Les cercles de l’intercommunalité

L’identité des correspondants, dévoilée au détour des livres de correspondances, éveille toutes les curiosités. Au fond quels étaient ces 170 destinataires auxquels le conseil de Nuremberg écrivait en une année ? Face au foisonnement des personnes et des puissances rencontrées, tri et regroupements s’avèrent nécessaires. Le besoin d’une présentation ordonnée et cohérente conduit à forger des catégories de destinataires, comme le firent Christoph Grolimund sur les lettres de Bâle ou Anne Zink sur le courrier de Bayonne 1146 . Christoph Grolimund distingua ainsi les groupes de destinataires suivants : villes, princes territoriaux, administrations et employés étrangers, administration et employés de la ville, chevalerie/noblesse, bourgeois de Bâle, divers.

Aussi pratiques qu’elles soient et, bien que fondées sur la lecture des missives municipales, de telles rubriques ont le tort d’épouser des conceptions sociales contemporaines plus que médiévales. Elles présupposent des découpages abstraits qui n’avaient pas forcément de valeur aux yeux des hommes du temps. Leur usage paraît d’autant plus mal à propos que nos catégories contemporaines marquent vite le pas devant les usages médiévaux. Christoph Grolimund se voit par exemple contraint d’aménager, dans le groupe « villes » une sous-rubrique pour les délégués des ligues urbaines. Il se heurte à une frontière parfois très subtile entre chevalerie et officiers. Il se trouve enfin confronté à une catégorie « divers » tentaculaire, qui regroupe des clercs, des employés municipaux ou des bourgeois d’origines diverses.

Pour contourner l’obstacle, mieux veut sans doute s’en tenir aux catégories du passé, en l’occurrence à celles que l’art épistolaire du XVe siècle semblait mettre en valeur 1147 . Le procédé comporte ses imperfections, aucune de ces catégories ne se restreignait strictement au monde des villes. Cependant, à suivre les « chers amis », on a le gage de ne saisir que les communautés jurées, dont les villes avec lesquelles Nuremberg entretenait des relations intercommunales.

Si l’adresse aux communautés s’accompagnait de marques d’amitié et de références à la sagesse ou à l’honneur, cette catégorie de destinataires se singularisait-elle par le nombre ? Les « chers amis » comptaient-ils en large part dans les relations extérieures d’une ville comme Nuremberg ou Rothenbourg ?

Notes
1146.

Cf. Christoph Grolimund, Die Briefe der Stadt Basel im 15. Jahrhundert, Tübingen, Bâle, 1995 ; Anne Zink, « La ville de Bayonne et ses correspondants au XVIIIe siècle », dans Congrès national des sociétés historiques et scientifiques, (120e, Aix-en-Provence, 1995), Correspondre, jadis et naguère, Paris, 1997, p. 243-254

1147.

Voir le chapitre consacré aux sentiments d’appartenance.