La chronique municipale de Würzbourg

A Würzbourg, le legs chronistique est maigre, mais illustre. Les noms prestigieux de Lupold von Bebenburg, de Michael de Leone 436 , Johann Trithemius 437 ou Lorenz Fries 438 s’y rattachent. Mais leurs récits relèvent de la chronistique épiscopale et ecclésiastique, et non de la littérature urbaine. Parmi les chroniques locales, dans la ville seigneuriale, il n’existe finalement qu’un texte lié directement au conseil, une « Chronique du conseil de la ville de Würzbourg » inscrite dans le premier manuel du gouvernement municipal. Son éditeur 439 l’attribue, grâce à des mentions internes, à Siegfried von Bacharach, qui fut, pendant trente ans et jusqu’au début du XVIe siècle, secrétaire auprès des percepteurs de l’impôt indirect (Ungeld). Ses notes, très brèves, mentionnent quelques événements du début du XVe siècle puis s’amplifient pour les années 1460. Les successeurs de Siegfried von Bacharach prirent ensuite la relève, de façon désordonnée et aléatoire jusqu’en 1551. Il en résulte des annales décousues, particulièrement sensibles aux préoccupations professionnelles de leurs auteurs. Pour ces hommes chargés de l’impôt sur le commerce du vin, les désastres météorologiques essuyés par le vignoble ou les prix du vin sont un souci fréquent. Mais par leurs liens avec le gouvernement bourgeois de Würzbourg, plus qu’avec le seigneur épiscopal de la ville, ces annalistes trahissent parfois, au détour d’une notice, les relations urbaines de leur cité.

La chronique du conseil de Würzbourg a pour principaux horizons les abords du Main, cette Franconie centrale dont les évêques et ducs de Franconie présidaient à la destinée. Plus souvent qu’on n’aurait pu l’attendre d’une ville seigneuriale, les déplacements de l’empereur font l’objet d’une annotation, fort similaire à ce que l’on trouve dans les chroniques des villes impériales. Si quelques-uns de ses séjours sont mentionnés, tels Heidelberg, Neuss, Aix-La-Chapelle, Bamberg, ou Nuremberg, ce sont bien sûr les arrêts du roi à Würzbourg qui génèrent les plus longs développements 440 . L’extrême attention portée aux faits et gestes de l’empereur n’exprime peut-être qu’une Königsnähe toute franconienne, mais elle traduit plus sûrement dans le contexte würzbourgeois le souvenir nostalgique d’un court passage de la ville dans le giron de l’empire. La bourgeoisie de Würzbourg chercha longtemps auprès du souverain le soutien impérial qui aurait pu lui donner l’autonomie 441 et voyait toujours en lui le garant de précieuses libertés.

Malgré ce rêve impérial un instant caressé, la chronique du conseil de Würzbourg reconnaît la toute puissance de l’évêque sur la ville et les localités voisines. Beaucoup des villes mentionnées ne sont que des cadres géographiques, elles n’interviennent dans le récit que parce que l’évêque y porte ses pas. Ces localités ne servent que de faire-valoir aux actions du seigneur urbain, que l’on suit par exemple à Bamberg pour l’élection du nouvel évêque en 1459 ou 1455. Au folio 65 s’insère une liste des villes, marchés et villages délivrés de leurs engagères par l’évêque Rodolphe de Würzbourg 442 . Si cette mention est tout à la gloire d’un évêque qui sut enrayer la spirale de l’endettement et restaurer l’autorité épiscopale, elle exprime aussi la dépendance croissante des villes du territoire. L’obédience d’Heidingsfeld à l’évêque Lorenz von Bibra en 1502 vient comme une nouvelle preuve de la reconquête territoriale et politique menée par les évêques de Würzbourg 443 .

En ne commençant qu’au XVe siècle, la chronique du conseil évite les plus forts moments de l’affrontement entre le seigneur local et le gouvernement des bourgeois. Mais le texte présente à maintes reprises des villes qui eurent maille à partir avec leur seigneur urbain ou la noblesse des environs : Rothenbourg en 1407 444 , Ochsenfurt en 1440 445 , Hassfurt 446 en 1448, Neustadt/Aisch et Uffenheim en 1462 447 , Heidingsfeld en 1494 ou en 1499 448 … Quand les villes cessent d’être de simples décors pour le roi et le seigneur urbain, la chronique du conseil de Würzbourg en fait l’enjeu de conflits ou sièges et n’hésite pas à souligner leurs capacités de résistance. Une attention spéciale est dévolue aux querelles qui opposèrent certaines villes seigneuriales à leur propre seigneur. La chronique établit ainsi très clairement un parallélisme entre le siège de Bamberg par son évêque 449 et l’assaut de l’évêque Johannes von Brunn contre le chapitre cathédral et Würzbourg en 1428.

