10.3.2. Les critères d’appréciation

Les francophones ou les sous-locuteurs ayant des locuteurs parmi leurs proches proposent des chiffres qui s'approchent souvent de ceux des semi-locuteurs : de leur connaissance des caractéristiques sociales des locuteurs qu'ils côtoient, ils tirent des conclusions sur l'ensemble de leur localité. Mais, à des degrés divers, tous les types de locuteurs, à l'exception de certains locuteurs âgés qui pensent connaître pratiquement toutes les personnes capables, selon eux, de parler patois, adoptent cette démarche empirique pour évaluer le nombre de personnes de leur village connaissant le patois. Il est intéressant de relever les paramètres pris en compte par les témoins quand ils tentaient de dresser une liste de patoisants.

Qui, selon les témoins, est susceptible de connaître le patois ?

L’éventuelle connaissance personnelle d'un individu dont ils cherchaient à connaître le statut par rapport au patois était évidemment le premier critère qu’ils envisageaient.

Ensuite, au cours des discussions qui accompagnaient les tentatives d'évaluations, c’est l’âge qui était considéré comme le paramètre essentiel.

L’origine géographique était également examinée : être originaire du village même ou d’une localité voisine leur semblait un indice essentiel. Si un témoin savait que quelqu’un était issu d’une région où la vitalité du patois est réputée importante, il pouvait également supposer que cette personne connaissait le patois. Par contre, si les témoins ignoraient l’origine géographique de quelqu’un ou s'ils savaient que cette personne était issue d’une ville (Annonay, Saint-Etienne...), ils la considéraient comme non patoisante.

Les témoins prenaient également en compte le sexe de la personne à propos de laquelle ils s’interrogeaient : les femmes, d'après tous les locuteurs, savent en général moins souvent parler patois que les hommes. Pour une partie des témoins, elles seraient également moins nombreuses à appartenir à la catégorie des gens qui le comprennent uniquement, alors que pour d'autres, sans qu'il ait été possible de découvrir la raison de ces opinions divergentes, on compterait, dans la catégorie des locuteurs passifs, autant de femmes que d'hommes.

La profession jouait un rôle dans l’opinion des témoins : les personnes travaillant ou ayant travaillé dans le secteur agricole sont censées connaître le patois plus que les autres.

Le lieu de résidence à l’intérieur de la commune a parfois été évoqué : les personnes habitant une ferme ou un hameau isolé seraient plus nombreuses à savoir le patois que celles demeurant dans un bourg.