1. Les difficultés de l'évaluation chiffrée

P. Sassier 215 note que c'est à partir de 1974 que l'on commence à considérer les pauvres non plus comme les simples objets de compassion qu'ils étaient en hiver 54 mais comme une partie de la population dont on tente avec inquiétude d'évaluer le nombre. Néanmoins, compter nécessite, au préalable, de circonscrire son objet. E. Mossé 216 définira la pauvreté par l'insuffisance de ressources, bien sûr, mais aussi par la précarité du statut social et l'exclusion d'un certain mode de vie matériel et culturel. Elle utilisera la notion de pauvreté relative calculée par rapport au revenu moyen et celle de seuil de pauvreté. L'idée du seuil renvoie à la comparaison d'où émerge le manque. Ainsi, c'est l'analyse des besoins individuels dans une société donnée qui est en jeu et la difficulté consistera justement dans la mesure de ces besoins. La quantification se fera grâce aux chiffres fournis par les associations mais aussi par les centres d'hébergement. Elle s'appuiera, en outre, sur des études statistiques concernant les ménages et recouvrant plusieurs domaines de la vie courante (confort de l'habitat, équipement, accès à la culture, type de loisirs…) Certains chercheurs, tel S. Milano prendront publiquement parti contre ces études en dénonçant "les interrogations métaphysiques sur le comportement des pauvres" ainsi que "les ratiocinations sur la pauvreté relative" 217 , l'urgence résidant selon lui dans l'établissement d'un "revenu social d'insertion". Néanmoins, S. Milano définissant les pauvres comme des personnes disposant d'un revenu inférieur à 50% du revenu moyen, certains chercheurs, comme E. Mossé, ne se priveront pas de souligner les contradictions de l'auteur qui adopte, in fine, un calcul en terme de pauvreté relative.

Notes
215.

P. Sassier, op. cit.

216.

E. Mossé, Les riches et les pauvres, Seuil éd., 1985.

217.

S. Milano, La pauvreté absolue, Hachette éd., 1988.