Selon les clauses en usage dans les unions de Paix et les alliances urbaines, les actions communes étaient d’abord à la solde des villes ou puissances les plus proches, avant un remboursement au prorata des quotités dans le délai prescrit. Il ne faut donc pas s’étonner de voir les villes impériales franconiennes constamment en train de régler leurs comptes. Les avances sur paiements et les remboursements étaient leur lot quotidien. En 1383, Rothenbourg inscrit ainsi dans ses comptes le poste « Einnahmen vom Bund ». En remboursement des sommes avancées pour une expédition militaire, elle reçut cette année-là 295 livres de Nördlingen, 204 d’Augsbourg, 128 de Gmünd, 100 lb 16 schilling de Kaufbeuren et 18 lb de Giengen (Brenz).
A chaque échéance d’une Paix ou à chaque compte de la ligue urbaine souabe, les échanges de courrier et d’argent allaient bon train, afin de solder les dettes réciproques des villes entre elles 1280 . Cette imbrication des affaires financières urbaines était encore renforcée pour les petites villes impériales franconiennes par des paiements groupés. Ces remboursements, avances, et contre-remboursements formaient l’expression concrète des alliances et imbrications fondées entre villes d’un groupe restreint, celui des villes impériales franconiennes ou du sous-groupe de la ligue urbaine souabe.
Dans ce cadre, Nuremberg règle par exemple ses comptes avec Augsbourg le 08 novembre 1456
Lettre de Nuremberg à Augsbourg
‘ « […] Vous nous avez écrit comment il nous appartient de prêter pour ce même paiement 107 florins et deux Ort etc. Depuis, nos amis de Dinkelsbühl nous ont écrit comment ils ont réglé leur part à ceux d’Ulm pour ce même paiement, c’est à dire 25 florins 2 Ort. Il nous en revient la moitié pour notre prêt, de telle sorte qu’il nous appartient seulement de prêter 95 florins que nous vous (ewr liebe) envoyons par notre messager ici-présent. Mais s’il s’avérait que la part de nos susdits amis de Dinkelsbühl n’ait pas été versée, veuillez quand même nous avancer les 13 florins et 1 ort et les donner en plus, pour que la dite somme ne manque pas à cause de pour ce même prêt » 1281 .’Malgré les efforts accomplis de part et d’autre, il demeurait parfois des arriérés de paiement. Wissembourg reçut à ce titre un rappel à l’ordre de ses voisins de Nuremberg.
‘ « Chers amis, vous (ewr liebe) nous restez redevables de quelque argent qui vous a été avancé pour deux redditions de comptes à l’assemblée. Nous demandons à votre amitié avec une insistance particulière de bien vouloir nous faire paiement amiable de cette dette sans plus de délai, étant donné notre bonne volonté et notre amical comportement dans cette affaire etc. Datum feria VI post Michaelis » 1282 ’Ce système d’avances sur paiement, sans intérêts, pouvait cependant s’étendre à d’autres circonstances et s’appliquer, en plus faibles proportions, à des villes qui n’étaient pas des alliées politiques. Au nom de l’amitié, il semblait courant qu’entre connaissances, sur simple demande, on avance à court terme l’argent nécessaire à l’entretien des soldats ou aux démarches d’une homologue.
Lettre de Nuremberg à Strasbourg (13/05/1447) :
‘ « Nos bonnes amies, l’ensemble des villes impériales de l’union en Souabe et nous mêmes, avec elles, avons envoyé à notre sire le comte palatin, avec lequel nous et elles sommes en union, notre cavalerie lourde pour l’aider devant Bitche, comme votre prudence l’a peut-être appris. S’il se trouvait que cette affaire se prolongeait et que notre agent Hans von Talheim, qui est là-bas avec notre contingent armé, ait besoin de quelque argent, nous demandons ardemment à votre sagesse de lui prêter en notre nom et sur notre compte jusqu’à 200 florins. Ce que vous lui prêterez ainsi, sitôt que nous l’aurons appris, nous le paierons et acquitterons en remerciement à votre prudence, par ici dans le pays si vous avez besoin de quelque chose, ou chez vous à Strasbourg, comme cela est légitime. Et vous nous ferez preuve en cela de votre amitié particulière, que nous voulons volontiers rendre à votre prudence quand cela se présentera » 1283 .’En tant que siège d’assemblées impériales et fidèle du souverain, Nuremberg était elle-même fréquemment sollicitée pour quelque dépense imprévue. Son Magistrat ne fit aucune difficulté pour avancer, selon les vœux du roi, 100 florins bernois au secrétaire municipal et à un conseiller zurichois. La somme devait être remboursée à court terme sur présentation de la reconnaissance de dette alors établie 1284 .
