A. L’attrait et la spécialisation du centre historique confirmés

Le centre de la métropole demeure incontestablement une localisation privilégiée pour les activités de services aux entreprises, comme c’est d’ailleurs le cas dans la plupart des métropoles européennes et canadiennes (cf. partie 1).

1. Une centralité remarquable mais en diminution régulière

Dès 1982, les services aux entreprises se distinguent comme le secteur le plus central de la métropole lyonnaise, puisque près de 70% des établissements sont localisés à Lyon ou à Villeurbanne (tableau 2-21). Cette tendance ne fait que se confirmer par la suite, même si le poids du centre subit une érosion régulière, particulièrement sensible entre 1990 et 1996 77 . Il demeure qu’en 1996, près de 60% des établissements sont implantés à Lyon ou à Villeurbanne, ce qui est une proportion comparable à celle secteur de la finance, de l’assurance, de l’immobilier et de la location. Cette concentration confirme l’attrait spécifique de la localisation centrale pour les fonctions tertiaires supérieures, c’est-à-dire typiquement métropolitaines. A contrario, les secteurs les moins centraux sont, bien évidemment, l’agriculture, dont les établissements sont principalement localisés dans les petites communes (moins de 2 000 habitants) de la couronne périurbaine, ainsi que l’industrie, la construction et les transports et communications. Toutes ces activités sont en effet plus fortement consommatrices d’espace que le tertiaire, et affichent des exigences différentes en termes de locaux et de prix fonciers [Ninnin, 1986]. Par ailleurs, les activités industrielles polluantes ou bruyantes n’ont pas le droit de s’implanter au centre, et plus généralement trop près d’une zone d’habitation.

Tableau 2-21 : Proportion d'établissements localisés au centre de l’aire urbaine de Lyon par secteur d’activité en 1982, 1990 et 1996
  agri indus comdét comgros transp fin SE collperso tous secteurs
1982 7% 46,2% 56,9% 60,7% 39,7% 59,3% 68,2% 54,8% 54,2%
1990 4,5% 40% 53,5% 53% 34% 52,6% 65,4% 50,4% 49,6%
1996 2,7% 34,2% 51,6% 45% 31,9% 59,5% 58,6% 49% 46,1%
Source : INSEE, SIRENE

La diminution régulière du poids du centre pour les services aux entreprises est en fait trompeuse. Elle ne signifie pas, comme c’est le cas pour les secteurs de l’agriculture, de l’industrie, de la construction ainsi que du commerce de détail, un déclin du volume des établissements ; elle traduit le fait que le rythme de croissance, qui est de 63,1% au centre, est plus soutenu en périphérie (+85,1%) (tableau 2-22). Mais en valeur absolue, ce sont bien Villeurbanne, et surtout Lyon, qui enregistrent entre 1982 et 1990 la plus forte augmentation, avec un gain de 2376 établissements, contre 1495 en périphérie. Les autres secteurs particulièrement dynamiques au centre ont été les activités financières, d’assurance, d’immobilier et de location (+23,5%), ainsi que les services collectifs et personnels (+28,3%). Un tel développement des fonctions tertiaires, et notamment du tertiaire supérieur, a été encouragé par les pouvoirs publics dès le SDAU 78 de 1978, et réalisé par les promoteurs qui ont fortement développé l’offre de bureaux, et en particulier à la Part-Dieu, où s’est constitué progressivement un centre d’affaires, qui accueille en outre la Cité Administrative d’Etat. “ On estime à près de 2,9 millions de m² le volume des bureaux construits dans la Communauté urbaine entre 1974 et 1995, dont 55% à Lyon et Villeurbanne. Le parc actuel peut être estimé à 3,5 millions de m², dont les trois-quarts sont situés dans le centre de l'agglomération (Lyon et Villeurbanne) et près d'un quart à la Part-Dieu ” [Bonneville, 1997, 112]. Il en résulte que le centre a renforcé sa spécificité d’espace privilégié d’implantation pour les services aux entreprises, comme l’ont montré les deux typologies précédentes.

  agri indus comdét comgros transp fin SE collperso Total
centre en 1982 70 9046 14370 3571 1119 6210 3762 7167 45315
centre en 1990 65 8275 12371 3843 1202 7673 6138 9200 48764
évolution centre 82/90 -7,1% -8,5% -13,9% 7,6% 7,4% 23,5% 63,1% 28,3% 7,6%
périphérie en 1982 922 10523 10861 2313 1695 4260 1756 5908 38238
périphérie en 1990 1379 12387 10753 3401 2334 6920 3251 9036 49461
évolution périphérie 82/90 49,5% 17,7% -0,1% 47% 37,7% 62,4% 85,1% 52,9% 29,3%
Source : INSEE, SIRENE

Villeurbanne, ainsi que l'ensemble des arrondissements lyonnais, ont bénéficié du fort développement des services aux entreprises entre 1982 et 1990 (tableau 2-23). Les arrondissements les plus favorisés ont été ceux où l’offre de bureaux est la plus abondante et l’accessibilité la meilleure. Ainsi, les plus forts taux de croissance ont été enregistrés dans le neuvième (+142,1%) c’est-à-dire le quartier de Vaise, où la friche industrielle due au départ de Rhône-Poulenc a permis la mise en place progressive de bureaux, et dont le développement a été favorisé par la construction d'une station de métro, le septième arrondissement (+104,3%), qui correspond au quartier de Gerland, lui aussi desservi par le métro mais seulement depuis le milieu de l’année 2000, ainsi que le troisième (+91,1%), où a été implantée la majeure partie du centre d’affaires de la Part Dieu, qui a bénéficié de la mise en place du métro et de la gare TGV dès le début des années quatre-vingt. Ces arrondissements, auxquels il convient d’ajouter le deuxième, sont également ceux pour lesquels la croissance des activités de finance, d’assurance, d’immobilier et de location a été la plus importante, ce qui confirme la tendance à la concentration spatiale du tertiaire supérieur. En revanche, les premier et deuxième arrondissements, ancien hypercentre, se sont montrés assez peu dynamique en termes de services aux entreprises. La progression a par contre été significative à Villeurbanne, confirmant la tertiarisation de la commune, pourtant longtemps marquée par l’activité industrielle [Bonneville, 1975]. Pour autant, le secteur de l’industrie et de la construction y demeure encore très présent (il représente plus du quart des établissements en 1982 et 1990), et leur nombre y a même crû légèrement (+2,2%), contrairement à Lyon, tandis que les activités de finance, d’assurance, d’immobilier et de location y ont enregistré une légère baisse entre 1982 et 1990. Lyon a donc un profil un peu plus tertiaire, et surtout tertiaire supérieur, que Villeurbanne.

Tableau 2-23 : Les établissements de services aux entreprises par arrondissement de Lyon et à Villeurbanne en 1982 et en 1990
  1er arrdt 2ème arrdt 3ème arrdt 4ème arrdt 5ème arrdt 6ème arrdt 7ème arrdt 8ème arrdt 9ème arrdt Villeurb
1982 414 716 565 168 201 610 343 134 178 433
1990 559 904 1080 258 299 951 701 206 431 749
évolution 82/90 35% 26,2% 91,1% 53,6% 48,7% 55,9% 104,3% 53,7% 142,1% 73%
Source : INSEE, SIRENE

Notes
77.

Ces comparaisons sont toutefois à prendre avec précaution du fait du changement de nomenclature intervenu en 1993.

78.

SDAU = Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme.