Chapitre 7
Protestantisme et catholicisme

La Réforme appartient à ces forces qui vont bouleverser l’équilibre écolinguistique de l’Europe et jouer un rôle décisif dans l’essor des scriptae stato-nationales. En effet, la Réforme, dont les fondements visent à favoriser le rapport direct entre les chrétiens et Dieu, est une doctrine qui ne peut qu’entretenir des rapports étroits avec le domaine de la langue. D’une part, la programmatique réformiste passe par la traduction des textes sacrés afin d’assurer la plus grande diffusion de ceux-ci et d’éviter ainsi la médiation de la cléricature. La traduction est un facteur non négligeable d’apport lexical, comme nous l’avons signalé à plusieurs reprises (cf. supra, 1ère partie, chapitre 5). D’autre part, cette entreprise ne peut être menée que par l’alphabétisation des masses. Enfin, afin de toucher le public le plus vaste possible, elle doit s’appuyer sur les standards existants, et en ceci, elle favorise l’implantation des langues communes. Mais la Réforme n’est pas seulement un facteur d’affirmation des langues scripturaires, elle constitue également une force de dislocation de la puissance romaine, qu’elle soit cléricale ou linguistique : elle créera donc une réaction de rejet aux termes latins ou provenant des langues qui lui sont associées.

Sur un plan plus théorique, la doctrine réformiste introduit une nouvelle conception de la vie où l’activité est un signe d’élection divine. Cette nouvelle ascèse ne manquera pas de modifier profondément la grammaire et l’enseignement.