La multitude et la diversité des avances et remboursements conclus entre villes rend difficile l’identification des véritables opérations de prêts interurbains. D’autant que dans ce cas, les villes multipliaient les précautions afin de masquer le plus possible leurs opérations. Elles réfléchissent parfois, au sein de la ligue urbaine souabe, aux meilleurs moyens de prêter à des consœurs en difficultés, sans en avoir l’air aux yeux de l’empereur et des princes. Suite à une réunion de la ligue à Ulm, les conseils de Nuremberg et d’Augsbourg s’étaient promis de réfléchir chacun de leurs côtés, puis de se communiquer leurs points de vue sur les articles du procès-verbal qui demandaient une réponse. L’un d’entre eux, en juillet 1446, se rapportait à un projet de prêt pour la ville de Berne. Sans détours, Nuremberg exprima sur ce sujet l’avis suivant :
‘ « Nous pensons qu’on doit autoriser et accorder de la part de l’ensemble des villes (gemeine stett) un tel prêt à ceux de Berne, mais de telle sorte que cette même somme soit prêtée et apportée par des marchands ou un autre prête-nom (einen andern schein), pour que la responsabilité de ce prêt ne soit pas attribuée aux villes de la ligue (gemeine stett), et pour éviter ainsi des commentaires, mais de telle sorte cependant que les villes communes accordent en secret cette même somme selon la part de celles qui portent la responsabilité du prêt » 1285 . ’Les prêts entre villes passaient donc au besoin par des prête-noms, des hommes de paille ou des particuliers. Sous le couvert de leurs affaires privées, ils effectuaient à la demande des conseils des opérations de prêts, qui mettaient les villes à l’abri d’une implication officielle. Lorsqu’il était sollicité pour de l’argent, le conseil de Nuremberg opposait parfois une fin de non-recevoir officielle, mais orientait la demandeuse vers certains de ses bourgeois. Ainsi, par une lettre à Esslingen, le Magistrat nurembergeois précisa qu’il « n’était pas dans la coutume de Nuremberg de prêter au nom du conseil ». Des Nurembergeois n’en avancèrent pas moins les 200 florins nécessaires 1286 .
L’identité des prêteurs officieux ne fait pas mystère. Même si elle n’est jamais dévoilée au cours des transactions interurbaines que j’ai pu rencontrer, ils coïncident probablement en large part avec les hommes que l’on voit prêter au roi ou aux grands. Dans de tels cas, quand le conseil ne prête pas au nom de la ville, ce sont des conseillers ou leurs proches parents qui fournissent les fonds nécessaires. En 1405, les bourgeois Hans et Jacob Groland 1287 , ainsi que Heinrich Steinlinger au nom de sa société et celle de Muffel se dévoilent en demandant au conseil d’appuyer auprès du roi de Hongrie, Sigismond, leur demande de remboursement 1288 . En 1446, la famille du défunt Hans Tetzel, et son ami, le conseiller Berthold Pfinzing 1289 , cherchèrent à leur tour à récupérer une somme d’argent considérable prêtée au duc Johann de Bavière 1290 . A la même période, Sebald Groland et Nicolas Muffel 1291 participent de même au commerce de l’argent, en relais du conseil nurembergeois.
Les prêteurs des années 1420 sont quant à eux bien connus grâce à une démarche du conseil, qui consista en 1422, à recenser les prêts consentis par des particuliers à des non-bourgeois, princes, barons, chevaliers et écuyers. Les 31 personnes convoquées durent déposer sous serment et dire quelles opérations de prêt étaient encore en cours 1292 . Ces hommes furent alors priés d’abandonner leurs activités, de mettre un terme à leurs accords et de ne plus contracter de tels engagements à l’avenir 1293 . Plusieurs d’entre eux appartenaient au conseil : Ulrich Haller Junior, Konrad Kress, Georg et Sigmund Stromer, Erhart Schürstab, Hans Schürstab. Tous les autres étaient issus de familles pratiquant le grand commerce et entretenaient des relations de parenté avec de nombreux conseillers.
