Le volume des correspondances. Essai de comparaison

Trop peu répandues ou conservées pour fournir un critère général de centralité urbaine, les lettres municipales répertoriées par chaque ville n’en expriment pas moins des niveaux différents dans l’intensité de leurs communications avec l’extérieur. A cet égard, quelques études récentes permettent de comparer l’activité épistolaire nurembergeoise à celle d’autres localités.

D’après ce qu’il subsiste de sa correspondance, le conseil de Réval envoya ses premières lettres en 1325-1336 1138 . A l’heure où commencèrent les registres de Nuremberg, la cité baltique produisait entre 5 et 30 lettres par an. Elle intensifia sa correspondance active dans les années 1430 jusqu’à 88 lettres annuelles, puis redescendit à des niveaux inférieurs à 20.

La ville de Bâle fournit sans doute l’exemple le plus digne de comparaison avec les correspondances nurembergeoises. Au cours du XVe siècle, le conseil municipal s’émancipa progressivement de l’évêque du lieu et dirigeait vers 1440 une communauté de 10 000 à 15 000 âmes. Cette ville « moyenne », selon les termes des historiens allemands, dispose d’une série de registres épistolaires qui parcourt le XVe siècle à compter de 1409. Leur fiabilité paraît nettement moins bonne que celle des Briefbücher, mais les années complètes offrent d’intéressants ordres de grandeur 1139 .

Dans les années 1410-1425, Bâle 1140 expédia un nombre de lettres équivalent à celui de Nuremberg, aux alentours de 200 missives annuelles. Il faudrait cependant pouvoir jauger à cette période la part de lettres induites par la présence du concile dans la ville de Bâle. Pour ses besoins propres, le personnel conciliaire recourut sans doute aux bons services de la ville, en lui confiant une part des échanges requis par les circonstances.

De fait, dès les années 1430, l’écart se creuse entre les correspondances bâloises et nurembergeoises. A partir de cette décennie, l’activité épistolaire de Nuremberg connut des pics à plus de 1000 lettres/an quand Bâle en expédia tout au plus 352 en 1475.

En période ordinaire, l’écart se maintient entre les deux villes : Nuremberg envoyait alors presque trois fois plus de lettres que Bâle (300 lettres environ en 1450-1469 pour Nuremberg ; 121 lettres en moyenne entre 1480 et 1500 pour Bâle).

La correspondance active de la ville de Bâle se rapproche ainsi à la fin du XVe siècle des chiffres obtenus sur la correspondance de la cité franconienne de Rothenbourg au début du XVIe siècle. Dans cette ville de 5 000 à 10 000 habitants 1141 , les livres de missives traitant des années 1501, 1502 et 1515 font respectivement état de 176, 144 et 138 lettres envoyées.

Ces comparaisons doivent pour l’heure demeurer de simples constats. Elles demandent à être enrichies par des études statistiques sur les correspondances de Nördlingen, d’Esslingen et de Cologne 1142 . Dans l’état actuel des connaissances, Nuremberg se distingue par un volume de correspondances trois fois supérieur à celui de Bâle et de Rothenbourg.

Notes
1138.

D’après la communication de Tapio Salminen à la 5e conférence internationale d’histoire urbaine, Berlin, 2000 : « Aspects of textualisation in the late medieval administration and written communication of the council of Reval, ca. 1300-1450 ».

1139.

Voir courbe et tableaux sur les lettres envoyées par Bâle, en annexe.

1140.

Voir Christoph Grolimund, Die Briefe der Stadt Basel im 15. Jahrhundert. Ein textlinguistischer Beitrag zur historischen Stadtspreche Basels, Tübingen-Bâle, 1995

1141.

Cf. J.U. Ohlau, Der Haushalt der Reichsstadt Rothenburg in seiner Abhängigkeit von Bevölkerungsstruktur, Verwaltung und Territorienbildung (1350-1450), 1975 La liste fiscale de 1374 permettent de recenser 1083 contribuables, celle de 1377 en donne 1082 et celle de 1407, 1190. En admettant qu’il s’agit de feux réels et non de feux fiscaux, Ohlau arrive à une population de 6600 habitants environ en 1374 et de 7300 environ en 1407. Ces chiffres lui paraissent sous estimés.

1142.

Voir inventaire dans le chapitre consacré aux missives.