Discussion

Le premier résultat de l’étude est la démonstration claire que le motif des variations de rythme cardiaque pour la tâche perceptive est pratiquement identique à celui observé pour la tâche hédonique : on observe une élévation du rythme cardiaque due aux odeurs désagréables dans ces deux types de tâches par rapport aux odeurs agréables ou à la situation sans odeur. Le motif est totalement différent quand les sujets doivent réaliser un jugement de familiarité. Ainsi, le jugement de familiarité semble inhiber les réactions psychophysiologiques observées lors d’un jugement hédonique ou d’une perception olfactive sans tâche particulière. Ce résultat est en accord avec ceux des temps de réponses. Il semble donc que les réseaux neuronaux impliqués durant les jugements de familiarité et hédonique soient différents et que le premier exerce une influence sur le dernier. Des données de neuroanatomie fonctionnelle plaident en faveur d’une telle hypothèse et indiquent que les aires hypothalamiques sont activées spécifiquement lors d’un jugement hédonique (Zatorre et al., 2000) et pas lors d’un jugement de familiarité (Royet et al., 1999).

Le second résultat particulièrement intéressant est que l’on observe une accélération du rythme cardiaque lors de la présentation d’odeurs désagréables durant les conditions ’hédonique’ et ’sentir’. Dans la modalité visuelle et auditive, la présentation de stimulations de valence émotionnelle négative a généralement pour conséquence une diminution du rythme cardiaque (Lang et al., 1990). Cependant, la présentation d’odeurs désagréables provoque un effet inverse, à savoir une accélération (Braüchli et al., 1995 ; Alaoui-Ismaïli et al., 1997a ; Alaoui-Ismaïli et al., 1997b). Nous n’avons pas d’explication de cette différence entre vision et audition d’un côté et olfaction de l’autre, mais un axe de recherche possible pourrait résider dans la relation entre émotion et imagerie mentale. En effet, Lang et al. (1990) mentionne une accélération du RC quand les sujets doivent générer une imagerie de scènes désagréables, et une décélération quand ils doivent seulement les regarder. Le traitement émotionnel n’est donc pas invariant entre les modalités, ni même a l’intérieur d’une modalité. La comparaison entre imagerie et perception (Carrasco, 1993) a déjà été faite en psychophysique de l’olfaction (Algom, 1991), elle reste à faire en psychophysiologie.