« Item dans l’année susdite (1435, le 30/06/1435), le sire Antoni von Rothenhann, évêque de Bamberg, eut une grande armée devant la ville de Bamberg, avec laquelle lui et son chapitre pensaient forcer la ville à renoncer à ses libertés impériales. Anno 1428, le mardi après l’assomption, le seigneur Johannes von Brunn, évêque, eut aussi une grande armée devant Würzbourg contre son chapitre à cause de la prestation de serment. »

Cette conscience d’une communauté de destin entre les deux villes épiscopales franconiennes perce tout au long du récit qui mentionne en alternance les élections de l’évêque de Würzbourg et de l’évêque de Bamberg, leurs rencontres ou des phénomènes météorologiques qui affectèrent les deux cités. Un tel intérêt pour le sort des villes épiscopales dépasse à l’occasion les frontières franconiennes et induit une narration détaillée de la prise de Mayence par Adolphe de Nassau en 1462. L’épisode, dépeint très négativement, se clôt par une morale, prompte à voir dans la maladie d’Adolphe de Nassau en 1465 une punition divine 450 . Là encore, on eut à Würzbourg la conscience d’une possible similitude des destins urbains qui s’exprima à l’occasion de l’élection du nouvel évêque en 1466 :

« Item le lundi après Saint Marc (28/04/1466) parurent devant le chapitre les sires suivants : le comte Wilhelm von Henneberg, les deux comtes de Henneberg, le comte Görge, puis le comte Hans von Wertheim, un sire de Weinsberg, Schenck Görg von Limpurg, le sire Hilprant von Thüngen, le sire Conrad von Hutten et d’autres, et au nom de la ville de Würzbourg, les bourgmestres, Hans Woltz, Georg Stor, Contz Hoffman, Heinrich Pfeiffelman ; ils leur dirent au nom de la chevalerie et de la ville par le biais de Friedrich Schultheiss, le chancelier, qu’ils voulaient prendre en considération le trouble qui s’était récemment produit dans l’évêché de Mayence et voter unanimement…ils voulaient réfléchir à la façon dont ils pourraient rester dans l’intégrité, l’honneur et le bien et sur ce se séparèrent. »’

Du monde des villes impériales franconiennes, la chronique de Würzbourg ne retient que peu de choses. Rothenbourg trouve mention par le siège qu’y menèrent en 1407 le margrave de Brandebourg et l’évêque de Würzbourg. Siegfried von Bacharach souligne également la présence à Würzbourg des délégation de Nuremberg, Schwäbisch Hall, Rothenbourg et Windsheim, invitées pour l’élection de l’évêque Rodolphe en 1466. Mais au fond, seule Nuremberg focalise l’attention du narrateur, non seulement comme lieu de réunions princières et impériales (par exemple en 1467 pour décider d’une action contre les turcs), mais encore comme actrice de l’histoire et des guerres sur le sol franconien. Sous la plume réprobatrice de l’auteur, la ville compte parmi ceux qui entretenaient les conflits locaux, au même titre que les princes de la région (évêques, margraves de Brandebourg et ducs de Bavière) 451 . La chronique énonce par exemple pour 1449 la liste des 13 princes qui partirent en guerre contre Nuremberg et « les villes d’empires communes ». Suit la liste des villes qui combattirent officiellement la cité impériale : Coburg, Bamberg, Forchheim, Kronach, Lichtenfels, Pegnitz et Betzenstein. En 1502, les Fehde de Nuremberg contre Cunz Schott et Christoph von Gich, de même que la bataille d’Affalterbach entre Nuremberg et le margrave de Brandebourg (guerre de succession bavaroise) trouvent chacune mention. Le récit demeure imprécis et se borne à ce que pouvaient conter les Zeitungen et les poèmes politiques sur ces événements 452 . Il affiche d’autre part un recul désapprobateur et une distance réservée à l’égard de la ville impériale :

