1.2.5.4. Traitement de l final de syllabe devant consonne labiale (carte 40)

Ce traitement sépare le francoprovençal à la fois des parlers d'oïl et de l'occitan : devant consonne labiale, l devient r en francoprovençal, au lieu de se vocaliser comme dans le reste du domaine gallo-roman.

Le dialecte stéphanois connaît ce traitement (cf. Veÿ 1911, p. 123) comme les parlers dauphinois (cf. Devaux 1892, p. 338).

Comme dans le Forez et en Dauphiné, cette caractéristique est en voie de régression dans la région du Pilat (cf. Gardette 1941a, p. 129 et Devaux 1892, p. 338). Par contre, contrairement aux régions voisines, la partie occitane du domaine semble apparemment connaître quelques cas où l > r.

BALMA
"talus, rive"
Pélussin 4 b a rma
Clonas 5 b a o rma
Roisey 7 b a rma
Véranne 12 b a rma
*SALMURIA
"saumure"
Sainte-Croix 2 sarmwér
Clonas 5 sarmwér
Roisey 7 sarmwér
la Valla 3 sarmw à éra
Tarentaise 10 sarmw é ri

"almanach" : il se trouve dans de nombreux villages sous la forme arman a : il est attesté à Saint-Pierre (n° 8), le Bessat (n° 11), Thélis (n° 14), la Versanne (n° 20), Saint-Marcel (n° 26), Peaugres (n° 28), Davézieux (n° 31), Riotord (n° 33) et Andance (n° 35). Mais plutôt que de conclure un peu vite que le traitement francoprovençal l devant labiale > r a pénétré dans le domaine occitan, il faut tenir compte du fait que certains almanachs étaient édités sous le titre Armagna, à Saint-Etienne par exemple (quelques témoins m'en ont parfois montré des exemplaires). La diffusion de ces publications explique certainement les formes arman a dans la partie occitane de la région du Pilat : il s'agirait donc plus d'un emprunt lexical que de l'indice du traitement phonétique local.

Si l'on exclut ce dernier exemple, on voit que toutes les formes qui présentent un r proviennent de localités francoprovençales (voir carte 40). Ce traitement peut donc être considéré comme une caractéristique de la partie francoprovençale de la région du Pilat.

E. Veÿ cite également la forme stéphanoise rek o rta "récolte", forme que l'on retrouve également à Marlhes (n° 23) et à la Versanne (rek o rto). Mais il s'agit en fait d'une tendance francoprovençale et occitane de lt à devenir rt (cf. ALLy 5, p. 347 et Bouvier 1976, p. 241).