Discussion

L’objectif de la présente étude était de déterminer si les odeurs plaisantes peuvent influencer le jugement de visages féminins. De plus, notre intérêt se portait également sur l’interaction entre odeurs, niveau de conscience et sexe. Nous avons étudié les effets des odeurs, des instructions et du sexe de l’observateur sur des jugements affectifs d’une part, et sociaux d’autre part.Le premier résultat qui réplique clairement des résultats antérieurs est la différence dans le comportement selon le sexe de l’observateur. Ce résultat est largement en accord avec un certain nombre d’études qui ont montré des différences selon le sexe (Kirk-Smith et al., 1983 ; Hermans et al., 1998). Nous observons que les femmes sont plus sensibles aux odeurs que les hommes quand elles réalisent un jugement d’attirance. Leurs évaluations sont augmentées quand elles sont exposées à une odeur agréable. Cependant, nous observons que les effets des odeurs peuvent être «opposés» selon les caractéristiques évaluées. Concernant le jugement porté sur l’intelligence, les observateurs masculins qui sont informés de la diffusion de l’odeur, diminuent leurs évaluations des visages dans un environnement parfumé par rapport aux évaluations de visages dans un environnement non parfumé.

Le second résultat est que le niveau de conscience est une variable importante qui doit être prise en compte. Nous observons que les évaluations peuvent être modulées selon le niveau de conscience, dans différents types de jugements (sexy, intelligente et dominante). Une autre étude (Gilbert et al., 1997), que nous avons mentionnée plus haut, montre également que les effets des odeurs sont plus évidents chez les femmes conscientes de la diffusion de l’odeur.

Un autre résultat intéressant est que les odeurs tendent à affecter les évaluations de visages seulement durant des jugements affectifs. Ainsi, selon nos résultats, les odeurs plaisantes peuvent moduler les évaluations d’individus photographiés. Les représentations émotionnelles des odeurs influencent ou colorent impressions. Quand ces représentations sont activées, alors elles peuvent influencer la perception de visages au cours d’un jugement affectif. Ce résultat est en accord avec les hypothèses de primauté de l’affect formulée par Zajonc (1980, 1984) et Murphy et Zajonc (1993). Ces auteurs utilisent un paradigme expérimental nommé amorçage affectif. Ils montrent qu’une exposition à une amorce (stimulus affectif) influence les évaluations des stimulus cibles (stimulus neutre). Ce résultat est interprété comme une preuve de l’existence chez l’Homme d’un système affectif primaire qui permet d’évaluer automatiquement les informations afférentes. Dans notre étude, en dépit du fait que nous n’avons pas utilisé le même paradigme expérimental, nous supposons que les odeurs pourraient activer des représentations hédoniques et influencer les jugements.

Ainsi, notre étude indique que l’information olfactive peut activer des représentations émotionnelles en mémoire. Par la suite, l’état mental résultant pourrait influencer des jugements évaluatifs sur des percepts non olfactifs. Le contenu affectif d’un stimulus olfactif couplé avec un autre stimulus comme un visage module la perception de ce dernier et influence les jugements exprimés sur certaines de ses caractéristiques.