« Item on ne cessera pas d’écrire, de chanter et de lire abondamment dans des poèmes (Sprüche) des choses au sujet de la très célèbre ville de Nuremberg et de Cuntz Schott et de la guerre de Christoph von Gich ; c’est pourquoi je ne veux pas mettre ici mes mains dans le charbon. Item dans cette même année 1502 le dimanche après saint Veit, à cause de la consécration de l’église dans un petit village, appelé Affalterbach qui provoquait depuis longtemps des querelles et beaucoup de ressentiment entre le margrave et la célèbre ville de Nuremberg, eut lieu une bataille à cause du susdit prince et des Nurembergeois. Je ne connais pas les pertes et défaites des deux partis, je veux les laisser tomber et recommander les pauvres âmes à Dieu…Il ne faut pas les oublier ; mais l’orgueil et l’arrogance 453 conduisent beaucoup d’hommes à la pauvreté, là-dessus, rien de plus que bonne nuit ! »’

Outre ces sentiments polémiques à l’égard de Nuremberg, la chronique du conseil dévoile quelques-unes des relations ordinaires tissées par les habitants de Würzbourg dans des villes environnantes : les allées et venues des marchands de vin vers Nuremberg 454 et Nördlingen ; le recrutement de Caspar Gross, paveur de Heilbronn, pour revêtir la place du marché (1515) ; le séjour d’un médecin d’Halberstadt, né à Venise. Les prix du vin et des céréales fournissent à leur tour une idée des circuits de l’information et des échanges interurbains. L’auteur est en mesure de comparer en 1491 les prix du blé à Ochsenfurt et à Würzbourg ou ceux du vin à Kitzingen et Würzbourg. Les indications météorologiques et les informations sur les crues parviennent manifestement à Würzbourg depuis Bamberg, Heidingsfeld, Kitzingen, Dettelbach, Schwarzach et à l’occasion, Nuremberg.

Mais il est peu de contacts interurbains auxquels le conseil de Würzbourg participe directement. Il prête la main à la poursuite d’un malfaiteur menée conjointement par plusieurs villes du territoire épiscopal. L’homme est finalement châtié à Würzbourg en 1448 pour avoir profané le sacrement de l’eucharistie dans les quatre villes d’Ebern, de Schwarzach, Würzbourg et Heidingsfeld.

Le regard que jetait au XVe siècle le conseil de Würzbourg sur les villes des environs porte la marque profonde de ses relations heurtées avec l’évêque. La chronique municipale identifie le destin de Würzbourg à celui de toutes les cités qui durent affronter leur seigneur ou qui subirent les outrages des guerres princières. Le sort de ces sœurs d’infortune a pour Würzbourg une forte valeur d’exemple. Mais plutôt que de chercher à fédérer ces énergies, le conseil würzbourgeois en tire seul les enseignements pour sa ville et affiche sa volonté de rechercher à tout prix la paix.

Siegfried von Bacharach exprime des relations ambivalentes avec Nuremberg. Dans la cité impériale franconienne, le conseil de Würzbourg puise ses informations et ses marchands vendent leur vin. Les Würzbourgeois rendent à Nuremberg les honneurs dus à son rang et reconnaissent sa réputation. Mais à l’égard de cette grande voisine, la chronique de Würzbourg prend ses distances. En termes à peine voilés, elle critique en Nuremberg l’arrogance d’une ville qui voudrait être à l’égale des princes et contribue ainsi aux désordres régionaux 455 .

Notes
436.

Michael de Leone fut protonotaire épiscopal et écolâtre au chapitre cathédral de Würzbourg. Voir G. Kornrumpf, « Michael de Leone », dans Verfasserlexikon 6 (1987), colonnes 491-503, qui mentionne les références manuscrites et les éditions de ses œuvres, dont le « De Cronicis temporum hominum modernorum ».

437.

Cf. Johannes Trithemius, Annales Hirsaugienses 2 (1690)

438.

