Voies de communication et intercommunalité

Depuis la fin du XIXe siècle, les économistes et les géographes ne cessent de rappeler l’importance des voies de transport pour la compréhension de la trame et des relations urbaines. Elles sont chez Christaller l’un des facteurs susceptibles d’influer sur la distribution des lieux centraux et les interdépendances urbaines, en assurant la centralité d’un lieu au-delà de ses limites théoriques. Stratégiques dans la centralité, les voies de communication constituent un facteur qu’on ne peut davantage négliger dans les relations intercommunales. Présentes, elles facilitent les contacts urbains et satisfont des liaisons régulières 158 . Absentes, elles représentent une contrainte forte qui limite les échanges entre villes. Les conditions de transport ne créent cependant ni l’interdépendance, ni l’intercommunalité. Il faut, dans le premier cas, que les habitants d’un lieu éprouvent la nécessité de vendre ou acheter des produits sur un autre marché ou de recourir aux services d’une ville plus que d’une autre. Il faut, dans le second cas, que des communes fassent le premier pas et décident de se rapprocher, de s’entraider et de débattre. Les routes et les voies fluviales ne forment qu’un facteur parmi d’autres dans l’apparition de liens intercommunaux. Les communes médiévales relevaient fréquemment la déficience des voies de communication. A les croire, les difficultés de transport rencontrées, les messagers incertains, les voleurs de grands chemins, les routes mal entretenues où les transporteurs s’enlisaient l’hiver contribuaient à ce qu’elles fussent moins liées entre elles qu’elles n’auraient voulu l’être.

Il faudra plus tard constater, au vu des villes en correspondance, dans quelle mesure les cercles de l’intercommunalité observés en Franconie étaient tributaires des voies de transport. Pour l’heure, le relevé des grands axes et des localités bien reliées fournit un tableau des conditions favorables à l’intercommunalité. À cette nuance près, que pour la période médiévale, considérer les seuls tracés ne suffit pas. Des obstacles et des contraintes supplémentaires s’imposaient aux voyageurs et aux échanges par le biais des itinéraires obligatoires 159 (Strassenzwang), du statut conféré aux routes, des droits d’escorte ou de sauf-conduit nécessaires ou imposés, susceptibles d’infléchir les trajectoires.

Si les voies de communication avaient un impact indéniable sur les relations interurbaines, il serait inversement tout à fait illusoire et candide de tenir les routes pour intangibles ou originelles. La hiérarchie des voies de communication, voire leur existence, payait son tribut aux villes. C’est parce qu’elles reliaient plusieurs centres commerciaux dynamiques que des routes, comme la voie Francfort-Nuremberg-Ratisbonne, acquirent un rang de première importance. Il fallait l’intérêt vital de quelques villes envers certaines routes pour qu’elles devinssent indispensables. Ce furent les privilèges douaniers acquis par les cités les plus actives, le fort souhait de certaines d’entrer facilement en relation, les ententes passées entre les conseils municipaux et entérinées par le roi, qui créèrent des itinéraires préférentiels pour plusieurs siècles. En ce sens, l’intercommunalité se répercutait sur les infrastructures de transport, comme ces dernières jouaient sur l’intercommunalité.

Un relevé des axes de circulations, des douanes (Zoll) et des sauf-conduits (Geleit) 160 à l’échelle de la Franconie serait une étude en soi, requise par la confidentialité des travaux existants 161 et la variété des sources à consulter. Il demande une analyse minutieuse des comptes seigneuriaux, un relevé de chaque pont, de chaque point de péage, de chaque tarif. Puisque là n’est pas mon propos, je me suis bornée à cartographier les voies dans leur ensemble, laissant de côté les chemins locaux les moins usités 162 .

Les premières voies de communication attestées par l’histoire encadraient la Franconie. Augsbourg, ancienne capitale romaine, acquit très tôt des relations avec l’Italie par le biais de la voie romaine qui la traversait. Ratisbonne, située sur une voie de passage des peuples germaniques, le long des vallées de la Regen et de la Chamb, offrait par le Danube un débouché sur Vienne. L’archevêché et la ville épiscopale de Passau, fondés par Boniface au VIIIe siècle, virent le jour au point de confluence entre la partie navigable de l’Inn et le Danube. Würzbourg s’épanouit à la même période sur l’axe fluvial important fourni par le Main.

