10. 2. 1. 3. La communication

Le corrolaire du lien direct établi entre les mots et les choses est une communication facilitée entre les peuples. S’il est un domaine dans lequel la transmission exacte des concepts est d’une importance cruciale, c’est bien la science. La pensée de Bacon, puis le développement de la recherche collective dans la droite ligne de la pensée de celui-ci, ont démontré à quel point la diffusion des idées est indispensable aux progrès de la science (cf. supra 2e partie, 8. 1.). Ainsi Garat estime :

‘si jamais, comme nous en avons formé déjà le voeu, l’Europe est établie en république, il ne faut pas douter que ces républiques ne forment un jour un congrès de philosophes chargés de l’institution de cette langue354, qui serait de toutes les nations la source de tant de lumières et de tant de vertus, de tant de richesses, de tant de prospérités nouvelles (Garat, Séances des Écoles normales recueillies par des sténographes, Préambule, T. II, 1795 : 37 ; cité par Gusdorf, 1978 : 413). ’

Les aménagements des domaines scientifiques par différentes tentatives de taxinomies botaniques et de nomenclatures chimiques, et le succès européen de la Nomenclature chimique de 1787 – après quelques aménagements toutefois (cf. infra, 13. 1. 2.) –, laissent espérer un projet de plus vaste ampleur. En effet, l’utilisation majoritaire de formants classiques en font des langues véhiculaires efficaces :

‘La nouvelle nomenclature autorise une autre prouesse : grâce à elle, les hommes peuvent commercer. Il ne faut pas seulement une circulation des « graines et semences », par les voyages, il faut également et non moins un échange entre les botanistes, les Académies et les expérimentateurs (Dagognet, 1970 : 20)355.’

Ainsi, le latin en voie d’amuïssement laisse apparaître un manque qu’il ne tardera pas à combler en fournissant les éléments de leur nomenclature aux quelques systèmes sémiotiques scientifiques qui connaissent un succès supranational.

Notes
354.

La langue universelle des sciences.

355.

L’aspect commercial de la botanique est un des points que nous n’avons pas abordés, mais qui est loin d’être négligeable, comme le démontre François Dagognet (1970 : 20-21). De la même manière, la production de produits manufacturés lie les recherches en chimie à des enjeux économiques (cf. François Dagognet (1969 : 168)).