Lorenz Fries, Chronik der Bischöfe von Würzburg 742-1495, II, Ch. Bauer, U. Beireis, Th. Heiler, G. Salzer et P.A. Süss (éd.) Würzbourg, 1994, (Fontes Herbipolenses II). Sur Fries et sa chronique, voir A. Wendehorst, « Lorenz Fries (1489-1550) », dans Fränkische Lebensbilder 12 (1986), p. 91-103 ; W. Ziegler, « Die deutsche Geschichtsschreibung zur Zeit des Lorenz Fries », dans U. Wagner (éd.), Lorenz Fries (1489-1550). Fürstbischöfl. Rat und Sekretär. Studien zu einem fränkischen Geschichtsschreiber, (Schriften des Stadtarchivs Würzburg 7), 1989, p. 9-22. Le texte de la chronique fut achevé en 1546. Trois exemplaires, visés par Fries, étaient destinés respectivement à l’évêque, au chapitre ecclésiastique et à la chancellerie. Le seul conservé figure actuellement aux archives municipales de Würzbourg : Stadtarchiv Würzburg Ratsbuch 412.

439.

Cf. Wilhelm Engel, Die Rats-Chronik der Stadt Würzburg (XV. und XVI. Jahrhundert), 1950, Würzbourg, (Quellen und Forschungen zur Geschichte des Bistums und Hochstifts Würzburg, 2). Le manuscrit de cette chronique figure dans le « Ratsbuch 1 », Stadtarchiv Würzburg.

440.

Par exemple, l’entrée de l’empereur Frédéric III et son séjour de plusieurs jours à Würzbourg en 1474. Le chroniqueur note que le souverain se rendit ensuite dans la ville voisine d’Ochsenfurt et qu’il « n’y resta pas plus qu’une nuit ».

441.

Sous l’égide de Charles IV, la ville de Würzbourg put participer en son nom propre à des alliances de paix avec plusieurs villes et puissances franconiennes dans la seconde moitié du XIVe siècle.

En 1397, dans le cadre d’une révolte contre l’évêque Gerhard de Würzbourg, la bourgeoisie de Würzbourg sollicita la protection de l’empire auprès du roi Wenceslas. Celui-ci accorda la protection demandée et reçut le serment de la ville qui se croyait en passe de devenir une ville libre d’empire. Wenceslas revint cependant sur sa décision en 1399 et donna main libre à l’évêque pour mener la répression contre les insurgés.

442.

« Les offices, villes, bourgades et villages suivants ont été rachetés de leurs engagères et rendus au chapitre de Würzbourg par l’évêque Rodolphe de louable mémoire : Rothenfels pour 22 500 fl ; Gemünden : 11000 fl….

Suit une liste de 59 lieux et offices, et la somme finale de 514 160 florins. Ces droits et localités avaient été engagés par les évêques de la première moitié du XVe siècle pour résorber un endettement considérable. La noblesse du chapitre avait été la première à bénéficier de la situation.

443.

« A.d. 1502 au 4e jour de la Pentecôte, soit 8 jours avant la saint Urbain (18/05/1502), notre gracieux sire l’évêque Lorenz von Bibra a reçu Heidingsfeld par serment d’allégeance seigneurial, achetée pour l’évêché. »

444.

« Année 1407, l’évêque de Würzbourg von Egloffstein, celui de Bamberg, le sire de Wertheim, le burgrave de Nuremberg se portèrent devant Rothenbourg an der Tauber et y restèrent de Kiliani (08/07) à la naissance de Marie (08/09), et leur prirent le château d’Endsee, Nordenberg, Habelsee ».

445.

« Item dans l’année susdite 1440 le 04 décembre, le margrave Albrecht de Brandenbourg voulut prendre Ochsenfurt sans prévenir et ceux d’Ochsenfurt lui prirent aussitôt sa bannière, qu’il dut laisser dans la ville ».

446.

« Item a. 1448, le 07 septembre 1448, de nuit, on voulut prendre la ville d’Hassfurt et ils parvinrent jusqu’aux murs, et les aides étaient les ducs de Saxe et le margrave de Brandebourg. »

447.

« Item ensuite notre sire de Würzbourg se porta devant Uffenheim avec quelques vassaux et ils l’attaquèrent le 7 aout 1462 et ils résistèrent à l’attaque, de sorte que beaucoup de Wurzbourgeois eurent des dommages et périrent dans l’attaque et durent rentrer à la maison sans gagner, le 3e jour ». Les villes d’Uffenheim et de Neustadt/Aisch furent prises au margrave de Brandebourg par une coalition des évêques de Bamberg et de Würzbourg en 1462. Elles parvinrent cependant à résister et retournèrent au margrave.

448.