Née plus tard, après 1050, Nuremberg s’inscrivait quant à elle dans deux voies de circulation naturelles, d’une envergure bien moindre, desservies par des rivières difficilement navigables à cet endroit, la vallée de la Regnitz et la basse vallée de la Pegnitz. Le trafic passait par un gué à Fürth plutôt qu’à Nuremberg jusqu’à ce que Henri III ne dépouilla la première de son droit de marché, de son péage et de son droit de monnayage au profit de Nuremberg.

Du XIIe au XVIe siècle, la Franconie connut un extraordinaire essor routier et une multiplication des axes dont Nuremberg profita en large part. La carte de la fin du Moyen Âge ne permet plus d’ignorer la fonction de nœud routier majeur prise en quelques siècles par la cité franconienne. Elle sut capter le trafic de transit et développer son rôle de carrefour par le biais de ses marchands 163 . Autour de la ville, approximativement au centre de la Franconie, s’organisait au XVe siècle un réseau en étoile où passaient au moins deux axes de circulation majeurs pour l’Allemagne méridionale. Par Nuremberg, ils couraient des Flandres à Vienne, via Francfort, et d’Italie au Nord de l’empire, vers Erfurt, Leipzig, ou Dresde. Nuremberg était devenue une plaque tournante du commerce entre la Rhénanie centrale et le Danube et une porte d’accès entre la forêt de Bohême et celle de Thuringe. Son rôle dans le réseau routier de l’époque a été plusieurs fois souligné par les contemporains. Les humanistes traduisirent cette situation routière dans leurs éloges par la notion de centre. Hartmann Schedel affirmait à la fin du XVe siècle que Nuremberg « est presque située au milieu de l’Allemagne », Cochlaeus renchérissait dans le premier quart du XVIe siècle :

« De par sa situation, dis-je, elle ne constitue pas seulement le milieu de l’Allemagne, mais encore de toute l’Europe » 164 . ’

Le géographe et cartographe Erhard Etzlaub 165 illustra à son tour par plusieurs cartes la position centrale de Nuremberg dans le réseau routier et urbain de l’époque. Il réalisa en 1492 une gravure qui situait Nuremberg au centre d’un cercle semé de 100 localités dans un rayon de seize Meilen 166 autour de la cité, de Cobourg à Ingolstadt, de la Forêt Bohême à Mergentheim. Une carte des routes « à travers l’empire romain » datée de 1501 joue sur la même impression en plaçant Nuremberg au centre de la représentation. On y retrouve les routes principales qui traversaient la Franconie et se croisaient à Nuremberg.

Dans cette région, la route majeure du Bas Moyen Âge courait, selon un axe Nord-Ouest/Sud-Est entre Anvers, Francfort, Aschaffenbourg, Marktheidenfeld où elle franchissait le Main avant de le retraverser à Würzbourg et à Kitzingen. Puis, elle gagnait Nuremberg, Altdorf, Neumarkt, Ratisbonne, Passau et Vienne. Il est difficile de savoir si cette route des foires de Francfort préexista à Nuremberg. Aucun document n’atteste une existence précoce et elle semble s’être développée plus tard, aux XIIe-XIIIe siècles, afin de relier au plus court d’importantes villes commerciales. Des lettres de sauf-conduit de l’évêque de Würzbourg ou du burgrave de Nuremberg au XIVe siècle révèlent l’intense trafic sur cette voie. Plusieurs récits de voyageurs empruntent le même chemin. La portion de route entre Nuremberg et Francfort était soumise au début du XVe siècle au droit de sauf-conduit de 7 seigneurs territoriaux, les margraves de Brandenbourg, les sires de Weinsberg, les seigneurs de Limpurg, les comtes de Castell et ceux de Wertheim, l’évêque de Würzbourg et l’archevêque de Mayence. Au fil des droits à payer, les voyageurs se voyaient contraints de marquer 6 étapes sur ce parcours de 30 Meilen, Nuremberg-Neustadt (5 Meilen), Neustadt-Würzbourg (7½), Würzbourg-Tauberbischofsheim (3½), Tauberbischofsheim-Miltenberg (4), Miltenberg-Aschaffenbourg (5), Aschaffenbourg-Francfort (5).

