Dîmbovita, qui allait accueillir plus tard Curtea Veche - la cour ancienne c’est-à-dire la plus ancienne résidence princière de Bucarest. Mais le premier document qui indique Bucarest comme résidence princière date de 1459.

D’ancienne demeure des Princes régnant, Bucarest devient, au mois de décembre 1861, la capitale de la Roumanie. Le pays, suite à la révolution de 1848, puis à l’union des principautés en 1859, doubla sa surface et sa population. Jusqu’à la première guerre mondiale, la ville se développa rapidement, construisant un nombre non négligeable d’édifices publics et de bâtiments à caractère industriel. La ville connut un essor digne d’une capitale d’un pays, qui est devenu Royaume en mars 1881.

Notes
176.

Valachie, principauté roumaine qui se situe entre les Carpates, le Danube et la Mer Noire.

177.

Vlad Tepes dit « Vlad l’empaleur » a régné sur la principauté de Valachie en 1448 puis de 1456 à 1462 et en 1476. Il doit son nom à sa manière de combattre l’ennemi à qui il appliquait le châtiment de l’empalement. Il est aussi connu sous le nom de Dracula, c’est-à-dire porteur de l’ordre des Chevaliers du Dragon (Dracul en roumain). Mais, c’est le livre de Bram Stocker ( ) qui rendit son nom célébre en lui donnant la figure du vampire par excellence.

178.

Princes régnant en Valachie et en Moldavie.

179.

Giurescu C.C. Histoire de Bucarest. Editions sportives et touristiques, Bucarest, 1976, pp. 23-24.