« En 1494, à l’heure où on a l’habitude de fermer les portes dans les villes, la ville de Mainbernheim a été prise par Antoni de Bibra et ses aides et a été pillée ».

« Item le mardi après la conception de la vierge Marie année 1499 (10/12/1499), notre gracieux sire de Würzbourg, l’évêque Lorenz von Bibra a reçu Heidingsfeld par serment d’allégeance de sire Christophe von Budenstein, leur seigneur, et devait la garder 15 ans…mais ils avaient aussitôt fait également allégeance à leur seigneur et le jeudi suivant (12/12/1499), ce même seigneur a mis en place un conseil complètement nouveau à une personne près. La cause en est que ces derniers avaient courtoisement parlé à leur seigneur pendant les fêtes de pentecôte précédente, l’avait traduit en prison dans sa propre ville et l’avaient fait conduire hors de la ville chez le margrave Frédéric comme un malfaiteur. Les filles et garçons d’étuves ont bien de quoi parler et il y aurait beaucoup à dire là-dessus… »

449.

L’auteur situe l’événement en 1435, mais l’assaut de l’évêque de Bamberg contre la communauté bourgeoise du lieu date en fait de 1433. Cf. Hans von Hof ?, Lied von der Belagerung Bambergs 1433, dans Rochus Liliencron, Die Historische Volkslieder der Deutschen vom 13. bis 16. Jahrhundert 1, Leipzig, 1865, n° 71

450.

« Item a.d. 1465, le sire de Nassau, évêque de Mayence, fut touché par de nombreuses adversités, guerres, dettes et même la maladie de son corps, de telle sorte qu’il prit un sire de Würtenberg comme coadiutor de l’évêché de Mayence, certaines villes de l’évêché firent alors allégeance à ce dernier par obéissance et soumission ; et l’on dit que si l’évêque a été touché dans son corps, c’est peut-être que Dieu l’a puni pour son grand crime. »

451.

Par exemple à propos de la guerre de succession de Bavière : « Item a. 1505, sa majesté royale a demandé à tous les princes, ecclésiastiques et laïques, appartenant à l’empire, de venir à Cologne auprès de sa majesté approximativement 8 jours avant ou après le jour du corps du christ (22/05/1505)… en pensant clore et régler l’ininterrompue et nuisible guerre bavaroise…à laquelle s’étaient mêlés jour après jour d’autres princes, ecclésiastiques et laïques, avec leurs comtes, sires, chevaliers, barons, écuyers et villes, à savoir Nuremberg, pour prêter assistance et aide à tel ou tel ».

452.

Cf. Rochus von Liliencron, Die Historische Volkslieder der Deutschen vom 13. bis 16. Jahrhundert, Leipzig, 1865.

453.

Ces qualificatifs s’adressent au margrave de Brandenbourg, présenté de façon négative, dans toute la chronique. Mais Nuremberg n’est pas exempte de reproches. Les termes employés font écho aux remarques que l’on trouve dans les éloges, où les poètes-artisans défendent leur ville accusée d’orgueil.

454.

En 1447, des marchands d’Augsbourg quittèrent leur ville avec du vin italien, vendu sur la place de Nuremberg. De là, ils repartirent dans leur patrie chargés de vin franconien, venu de Würzbourg. En 1491, Hans Vockt, bourgeois et aubergiste de Nördlingen, achète au conseiller würzbourgeois Adolf Gross, deux foudres de vin pour 55 florins 4 livres 21 schilling

455.

Les reproches faits par Würzbourg à Nuremberg reprennent en partie l’argumentaire nobiliaire et princier que l’on trouve dans la littérature polémique de la guerre margraviale. Un des textes nobiliaires tient les propos suivants sur les villes d’empire liguées dans le camp adverse : « il (le malin) a donné aux villes l’orgueil, puisqu’elles veulent s’opposer à la noblesse/ et la chasser complètement/ contre Dieu, sans aucun droit, / […] Elles pensent qu’elles n’ont pas leur pareille/ et se disent l’empire romain/ mais elles ne sont que des paysans. »

Cf. Rochus von Liliencron, Die Historische Volkslieder der Deutschen vom 13. bis 16. Jahrhundert, Leipzig, 1865, p. 417, n° 90 : « Die Städte »