Une route concurrente offrait une autre possibilité de transit à partir de Francfort, sans passer par Nuremberg, en reliant Miltenberg, Tauberbischofsheim, la vallée de la Tauber, Mergentheim, Rothenbourg, Dinkelsbühl, Nördlingen, Donauwörth, avant d’opter pour Augsbourg ou de suivre le Danube jusqu’à Ratisbonne. Elle semble avoir porté souvent les pas de pélerins, mais resta moins fréquentée par les marchands que la route passant par Nuremberg 167 .

L’une des seules routes « naturelles » transitant par Nuremberg fournissait le second axe majeur pour le trafic régional et international, d’orientation Nord-Sud. Elle suivait la vallée de la Regnitz en direction du Sud, puis empruntait la vallée de la Rezat, franchissait l’Altmühl et passait vers Wissembourg une petite ligne de partage des eaux dans l’Alpe. Traversant le Danube, elle suivait ensuite la vallée de la Lech. Un lien était ainsi tendu entre Nuremberg, Schwabach, Roth, Wissembourg, Monheim, Donauwörth, Augsbourg, Landsberg et Schongau. Au-delà, l’itinéraire atteignait Füssen, le Brenner et la Haute-Italie. Cette route essentielle pour le commerce et le transit vers l’Italie était déjà largement utilisée au début XVe siècle. Elle assura par exemple les relations entre Nuremberg et Venise, où Ratisbonne et Nuremberg se partageaient la préséance à la Fondaco dei Tedeschi, centre du commerce allemand en Vénétie 168 .

Nuremberg assurait aussi, pour toute la Haute-Franconie et le Haut-Palatinat, un débouché vers l’Ouest et le Sud-Ouest.

Une route gagnait le Sud-Ouest par Schwabach, Gunzenhausen, Nördlingen, Ulm et Biberach 169 . De là, un bras principal courait vers Ravensbourg, Constance et Zürich. Une fois en Suisse, des débouchés existaient vers Genève et Lyon.

En direction de l’Ouest, de la Haute-Rhénanie, puis des Flandres, où Nuremberg avait de nombreux privilèges commerciaux (surtout à Gand et Bruges) 170 , trois voies de circulation se présentaient. La plus méridionale passait par Schwabach, Feuchtwangen, Dinkelsbühl, Ellwangen, Schwäbisch Gmünd, Pforzheim jusqu’à Strasbourg 171 . Une voie médiane reliait Schwabach, Ansbach, Feuchtwangen, Crailsheim, Hall, Heilbronn, Pforzheim, Haguenau ou Strasbourg. Une troisième, au Nord, passait par Windsheim, Uffenheim, Mergentheim, Neckargemünd, Heidelberg, Spire ou Worms et de là, Gand, Bruges ou Ypres.

Au sein du réseau routier, Nuremberg sut devenir une porte d’accès vers le Nord pour tout le Sud-Est de l’Allemagne. Par Nuremberg, Forchheim, Bamberg et Cobourg, les marchands et voyageurs rejoignaient Erfurt, haut lieu de production de guède, de même que Leipzig et ses foires.

Une route septentrionale de seconde importance quittait Nuremberg plus à l’Est. Motivée par la nécessité de liaisons vers l’Allemagne centrale et les foires de Bresslau et Dresde, elle tirait d’abord au plus court par Gräfenberg, Pottenstein et Bayreuth, puis utilisait un passage entre la forêt franconienne et la Fichtel, via Münchberg, Hof, Plauen et Chemnitz.

C’est également par Nuremberg que passait le transit d’Allemagne du Sud vers l’Est et la Bohême. La ville participa largement à ce mouvement par le biais de ses propres marchands qui détenaient des libertés commerciales en Pologne dès le XVe siècle 172 , sillonnaient les routes de Silésie et se rendaient régulièrement aux foires de Pilsen ou de Prague. Les routes les plus empruntées et importantes vers l’Est accédaient à Prague. La « Prager Strasse », présente sur la carte d’Etzlaub en 1501, reliait Nuremberg, Sulzbach, Hirschau, Weiden, Neustadt, Bärnau, Tachau, Pilsen et Prague.

Au nord de cette voie, un autre itinéraire, moins emprunté, était possible par Auerbach, Neustadt/Kulm, Kemnath, Marktredwitz et Eger.

Au Sud s’ouvrait une troisième possibilité de parcours vers la capitale bohême. La « Nürnberger Hochstrass » ou « Churpfälzische Landstrass » gagnait Altdorf, Schwandorf, Cham, Fürth in Wald, puis traversait la Bohême. Attestée en 1319, elle ne semblait pas faire à cette époque un crochet par Amberg.

