Conclusion

Nous avons fait le constat que les services aux entreprises participent de façon conséquente aux dynamiques intramétropolitaines.

Nous aurions de prime abord pu supposer que ces activités étaient à l’origine de la dynamique de multipolarisation ; cette hypothèse est plutôt infirmée par les différents travaux que nous avons consultés. Ils soulignent que la périphérisation des services aux entreprises est une tendance qui, si elle alimente les transformations en cours voire en sont une composante essentielle, reste postérieure à l’émergence de pôles en périphérie [Hartshorn, Muller, 1989]. A partir de là, nous pouvons envisager deux autres hypothèses, qui ne sont d’ailleurs pas nécessairement exclusives l’une de l’autre. La première suppose que les services aux entreprises, en quittant le centre, ne font que conforter les pôles existants, et éventuellement, mais ce serait fondamental, changent leur nature. La seconde hypothèse suggère que la dynamique de périphérisation de ces activités tend à faire émerger de nouveaux pôles, contribuant de la sorte à l’éclatement de l’espace intramétropolitain, mais aussi à l'essor de spécialisations supplémentaires en périphérie. Les travaux antérieurs ne nous permettent pas véritablement de trancher.

Dans tous les cas, l’évolution des localisations n’est pas neutre pour la métropole, non seulement pour sa périphérie, nous venons de l’évoquer, mais aussi pour son centre historique, qui tenait jusque-là pour une de ses principales spécificités la concentration de ces activités en son sein, en particulier celles de haut niveau. La dynamique de périphérisation des services aux entreprises remet finalement en question le monopole de l’exercice de la centralité par le seul centre historique. Elle peut certes conduire à une réorganisation de la centralité, à une échelle plus vaste [Lacour, Gaschet, 2000], mais aussi à un déclin du centre [Goldsmith, 1991 ; Porter, 1995]. Cette deuxième hypothèse semble malgré tout plutôt concerner les grandes villes nord-américaines, dans lesquelles le CBD regroupe les minorités et les populations les plus pauvres, et apparaît même dans certains cas engagé dans une véritable de spirale de l’appauvrissement [Stegman, Turner, 1996]. L’intervention des pouvoirs publics peut alors être nécessaire afin d’encourager l’ancrage des entreprises dans la ville-centre, comme le montre l’exemple des Corporations de Développement Economique Communautaires à Montréal, qui s’emploient notamment à créer des synergies entre les acteurs locaux [Morin, Lémieux, 1999].

Peu de travaux mènent une analyse simultanée des logiques de localisation des services aux entreprises et de l’évolution des structures intraurbaines. Ceux d’entre eux qui s’intéressent aux dynamiques de multipolarisation ne font, la plupart du temps, que constater la périphérisation croissante de ces activités. Réciproquement, les études qui cherchent à comprendre les facteurs de localisation intramétropolitains sont peu utilisées pour comprendre les restructurations à l’oeuvre, et leur dimension spatiale se réduit la plupart du temps à une rapide différenciation des éléments valorisés au centre et en périphérie, qui se révèle finalement assez pauvre. Il nous semble par ailleurs qu’une attention insuffisante est accordée aux écarts de comportements de localisation qui existent au sein même du secteur.

Ce chapitre nous a permis, à travers une réflexion basée à la fois sur des éléments théoriques et empiriques, de formuler un certain nombre d’hypothèses. Elles concernent d’une part le rôle des services aux entreprises en intraurbain, d’autre part leurs logiques de localisation. Ces hypothèses vont à présent être testées à travers l’exemple de la métropole lyonnaise. La deuxième partie est ainsi consacrée à l’analyse du rôle de ces activités dans les transformations intraurbaines sur la période 1982/1996, et la troisième présentera les résultats de deux enquêtes réalisées au printemps 1999 auprès d’établissements.