1. Une concentration particulièrement sélective, et des métropoles relativement différenciées

A l'échelle macrogéographique, la métropolisation se caractérise par une dynamique de polarisation sur les plus grandes villes : P. Julien [1994] parle d’ailleurs de “ métropolarisation ”. Les créations d’entreprises sont ainsi nettement plus favorables aux métropoles qu’aux autres territoires [Duchesne, 1999]. Cette concentration favorise en outre les villes qui étaient au départ les plus tertiaires, et renforce largement leur avantage en la matière [Léo, Philippe, 1997 ; Pumain, Saint Julien, 1996 ; Terrier, 1990], tandis que la part des activités manufacturières demeure plus importante dans les villes moyennes [Duranton, Puga, 2000]. Les métropoles accueillent tout particulièrement des activités stratégiques et décisionnelles, de recherche et d’innovation [Bataïni, Coffey, 1998], ainsi que de connectivité entre les niveaux régionaux et internationaux [Catin, 1995 ; De Roo, 1993].

Cette dynamique induit par ailleurs une réorganisation de la structure interurbaine, non pas au niveau de la hiérarchie globale, qui reste relativement stable, mais en termes de relations entre les métropoles, ainsi qu’entre ces dernières et leur espace régional. Les liens entre métropoles connaissent en effet un développement significatif, de sorte qu’une structure en réseaux, qu’ils soient physiques, comme ceux qu’engendre le TGV entre Paris et les métropoles de province [Plassard, 1992], ou bien virtuels, tend à se substituer à l’ancienne organisation entre les villes, plus verticale et hiérarchique [Camagni, 1996]. Les relations avec l’hinterland s’avèrent à l’inverse plus réduites que par le passé, du fait que les métropoles n’ont plus forcément besoin de liens très étroits avec leur environnement. D'autant plus que les niveaux inférieurs de la hiérarchie urbaine ont acquis au fil des décennies un certain nombre de fonctions, en particulier dans le domaine des services, autrefois uniquement disponibles au centre de la métropole, et sont devenus, dans une certaine mesure, plus autonomes [Buisson, 1999]. A terme, le territoire est malgré tout menacé de dualisation entre les métropoles connectées aux réseaux principaux et les espaces qui n’y ont pas accès [Veltz, 1996].

En réalité, ces métropoles sont de tailles et de natures assez diverses. M. Bonneville et al. [1992], dans le cadre du projet NICE 3 , font ainsi la distinction entre des villes technologiques, dont la base productive est spécialisée et fortement internationalisée, des villes “ interfaces ” (comme Lyon), qui sont des métropoles régionales plus diversifiées, avec notamment une plus forte proportion de services aux entreprises, et enfin des villes de régulation, rares et de très grande taille, caractérisées par un positionnement spécifique et exceptionnel au sein des systèmes politiques et financiers internationaux. La dynamique de métropolisation a donc tendance à renforcer et à maintenir les spécialisations et les rôles initiaux des grandes villes, plutôt qu’à homogénéiser les profils urbains.

Notes
3.

NICE = New International Cities Era.