2. Le domaine étudié

2.1. Présentation

Le domaine géographique de cette étude (voir carte A) englobe essentiellement le nord du département de l'Ardèche et l'extrémité sud-est du département de la Loire. Il est bordé à l'Est par le Rhône (fleuve).

Au sud-ouest, le domaine déborde légèrement sur le département de la Haute-Loire : Riotord (n° 33 sur les fonds de carte de la région du Pilat) est un point d'enquête de ALF (n° 817). L'enquête de E. Edmont remonte aux années 1900. Plus tard, dans les années 1940, P. Nauton a refait des relevés à Riotord, dans le cadre de ses enquêtes pour sa Géographie phonétique de la Haute-Loire. L'extrémité sud-est du domaine étudié est le village d'Albon (n° 36), dans le département de la Drôme (point 2 de l'étude de J.-Cl. Bouvier, Les parlers provençaux de la Drôme). Au nord-est, le domaine remonte jusqu'à Clonas (n° 5), dans le département de l'Isère (ALF n° 829, ALLy n° 85). Enfin, Saint-Etienne (n° 1) forme l'extrémité nord-ouest du domaine. Le francoprovençal n'y est plus parlé aujourd'hui, mais il existe de nombreux travaux portant sur le parler de cette ville.

Cette région, d’environ 15 km (axe Nord / Sud) par 30 (axe Est / Ouest) ne correspond donc à aucune réalité administrative. En effet, le domaine étudié a été défini en fonction de l'intérêt linguistique : la région du Pilat est traversée par la limite entre le nord-occitan et le francoprovençal (voir carte B). Cette limite a été tracée d’après le traitement du A latin précédé d'une consonne palatale, trait phonétique qui distingue le francoprovençal de l'occitan : "[on doit] appeler francoprovençal tout parler dans lequel on décèle la moindre tendance à la palatalisation de A derrière consonne palatale ; sont provençaux les parlers qui ne présentent aucun cas de palatalisation de A" (Tuaillon 1964, p. 131) ; tandis qu'en occitan, le A latin précédé de consonne palatale ne connaît pas de traitement particulier (tous les A toniques se maintiennent, les A atones se maintiennent ou se vélarisent en o), en francoprovençal, les A ne se maintiennent ou ne se vélarisent que s'il ne sont pas précédés de consonne palatale : dans ce dernier conditionnement, le A se palatalise pour aboutir à divers résultats (A tonique > i, , é..., A atone > i, e ou s'amuït).

Le tracé de la limite entre l'occitan et le francoprovençal dans le Pilat ne s'explique par aucune justification géographique ou historique. Comme l'a montré J.-B. Martin, la frontière semble plus ou moins suivre quelques voies de communication secondaires et récentes, s'orienter en fonction de la géographie locale, mais rien n'explique que la limite longe telle ou telle route, emprunte telle ou telle vallée, un peu plus au Nord ou plus au Sud (Martin 1979a, p. 87-88).