1.3.2. Impact de la durée de la prestation sur l'élaboration de projet

Il convient d'aborder l'impact de la prestation d'orientation sur l'élaboration de projet au travers de sa durée et du nombre d'outils utilisés. Pour cela, nous croiserons le nombre d'entretiens et le nombre d'outils utilisés avec le critère d'élaboration de projet.

Nombre d'entretiens et élaboration de projet

En ce qui concerne le nombre d'entretiens, déjà présenté dans le tableau 3 "Nombre d'entretiens", seul Antoine n'a eu besoin que d'un entretien pour se lancer dans son projet, et on peut même supposer qu'il se serait lancé sans passer par la MIFE, cependant en mettant plus de temps ainsi qu'il l'a précisé. Parmi les douze qui ont bénéficié de deux entretiens accompagnés d'outils d'orientation, cinq se sont lancés (Margaux, Gérard, Léa, Fanny, Estelle), pour cinq autres le projet est en cours d'élaboration (Nathalie, Marc, Géraldine, Mathilde, Mathieu), et Sonia a différé la mise en œuvre de son projet, tandis que Judith a pris un nouveau départ personnel. Ceux-ci auraient besoin, pour achever le processus, de poursuivre leur réflexion par des entretiens et des outils d'orientation complémentaires, et on peut émettre l'hypothèse qu’un temps d'exploration supplémentaire leur serait opportun, avec, notamment, l'utilisation d'un outil comme l'autobiographie raisonnée, susceptible de faire aboutir le processus par sa dimension de signification plus importante.

Les cinq qui ont eu trois entretiens (Claire, Cathy, Paul, Liliane, Alain), ont élaboré un projet. Cela pourrait donner le sentiment que cette durée semblerait appropriée, mais le faible nombre d'entretiens-interviews — vingt-cinq sur un millier de prestations —, ne nous permet pas de généraliser ce résultat, sans doute dû au hasard. Parmi les deux qui ont bénéficié de quatre entretiens, Pauline a élaboré son projet et Daniel l'a différé. Enfin, parmi les cinq personnes qui en ont eu plus de cinq, pour Jacques, Brigitte, Sarah et Mélanie l'objectif est atteint, alors que Jeanne a fait le choix d'un emploi immédiat en abandonnant son projet initial.

On ne peut donc pas affirmer que la quantité d'entretiens, influant sur la durée de la prestation d’orientation, soit un critère pertinent de réussite du processus d'élaboration de projet. En revanche, il est important qu’elle soit adaptée aux besoins des personnes.

Nombre d'outils utilisés et élaboration de projet

Comme le tableau 4 "les outils d'orientation" l'indique, l’utilisation de ceux-ci est variable selon les personnes consultantes. Sarah, qui a bénéficié de l’ensemble des modules sur une période de trois années, est passée par différentes phases qui n'ont pas abouti. Léa et Mélanie, avec l’aide de trois outils, ont pu élaborer leur projet. Si, pour Léa comme pour Sarah, l'autobiographie raisonnée a été déterminante, pour Mélanie, les outils qui ont été proposés lors d'étapes différentes, ne semblent pas avoir laissé de traces dans sa mémoire  : elle n'a pas mentionné l'appui à la recherche d'emploi, ne s'est pas rappelée avoir passé Choix et elle ne semble pas avoir pris au sérieux le CGP. Sur les dix personnes ayant utilisé deux outils, sept ont élaboré leur projet (Claire, Cathy, Jacques, Pauline, Liliane, Estelle et Paul), alors que, pour trois (Jeanne, Daniel, Alain), cela n'a pas été possible. Enfin, sur les onze qui ont bénéficié d'un seul outil, six ont élaboré un projet (Gérard, Judith, Fanny, Margaux, Brigitte, Mathilde), alors que pour cinq, cela n'a pas été le cas (Nathalie, Marc, Géraldine, Mathieu, Sonia).

Au vu de ces résultats, nous ne pouvons pas non plus affirmer que la quantité d'outils utilisés influe sur l'élaboration de projet, puisqu'un nombre significatif de personnes ont pu le construire en bénéficiant d'un seul, voire de deux outils. En clair, ce n'est pas parce que la prestation est longue et fournie en outils, que les chances de réussite du processus d'élaboration sont plus grandes. Ce constat vient ainsi démentir le dispositif de bilan mis en place par les pouvoirs publics qui, bien que ne représentant qu'une phase du processus d'orientation, est réglementé selon une durée établie entre 18 et 20 heures. Certes, cette prestation répond à des besoins d'investigation personnelle approfondie, mais ne semble pas constituer une réponse pertinente à l’ensemble des besoins d’accompagnement. Même si on pouvait objecter que les publics des deux prestations sont différents, le législateur n'avait sans doute pas prévu, à l’époque, la possibilité d'accompagner des adultes dont les besoins d'exploration personnelle étaient moins intenses mais réels. Si la durée de la prestation n'est pas un facteur favorisant l'élaboration de projet, par conséquent, ce processus trouve ses étayages ailleurs.