A l’Est, en Bohême

La liste des correspondantes de Nuremberg comporte de nombreuses localités bohêmes et confirme par là le rôle d’interface joué par la cité impériale entre l’Allemagne du Sud et le royaume voisin.

Eger, à environ 160 km de Nuremberg, est la principale interlocutrice de Nuremberg de l’autre côté de la frontière. Elle reçoit des missives franconiennes 12 années sur 16 1163 . Prague, Tachau et Elbogen, sans faire l’objet de relations épistolaires aussi régulières, restent des destinataires récurrentes des lettres nurembergeoises.

Les registres témoignent ensuite de relations plus sporadiques avec des villes bohêmes comme Taus, Pilsen, Satz ou Brüx.

Attestées tout au long du XVe siècle, les correspondances tissées avec les cités bohêmes connaissent cependant des hauts et des bas.

Entre 1404 et 1419, le refroidissement des relations entre Nuremberg et Wenceslas IV s’avère peu propice aux effusions épistolaires. Les Briefbücher 1 à 4 contiennent tout au plus 130 lettres relatives à la Bohême, destinées à des sires locaux et aux cités de Elbogen, Eger, Taust, Tachau, Prague ou Pilsen. Avec chacune, Nuremberg règle des affaires de nature pénale ou économique.

En 1419, les débuts de la rébellion hussite modifient ces échanges et les intensifient. Dans une étude consacrée aux relations de Nuremberg avec la Bohême, Miloslav Polivka 1164 fait état du tableau suivant :

Briefbuch Années Nombre de lettres concernant la Bohême % de lettres informatives
BB1 à BB4 1404-1419 130 2,3
BB5 1419-1423 122 66,4
BB6 1423-1424 27 70,4
BB7 1425-1427 81 55,6
BB8 1428-1430 119 63
BB9 1430-1432 80 64
BB10 1432-1434 114 73,7
BB11 1434-1437 67 20,9

Même si l’aperçu par année manque ici, les lettres vers la Bohême manifestent une recrudescence des échanges liée à la lutte contre les hussites, en 1419-1423, 1428-1430, 1432-1434.

Comme auparavant, c’était par l’entremise d’Eger que Nuremberg s’informait le plus souvent de la situation politique en Bohême, de la localisation des forces hussites et des croisés ou des sièges menés contre les cités catholiques de Pilsen, Brüx, Mies, Karlstein. En amont, pour fournir à Nuremberg les renseignements nécessaire, Eger effectuait une collecte d’informations auprès des nobles et des villes bohêmes, comme Karlstein ou Prague. Pour des données plus précises sur les mouvements de troupes, les approvisionnements de l’armée catholique et le sort des prisonniers, Nuremberg s’adressait directement aux cités concernées. Les informations acquises sur les événements bohêmes prirent ainsi place en grand nombre non seulement dans les lettres nurembergeoises, mais encore dans les chroniques de la ville franconienne.

Car Nuremberg gardait rarement pour elle les renseignements obtenus et les transmettait dans le reste de l’empire. Ulm, Augsbourg, Colmar, Dinkelsbühl, Windsheim, Wissembourg, Strasbourg, Nördlingen, Ratisbonne et Worms se trouvèrent informées par les bons soins de la cité impériale franconienne du sort des croisés en Bohême.

Notes
1163.

A l’inverse, les sources d’Eger confirment la fréquence des relations épistolaires avec Nuremberg. Cf. H. Gradl, Geschichte des Egerlandes (bis 1437), Prague, 1893, et du même, Die Chroniken der Stadt Eger, Prague, 1884

1164.

Miloslav Polivka, « Nürnberg als Nachrichtenzentrum in der ersten Hälfte des 15. Jahrhunderts », dans Heinz-Dieter Heimann (éd.), Kommunikationspraxis und Korrespondenzwesen im Mittelalter und in der Renaissance, Schöningh : Munich, 1998, p. 165-178