Au travers de sa carte routière, la Franconie s’affirmait à la fin du Moyen Âge comme une terre de passage et de circulation desservant les quatre points cardinaux. Des villes-carrefours commandaient la distribution de ce réseau en étoile. Rôle dévolu au premier titre à Nuremberg, mais aussi à Würzbourg, Bamberg, Cobourg, Schwabach, Feuchtwangen, Schweinfurt… Il n’existait pas de véritables isolats dans l’espace régional ; même l’Est de la Franconie, moins bien desservi par les routes secondaires, était parcouru par de grands axes passants.

Pour entretenir des relations avec d’autres communes de la région ou de l’empire, Nuremberg disposait d’une place stratégique, qu’elle renforça grâce à des privilèges douaniers impériaux et au dynamisme de ses marchands. Les lois de l’éloignement et des facilités de circulation lui assuraient des liaisons aisées avec les autres villes d’empire franconiennes, mais favorisaient par ordre décroissant Wissembourg, Bad Windsheim, Rothenbourg et Schweinfurt. Les liens directs entre ces quatre cités rencontraient par contre plus d’obstacles. Wissembourg et Schweinfurt, tout en étant sur d’importantes voies de passage, pouvaient souffrir à cet égard de leurs positions excentrées.

Les voies principales que les villes franconiennes impériales et seigneuriales surent capter à leur profit leur offraient des occasions de contacts fréquents. Ainsi, en allait-il de Schweinfurt avec Würzbourg et Hassfurt, ou de Nuremberg avec Forchheim, Neustadt ou Gunzenhausen. Tous les ans, dans les missives de Nuremberg, figuraient des lettres pour le prévôt (Vogt) de Gunzenhausen destinées à préparer le passage des négociants locaux vers les foires de Nördlingen. L’aller et le retour aux foires de Francfort amenaient à leur tour des contacts épistolaires répétés avec des officiers d’Aschaffenbourg. Les routes engendraient ainsi des contacts forcés, parfois des litiges et des tensions avec les officiers ou les conseils seigneuriaux. Car les liens matériels pouvaient être défaits, contournés ou ignorés au gré des conditions politiques 173 . A la fin du XVe siècle, le margrave de Brandenbourg prélevait des douanes en 37 lieux dont Neustadt, Roth, Baiersdorf, Kulmbach, Erlangen, Hof, Fürth, Gunzenhausen, Ansbach ou Schwabach. À cela s’ajoutaient les postes de sauf-conduit établis par exemple à Schwabach et Gunzenhausen. Les sources de l’époque évoquent alors en nombre les plaintes et doléances des officiers du margrave à l’égard de transporteurs ou commerçants nurembergeois qui prenaient des chemins de traverse.. A l’inverse les trajets suivis exprimaient parfois les affinités électives qu’entretenaient quelques villes. Couramment, les marchands de Nuremberg adoptaient une déviation passant par la ville impériale de Wissembourg pour éviter les douanes et le sauf-conduit seigneuriaux imposés à Roth et Gunzenhausen. Les liaisons routières en Franconie assuraient un rapprochement facile entre la plupart des villes de la région, mais ravivaient aussi entre elles concurrence et promiscuité.

Seul un observateur imprégné de la situation locale, instruit de l’ensemble des forces à l’œuvre peut espérer approcher les démarches intercommunales franconiennes. Aussi, avant de définir strictement un échantillon urbain, m’a-t-il paru important de me familiariser d’abord avec toutes les actrices potentielles de l’intercommunalité régionale. L’ensemble des pistes glanées dans l’historiographie n’était pas de trop pour essayer de reconstituer le semis urbain de la région 174 .

Notes
158.

Les registres de correspondance de Nuremberg illustrent à leur façon l’importance des voies de communication pour les relations entre villes. Quand Nuremberg écrivait de façon similaire aux villes impériales de Rothenbourg, Windsheim, Wissembourg et Schweinfurt, le secrétaire groupait souvent sur le registre Rothenbourg et Windsheim. Desservies par une même route, les lettres qui leur étaient destinées pouvaient être portées en un parcours par le même messager.

159.

