1.2.1.3. Cas de N final derrière I (carte 22)

Les formes ve "vin" ou véze "voisin" que l'on trouve dans d'anciens textes stéphanois (Veÿ 1911, p. 33 ; cf. aussi Vacher, p. 38) attestent que le dialecte de Saint-Etienne (n° 1), comme les parlers du Dauphiné septentrional (voir dans l'ATF les cartes 197 "jardin" ou 391 "voisin" par exemple) et ceux du nord de la Drôme (cf. Bouvier 1976, p. 367-369 et carte 56) connaissent la nasalisation de I suivi de N

Le tableau ci-dessous reprend quelques formes des villages situés de part et d'autre de la limite qui partage en deux aires la région du Pilat :

matutinu *vecinu vinu pinu *gard-inu
"matin" "voisin" "vin" "pin" "jardin"
la Valla 3 - - - pi jardzi
Planfoy 6 madyi véji vi pi jardyi
Tarentaise 10 madzoe vézi vi pi jardzoe
le Bessat 11 madzoe vézi vi pi jardzi
Thélis 14 madyi vézi vi pi dzardyi
Saint-Julien 15 madze véze ve pe jarde
Saint-Marcel 26 mati vézi vi pi dzardi
Brossainc 16 madze véze ve pe jarde
Vinzieux 17 madzi véze vi vi jardi
Félines 21 mate véze ve / vi pe jarde
Savas 27 mati vézi vi pi dzardi
Peaugres 28 mati vézi vi pi jardi
Serrières 22 mate véze ve pe jarde
Champagne 32 mate / mati vézi ve pe jarde
Andance 35 matyi vézi vi pi dzè a rdi

Le polymorphisme étant rare pour ce traitement, la limite de la nasalisation de I est très nette et elle est semblable à celle de O suivi de N : elle correspond à la limite de palatalisation de A, avec la même exception, le village de Saint-Julien (n° 15) qui ne palatalise pas le A précédé de palatale, mais nasalise A, O et I suivis de N (comparer la carte 22 avec celle qui figure sur le transparent).

Contrairement au Lyonnais (voir par exemple la carte "pin" 438 de l'ALLy), la région du Pilat conserve encore la nasale primitive i que beaucoup de parlers francoprovençaux ont perdue. Les parlers du nord Dauphiné, par exemple, ne présentent que la nasale e (voir ATF, cartes 197 "jardin", 391 "voisin"...). Les parlers francoprovençaux de la région du Pilat, situés en bordure du domaine francoprovençal, sont longtemps restés à l'écart de l'évolution vers i de e . Mais la nasale e gagne du terrain dans les parlers de la vallée du Rhône mais aussi dans ceux du plateau intermédiaire (cf. tableau ci-dessus), sous l'influence du français ou celle des parlers dauphinois.