2. L'éclatement de la catégorie

Des recherches effectuées sur les populations bénéficiant du R.M.I. ont établi la catégorie de "l'incasable" regroupant trois types de situations 250 . La première concerne une population en attente d'allocations spécifiques ou de pensions. La deuxième regroupe des personnes qui vivent dans une situation installée de précarité plus ou moins organisée alternant les contrats d'intérim et le travail non déclaré. La troisième population se compose d'individus isolés ayant connu de nombreuses ruptures: déracinement géographique, perte d'emploi, réseau relationnel plus que fragile. Figurent ici les femmes isolées, les sans domicile fixe, les alcooliques et les dépressifs.

Ce classement, on le voit, s'appuie sur une lecture normative de l'espace social: les femmes isolées sont différenciées des mères célibataires ou des familles monoparentales qui bénéficient, elles, d'un statut plus clair et qui sont orientées vers d'autres systèmes de prise en charge (l'Aide sociale à l'enfance). La femme sans enfant pose le problème de son inscription sociale et c'est son comportement déviant qui est ici, en creux, stigmatisé. Les sans domicile fixe, quant à eux, sont posés en sous-type homogène fédéré par l'absence de logement. Le champ de la pathologie sociale ou mentale est clairement juxtaposé aux deux précédentes figures. Cette population de la catégorie des incasables est décrite comme "mal vue" 251 par les acteurs de l'insertion et c'est la dimension complexe et brouillée de leur parcours individuel qui en est à l'origine.

Ces parcours personnels vont nourrir la réflexion des chercheurs et des experts mais aussi des professionnels de terrain. Deux démarches vont se distinguer, d'une part l'établissement de typologies, d'autre part la recherche d'éléments permettant de rendre compte des processus de désaffiliation et les formes d'adaptation mises en oeuvre par les personnes sans domicile.

Notes
250.

I. Astier, Revenu minimum et souci d'insertion, Desclée de Brouwer éd., 1997.

251.

Idem