Après 1422, les grands marchands et financiers nurembergeois n’en continuèrent pas moins leurs opérations florissantes. Les missives des années 1420-1430 ne manifestent cependant entre 1422 et 1430/1431 que des prêts au roi et à l’archevêque de Cologne 1294 . En 1425, Heinrich Imhof prêta ainsi à Dietrich de Cologne la somme de 1000 florins, qui lui fut finalement remboursée en 1431, après plusieurs reports, et avec des dommages et intérêts à hauteur de 300 florins 1295 . Mais cet exemple, étudié en détail par Wolfgang von Stromer 1296 , montre que le prêteur n’était pas toujours celui que l’on croit. L’épisode révèle des opérations financières urbaines fort complexes, qui devaient exister tant dans les prêts aux grands que dans des affaires entre villes. Venu à l’appui de son bourgeois dans sa demande de remboursement, le conseil de Nuremberg finit par mettre en exergue l’origine réelle de la dette. En 1423, dans le cadre d’une opération militaire contre les Hussites à laquelle participaient les troupes de l’archevêque de Cologne, le sire Heinrich von Plauen devait recevoir une gratification de 1 000 florins du sire de Cologne. Faute de la recevoir en temps et heure, ce sont des Nurembergeois qui procédèrent à l’avance, sur demande du roi. Le sire de Plauen obtint ses 1000 florins rhénans de la main d’un Nurembergeois, mais il devait les rembourser en mai 1426 grâce à l’argent qui lui serait versé par l’archevêque de Cologne. Lequel s’était engagé à payer le capital et 200 florins de frais. Les livres tenus par les trésoriers nurembergeois (Losunger), Erhart Schürstab et Sebald Pfinzing, et le secrétaire municipal, Bartholomeus Neithart, manifestent quant à eux le circuit de l’argent à l’intérieur même des murs nurembergeois. Sebald Imhof, qui semblait être le prêteur officiel et négocia le remboursement avec le prince électeur de Cologne en 1428, n’était en fait qu’un homme de paille, mis en avant pour ses bonnes relations avec les sires de Plauen et la cour épiscopale. Mais en amont, les 1000 florins avancés à Heinrich von Plauen sortaient tout droit des fonds secrets du conseil nurembergeois. Ils passèrent ensuite entre les mains de Sigmund Stromer zu der Rosen, l’ancien bourgmestre (alter burgermeister) du moment, un familier du roi, avant d’être prêtés en secret au sire de Plauen. Ce circuit fut masqué au regard de l’archevêque de Cologne, qui ne se connaissait qu’un créancier, celui qui figurait officiellement sur la lettre de créance, Sebald Imhof 1297 .
A l’image de cet exemple, on comprend mieux la « couverture » conseillée par Nuremberg pour le prêt envisagé par la ligue urbaine souabe à la ville de Berne. La franchise avec laquelle Nuremberg, Augsbourg et Ulm en débattaient en 1446 montre en suffisance que ces manipulations financières étaient familières et courantes pour ces trois marchés de l’argent d’Allemagne du Sud. Elles s’appuyaient sur l’existence de fonds secrets 1298 , la complicité de conseillers instruits des secrets financiers de la ville et leurs réseaux de relations dans le monde commercial et bancaire.
Pour ses prêts à des villes, le conseil de Nuremberg usait à n’en pas douter des trois niveaux de prise de risques, déjà décrits par W. von Stromer.
La ville se défaussait parfois au profit des grands financiers (et conseillers) du lieu, disposant de crédits importants. Elle déclinait par courrier la demande de l’emprunteuse, mais lui indiquait des particuliers disposés à prendre l’opération financière à leur charge. Ces derniers tiraient avantage du change, mais prenaient à leurs frais les coûts d’acheminement de l’argent, de l’encaissement et de l’éventuelle mise en jeu des cautions. En cas de difficultés pour le recouvrement, le conseil leur prêtait son aide logistique, ce qui explique la présence de lettres émises par certains de ces particuliers dans les livres de missives du conseil, à l’image des lettres de Berthold Pfinzing en 1446-1447 1299 .
Un second procédé consistait à prêter la rallonge nécessaire à un financier nurembergeois sur les fonds secrets de la ville. Il avançait alors l’argent en son nom à une cité demandeuse dont il était familier. L’argent remboursé passait au retour entre ses mains, puis rejoignait la chambre du trésor nurembergeoise.
Il arrivait enfin à la ville de prendre tous les risques, en assurant la totalité du prêt sur les fonds secrets. Les Septemviri veillaient cependant dans ce cas à mettre en avant une tierce personne, un homme de paille, à la fois membre du petit conseil et lié à de grandes firmes commerciales ou industrielles.