Les itinéraires pouvaient devenir obligatoires par le manque d’autres routes de desserte, leur mauvais état ou leur absence de sécurité. Les axes systématiquement empruntés correspondaient aux routes les mieux gardées et entretenues. Certains seigneurs avaient aussi acquis une force de contrainte qui leur permettait d’imposer le passage sur des routes de leur territoire. En théorie aboli par les rois à la demande des villes, le Strassenzwang restait valide dans les faits.

160.

Le « Geleit » a plusieurs acceptions. Il correspond au secteur de sauf-conduit et au territoire où un seigneur assure une escorte et perçoit un droit en échange. C’est aussi le droit d’exercer un sauf-conduit sur une route ou une rivière. La taxe perçue pour cela porte le même nom, de même que l’office correspondant.

Le sauf-conduit valait pour la protection de marchandises ou pour celle de personnes. Il prenait la forme d’une escorte personnelle, ou d’une surveillance des routes ou d’une simple déclaration de garantie pour les personnes et biens en transit. Dès le XIIIe siècle, le droit de sauf-conduit échut aux princes territoriaux. Les villes d’empire le possédaient dans leurs murs et souvent jusqu’aux limites de leur territoire.

161.

Voir Ilse von Strampf, Die Entstehung und mittelalterliche Entwicklung der Stadt Nürnberg in geographischer Betrachtung, Erlangen, 1929

162.

Cf. Carte des routes franconiennes en annexe.

163.

Outre les considérations de Walter Christaller sur le réseau urbain franconien, la Nuremberg médiévale a été étudiée comme lieu central par Hanns Hubert Hofmann, « Nürnbergs Raumfunktion in der Geschichte », dans Stadt-Land-Beziehungen und Zentralität als Problem der historischen Raumforschung, Hanovre, 1974,  p. 91-102 ; Voir aussi Karl Bosl, « Der Aufstieg Nürnbergs zum reichischen Zentralort in Nordbayern », Zeitschrift für bayerische Landesgeschichte 36 (1973), p. 1023-1032

164.

Cochlaeus file alors la métaphore et brode autour du thème du centre. Il pousse le souci du détail jusqu’à placer son chapitre sur Nuremberg au cœur de la Brevis Germaniae Descriptio. Le chapitre consacré à la ville franconienne est la quatrième partie d’un livre qui en compte huit. « Dans cette description de l’Allemagne, la ville de Nuremberg constitue une sorte de centre. Car elle est assurément à peu près le milieu tant en ce qui concerne la situation que la langue et le mérite (virtus) […] On dit qu’elle est le milieu du mérite parce qu’elle est riche en multiples vertus : politique, économique, morale et intellectuelle. Mais ce mérite repose sur un certain milieu. » Cf. Johannes Cochlaeus, Brevis Germaniae Descriptio, Karl Langosch (éd. et trad.), Darmstadt, 1969, (Ausgewählte Quellen zur Geschichte der Neuzeit 1)

165.

Cf. Fritz Schnelbögl, « Leben und Werk des Nürnberger Kartographen Erhard Etzlaub », MVGN 57 (1970), p. 216-231. Voir aussi l’article sur Etzlaub par Otto Maull dans la Neue Deutsche Biographie, vol.4, 1959,  p. 669.

Natif d’Erfurt, Erhard Etzlaub y fit ses études et acquit le droit de bourgeoisie nurembergeois en 1484. En 1511, alors fabricant de compas, il revêtit la fonction officielle de commandant dans le quartier du marché au foin. Ses premières cartes, circulaires, renvoient à ses activités de fabricant et astronome. Il est aussi décrit en 1507 comme « géomètre juré », puis parallèlement, à partir de 1513 et jusqu’à sa mort en 1532, comme médecin.

166.

Soit approximativement 16 x 7,4 = 120 km.

Cette carte, de 39 cm par 27 cm, imprimée par Georg Glogkendon, serait la première carte politique dans l’espace allemand indiquant les limites des territoires. Les villes sont mentionnées par des cercles. La carte doit permettre d’apprécier la distance entre chaque lieu et Nuremberg. Les lettres r et b distinguent les villes impériales (Reichsstadt) et épiscopales (Bischofsstadt). Voir Herbert Krüger, « Des Nürnberger Meisters Erhard Etzlaub älteste Strassenkarte von Deutschland », Jahrbuch für fränkische Landesforschung 18 (1958), p. 125 et s. avec 6 illustrations et plusieurs tableaux. Carte reproduite dans Fritz Schnelbögl, Dokumente zur Nürnberger Kartographie, 1966, (Beiträge zur Geschichte und Kultur der Stadt Nürnberg 10), p. 48 et s.

