4.1.1. L'âge

C’est une variable essentielle pour caractériser les locuteurs patoisants. Les personnes les plus âgées sont évidemment les plus nombreuses à connaître le patois, et celles qui le connaissent le mieux. Au fur et à mesure que l'âge décroît, les compétences s'amenuisent. Cette tendance, globalement évidente et manifeste, souffre pourtant de quelques exceptions : dans un village où l'âge moyen des bons locuteurs est de 70 ans par exemple, on peut, bien sûr, découvrir quelques bons patoisants de 55 ans. Comme, d'autre part, il existe aussi toujours un petit nombre de personnes très âgées dont les compétences en patois sont très faibles, voir nulles, l'âge ne peut pas, à lui seul, permettre de prédire qui est patoisant et quel est son niveau de compétence. Toutefois, dans le cadre familial (envisagé dans un sens étroit et vertical : grands-parents, parents, enfants), l'âge est un indice relativement sûr : les grands-parents connaissent en général mieux le patois que les parents, qui eux-mêmes possèdent plus de compétences que leurs enfants. Mais, sur l'axe horizontal des liens de parenté, l'âge est un critère moins fiable : une personne peut être bien meilleure patoisante que son frère ou sa soeur pourtant plus âgé(e). A la génération suivante, les écarts s’accroissent parfois encore, si bien qu'une personne de la troisième génération peut posséder plus de compétences qu'un de ces oncles ou tantes.

L'âge des habitants de la région du Pilat semble être un critère important pour prédire qui peut posséder des compétences plus ou moins étendues en patois, mais il s'agit toutefois d'une valeur relative : si l'on considère l'ensemble de la région du Pilat, il n'est pas possible d'établir une relation précise entre une catégorie de locuteurs définie par un niveau de compétence et un âge moyen. Sur le haut plateau du Pilat, il existe des locuteurs de 65 ans possédant une compétence en patois pratiquement complète, alors que dans certains villages de la vallée du Rhône, les rares locuteurs correspondant à ce profil ont plus de 85 ans. On retrouve le même décalage à l'autre extrémité de l'échelle des compétences : il existe, dans la partie la plus élevée de la région du Pilat, quelques personnes possédant des notions de patois plus ou moins importantes dans la génération des 30/40ans : dans la vallée du Rhône, les personnes de cet âge sont toutes des monolingues en français. Cette différence d'âge moyen des différents types de locuteurs montre que la dimension géographique, déjà évoquée en introduction à propos de la vitalité du patois, devra être prise en compte.