Dans cette catégorie, nous pouvons rassembler deux outils utilisés par les conseillers de la MIFE en vue de faciliter une expression de l'identité professionnelle : le questionnaire Centre de gravité professionnelle (CGP) et le blason 666 .
Le CGP
Créé par un institut lyonnais 667 , ce questionnaire a été diffusé dans le réseau rhônalpin des MIFE à partir de 1992. Au vu du petit nombre de questions — quatorze questions recueillant le point de vue de la personne-consultante sur différents thèmes d'ordre organisationnel, culturel —, on pourrait arguer facilement du manque de scientificité de l'outil qui ne peut faire partie de la panoplie des tests psychotechniques, n'ayant jamais été étalonné. Indépendamment de sa légèreté, suspecte aux yeux des spécialistes, mais appréciée par les personnes, qui le considèrent davantage comme un questionnement ludique, semblable aux tests de magazines, cet outil, basé sur les déclarations des personnes, sonne "juste" 668 .
Les réponses sont classées, répertoriées, traitées, pour aboutir à une résultante appelée "centre de gravité professionnel", présentée par un point sur un graphique en quatre axes, symbolisés par deux abscisses et deux ordonnées. L'axe vertical est relatif à l'expression de soi dans son opposition à la loi ou règle ; l'axe horizontal souligne la relation à l'environnement, dans son appréhension réfléchie ou intuitive. L'intérêt de cet outil réside sans doute dans cette dialectique du rapport de soi au monde 669 , traduit par un positionnement sur un graphique, basé sur une typologie professionnelle, ce qui, selon l'auteur, décrirait des tendances naturelles vers telle ou telle dominante psycho-professionnelle. Il est utilisé par les conseillers de la MIFE, non pas dans un sens diagnostic qui risquerait d’asséner une pseudo-vérité sur un quelconque profil, mais pour amorcer avec la personne une première réflexion sur ses propres représentations professionnelles, ce qu’elle n'a pas toujours eu l'habitude de faire. De plus, il vient la conforter dans une dominante, ce qui lui permettra de prendre conscience de son identité professionnelle et de commencer à la parler. Enfin, il a surtout valeur d'exercice, de prétexte pour se dire en termes professionnels.
Le blason
Beaucoup plus explicité sur le plan théorique, le blason est un support d'une expression de soi que l'on peut utiliser à des fins professionnelles. André de Péretti a expérimenté cet outil dans le cadre d'une étude sur les supports de l'échange et du dialogue, dans la perspective rogérienne qui l'anime, en reprenant l'idée du support métaphorique 670 . Issu des traditions des cavaliers mongols reprises en Europe, au Moyen Age, par l'aristocratie, les corporations et les villes, le blason est un raccourci métaphorique pour dire de façon valorisante son identité, ce que je suis, mais aussi ce que je veux être, c'est-à-dire le présent et le projet. Le blason permet, par un travail d'imagination et par une expression symbolique, de mettre au jour et ainsi de renforcer les représentations positives de soi, invitant la personne à "un effort de réflexion valorisant sur elle-même avec le symbolisme de fierté inhérent au blason" 671 . Dans une situation éducative, individuelle ou collective, l'exercice du blason sera différent selon les objectifs précisés préalablement. Son utilisation en orientation professionnelle se justifie entièrement par la dimension de projection de soi-même qu'il comporte. Matériellement, cet outil est simple : une feuille sur laquelle on a dessiné un écusson avec des cases. Le contenu des cases sera différent en fonction de l'objectif attribué 672 .
Le blason adapté en orientation est formalisé dans une composition en sept cases : tout d'abord, la personne doit imaginer et écrire une devise qui dit qui elle est professionnellement. Elle va ensuite mentionner quatre difficultés rencontrées dans son parcours et, en face, deux moyens pour les résoudre, deux qualités qu'elle s'attribue et deux références sur lesquelles elle s'appuie (littéraires, artistiques, personnes ressources etc..) ; puis, au moyen d'un dessin simple, elle va représenter sa situation actuelle et son rapport au monde ; enfin, dans une case "au choix", la personne ajoutera ce qu'il lui semble opportun de préciser. Cette case est souvent orientée par le conseiller sur la projection ou le rêve d'avenir.
Cet exercice, qui a le mérite d'être concis, peut être proposé au cours d'un entretien. Il favorise une expression spontanée et positive de soi, tout en suscitant le dialogue avec le conseiller. Ce type de communication permet à la personne de se situer avec des mots ajustés et au conseiller de prendre connaissance des références culturelles et des valeurs exprimées.
On peu noter cependant une utilisation moins fréquente de ces outils, qui ne bénéficient pas de l'exhaustivité des deux premiers.
L'institut de la Vocation à Lyon.
Cf. Document en annexe.
Dans les contacts que nous avons eus avec le créateur du questionnaire, nous n'avons jamais pu prendre connaissance des sources et bases psychotechniques de l'inventaire des questions, ceux-ci ne semblant pas avoir été conceptualisés. On peut jugé regrettable le syncrétisme du langage utilisé pour décrire les dominantes psycho-professionnelles, mêlant des vocables de métier ("vendeur", "animateur"), de statut professionnel ("artisan"), des appellations plus psychotechniques ("créatif, bâtisseur") et des concepts du langage courant ("réviseur", "contrôleur"). Dans sa synthèse, le conseiller de la MIFE privilégie la lecture du positionnement en fonction des axes, c'est-à-dire les explications en termes de rapport "soi/environnement", sans s'engager dans des définitions qui semblent manquer de fondement théorique.
André de Péretti a conduit sa réflexion en lien avec les travaux de Daniel Hameline, pour qui l'usage de la métaphore fait partie intrinsèquement du langage et touche tous les domaines, pas seulement littéraire mais aussi scientifique et technique.
André de PÉRETTI, "La pédagogie différenciée", in Les Amis de Sèvres, revue trimestrielle, CIEP, Sèvres, n°3, Septembre 1986, p. 78.
Dans sa recherche, André de Péretti a imaginé plus de dix scénarios. Cf. André de PÉRETTI, Art. cit., pp. 78-85. Pascal Galvani, s'appuyant sur sa théorie du blason, a effectué une recherche sur l'utilisation du symbole en autoformation. Cf. Pascal GALVANI, Autoformation et fonction de formateur : des courants théoriques aux pratiques de formateurs, Les ateliers pédagogiques personnalisés, Lyon, Chronique sociale, 1991, 170 p.