Sur ce modèle, une seconde carte a été éditée après 1524 par Georg Erlinger. Elle se présente comme un « miroir des villes » autour de Nuremberg, dans un rayon de 25 Meilen cette fois. Elle aussi comporte exactement 100 localités. Cf. Fritz Schnelbögl, supra, p. 62. Original conservé à la Stadtbibliothek Nürnberg, Will.I.27M. Voir reproduction en annexe.

167.

Au XIIIe siècle, l’itinéraire d’Albert de Stade mentionne ce parcours comme une route de pèlerinage jusqu’à Rome. Les villes de Nördlingen, Dinkelsbühl et Rothenbourg y forment des stations. Cf. MGH SS XVI, p. 339. A Aub, cette route se divisait : une branche menait vers Würzbourg et Schweinfurt, puis vers le Nord de l’Allemagne ; une autre partait vers Francfort. La bifurcation pour Francfort via Tauberbischofsheim était empruntée par des Italiens, des Augsbourgeois, des marchands d’Ulm et de Dinkelsbühl pour se rendre aux foires de Francfort. Les Souabes l’appelaient « route franconienne ». En 1340, Louis le Bavarois autorisa les Rothenbourgeois à faire passer cette route par leur ville et à prélever une douane. Cf. Böhmer, Regesta Ludwigs des Baiern, n°2085

Voir Rudolf Endres, « Der Funktionswandel der Messestadt Nördlingen und der Reichsstädte Dinkelsbühl und Rothenburg », dans Franz Tichy et Jürgen Schneider (éd.), Stadtstrukturen an alten Handelswegen im Funktionswandel bis zur Gegenwart, Neustadt/Aisch, 1984, p. 15-27

168.

Voir Philippe Braunstein, « Wirtschaftliche Beziehungen zwischen Nürnberg und Italien im Spätmittelalter », dans Beiträge zur Wirtschaftsgeschichte Nürnbergs, Stadtarchiv Nürnberg (éd.), vol. 1, Nuremberg, 1967, p.377-406.

169.

Cette route était appelée « Splügenstrasse ». Cf. J. Müller, « Der Umfang und die Hauptrouten des Nürnberger Handelsgebietes im Mittelalter », VSWG 8 (1908), p. 2 et s. Voir aussi Rudolf Endres, Die Nürnberg-Nördlingen Wirtschaftsbeziehungen im Mittelalter bis zur Schlacht von Nördlingen, 1963, (Schriften des Instituts für fränkische Landesforschung 11) ; Sur la situation favorable de Nuremberg, voir plus récemment, A. Höhn, Die Strassen des Nürnberger Handels, Nuremberg, 1985.

170.

Voir Wolfgang von Stromer, Oberdeutsche Hochfinanz (1350-1450), Wiesbaden, 1970, chapitre 2 : « Die hansische Flandern-Blockade von 1358-1360 und der Erwerb der grossen Flandern-Privilegien von 1362 durch Nürnberger Kaufleute », p. 18 et s.

171.

Cf. Rudolf Endres, « Ein Verzeichnis der Geleistrassen der Burggrafen von Nürnberg », Jahrbuch für fränkische Landesforschung 23 (1963), p. 129 et s. 

172.

Voir le répertoire des privilèges douaniers et commerciaux nurembergeois établi par G. Hirschmann, « Nürnbergs Handelsprivilegien, Zollfreiheiten und Zollverträge bis 1399 », dans Beiträge zur Wirtschaftsgeschichte Nürnbergs, vol. 1, Nuremberg, 1967, p. 1 et s.

173.

Pour les localités situées sur les routes de Nuremberg à Nördlingen, voir Rudolf Endres, Die Nürnberg-Nördlingen Wirtschaftsbeziehungen im Mittelalter bis zur Schlacht von Nördlingen, 1963, (Schriften des Instituts für fränkische Landesforschung 11). Voir G. Hirschmann, « Nürnbergs Handelsprivilegien, Zollfreiheiten und Zollverträge bis 1399 », dans Beiträge zur Wirtschaftsgeschichte Nürnbergs, vol. 1, Nuremberg, 1967, n°139, p. 42

174.

Voir infra, chapitre 1