Inversement, les éloges de Nuremberg répondent aux reproches exprimés en soulignant la contribution de la ville à la paix. Cf. Hans Sachs, Ein Lobspruch der Statt Nürnberg (1530), dans Adelbert von Keller et Edmund Goetze (ed.), Hans Sachs Werke, tome 4, Stuttgart, 1870, (Bibliothek des literarischen Vereins 105),

« Il dit : la ville est réputée au loin, / élevée et fleurie par les louanges / […] De cette bonne renommée et gloire, ils sont tous envieux et irrités, / ils l’importunent par haine et envie / souvent sans aucun fondement./ Mais ces quatre joyeuses demoiselles/ veillent sur Nuremberg./ La première demoiselle en robe blanche/ correspond à la sagesse de ceux de Nuremberg / quand ils doivent traiter de quelque chose/ quand journellement ils tiennent conseil/ avec des gens expérimentés et instruits/ qui sont chez eux très honorés/ ils considèrent prudemment ce qui est à venir/ ils prêtent attention avec application à toutes les circonstances,/ qui, quoi, comment, quand, où et pourquoi, pour quelles raisons, enfin le lieu et la somme/ où l’ennemi leur a tendu un piège/ pour les faire tomber par pratique et ruse/ de telle sorte qu’ils s’entendent par la sagesse/ à trouver le moyen de lui échapper./ Par de sages et bonnes décisions/ la ville a souvent conservé la paix. / La seconde demoiselle vêtue de vert/ correspond à leur justice sévère/ sur laquelle ils veillent au mieux envers les habitants et les hôtes./ Ils n’affaiblissent jamais nulle part/ ni ne prennent à personne, grand ou petit/ sa liberté et son droit (original)/ et ils donnent à chacun son dû, / ce qu’ils doivent lui donner en droit/ empereur, roi, prince, comte, chevalier, écuyer/ ils tiennent chacun selon son état/ et ils ne font violence à personne/ et ils s’offrent en tous temps/ pour la vraie justice, / par ce fait, ils désarment souvent/ l’hostilité illégitime de leurs ennemis impudents./ La troisième demoiselle, vêtue de bleu,/ correspond à la vérité de ceux de Nuremberg,/à laquelle ils se tiennent inébranlablement/ dans toutes les affaires menées outrancièrement./ Envers le saint Empire romain/, et ses alliés de même/ Nuremberg a conservé une réelle, ancienne/ et continuelle fidélité,/ elle a pour cela souvent souffert grande misère./ Elle fut combattue par l’empereur Henri,/ détruite il y a quatre cents ans, / pourtant elle n’a pas renoncé à la vérité, à la fidélité/ dans toutes choses obligée par son serment,/ elle reste honnête, droite, sincère./ De même son escorte, son sceau et ses lettres/ n’ont jamais souffert d’aucune atteinte./ Quand on l’accuse aux diètes d’empire,/ils (ceux de Nuremberg) persistent toujours dans la vérité/ de telle sorte que la claire vérité éclate en plein jour, et que leur partie adverse fuit de honte./ D’autre part, Nuremberg vit amicalement,/ elle ne donne à personne de raisons de guerres/ et fait la sourde oreille plus d’une fois./ Si bien qu’aucune gentillesse/ aucune vérité, ni aucune justice n’y peut plus rien/ l’ennemi ne veut pas renoncer à sa jalousie imméritée /et à son arrogance, ce dont la préserve la quatrième jeune fille, la protection./ Cela correspond à la force, au pouvoir, à la richesse, à la vigueur et à la résistance / de toute la ville de Nuremberg/ parce que tout autour d’elle il y a/ deux murs d’enceinte, un profond fossé/ dotés de 183 / tours et beaucoup de forts bastions./ De même avec des édifices fortifiés/ ils renouvellent chaque jour leurs murs d’enceinte/[…], également des maîtres artilleurs et des commandants, des pièces d’artillerie sans nombre en campagne, de grandes provisions de poudre, d’argent/ d’engins de guerre, de grains et de saindoux/ de vin, d’avoine, de viande, de gibier et de sel/ de sorte qu’ils s’entendent à garder une grande population/ en campagne. Ainsi la ville, de jour comme de nuit/ est très bien gardée et surveillée./ La ville a aussi sans relâche/ ses propres cavaliers sur les routes/ Voici donc raconté par ces quatre articles/ comment Nuremberg se tient souvent en paix. »