Les comptes municipaux, les Ratsverlässe, les missives des Briefbücher et le « livre entre les deux portes » (Buch mitt’ der Thüren - Liber cum januis !) laissent malgré tout apparaître quelques-unes des opérations de prêts consenties, plus ou moins directement par le conseil nurembergeois, à d’autres cités. L’index de l’Amts- und Standbuch n°269 (Buch mitt’ der Thüren) mentionne, au milieu de prêts à des particuliers (qui semblent coïncider avec les intermédiaires habituels du conseil) 1300 et des nobles, quelques transactions passées entre villes 1301 :
« Francfort à cause de celui de Cologne, soit 2 060 florins, fol. 33 »
« Francfort [fol.] 90 »
« Heidingsfeld und Bernheim [fol.] 39 et 53 »
« Nördlingen à cause de la mauvaise monnaie (schwartze Müntz) pour 2 000 florins [fol. 37] »
« Pilsen [fol.] 57 »
« Spire [fol.] 28 »
« Schwäbisch Wörth [fol.] 34 et 180 »
« Schweinfurt [fol.] 91 »
« Strasbourg [fol.] 99 »
« Wissembourg [fol.] 190 » 1302
« Schwäbisch Wörth au sujet des dettes et des intérêts échus en plus [fol.] 196 »
« Zurich [fol.]77 »
Le poste « prêt » des comptes municipaux consent quant à lui à répertorier les opérations officielles de prêts à des villes entre 1431 et 1440 1303 . En 1432, Nuremberg prêta ouvertement 4 000 florins Landswährung, soit 4 400 livres 1304 « aux deux villes d’Heidingsfeld et de Bernheim en raison de leurs demandes instantes, comme cela est écrit dans le ‘livre rouge au milieu des deux portes’ (Roten Buch mitt’ den beiden Thüren), fol. 53 1305 ». Les deux villes remboursèrent chacune 1 100 livres en 1433 et 1434, puis à nouveau 1 100 livres entre 1435 et 1440, soit 3 300 livres au total. Il restait donc, en 1440, 1 100 livres d’impayés au titre du capital, sans compter les intérêts 1306 . Les missives des Briefbücher recoupent et complètent quant à elles les données inscrites dans le « livre rouge entre les deux portes ». Mainbernheim et Heidingsfeld y font toujours figure de mauvais payeurs en 1446. Le prêt concédé en 1432 par Nuremberg n’avait toujours pas été entièrement réglé, tandis que les redevances inhérentes à l’engagère obtenue par la ville impériale n’entraient dans les caisses municipales qu’à grand peine. Dans plusieurs lettres de 1446, malgré toute l’affabilité que réclamait le langage diplomatique, le ton monta entre Nuremberg et ses débitrices.
Lettre à Heidingsfeld ( lettre identique pour Mainbernheim):
‘ « Quand bien même nous vous avons déjà auparavant priés plusieurs fois oralement et aussi par écrit, de nous faire paiement et règlement de la dette dont vous nous restez redevables, on ne nous a encore rien présenté jusque-là, alors que nos créances sont continuellement repoussées par vous contre notre volonté et avec d’importants dommages pour nous. C’est pourquoi nous vous réclamons et intimons aussi sérieusement que nous le pouvons de nous faire paiement de cette même dette encore une fois sans plus de retard et d’obstacles, pour éviter de grands dommages qui pourraient en résulter » 1307 .’Lettre à Heidingsfeld et Mainbernheim
‘ « Nous vous avons déjà écrit de nombreuses fois en vous demandant et priant de payer les créances légitimes que nous vous avons concédées par grâce particulière pour votre intérêt il y a longtemps, mais qu’on ne nous a pas encore réglées, ce qui est quand même plutôt malhonnête (unpillich), comme vous le comprenez vous-mêmes. Nous vous envoyons donc à présent Hermann Hexheim notre agent auquel nous avons recommandé d’encaisser nos rentes et droits (nütze) actuellement échus chez vous, en vous demandant et priant d’accorder votre aide à notre agent de telle sorte que ces droits présents nous soient versés et acquittés sans obstacles, comme cela est légitime, nous vous en remercions. A propos de l’autre dette susdite, nous demandons et voulons que vous nous la payiez et régliez aussi sans faute, car nous ne pouvons et nous ne voulons pas nous passer plus longtemps de ces importances créances légitimes etc » 1308 .’Lettre à Mainbernheim
‘ « Vous nous avez écrit à propos de l’argent dont vous nous avez été redevables pendant de longues années et que vous nous devez encore etc. Nous avons bien pris connaissance de cette même lettre et, après toutes les choses passées, à savoir que vous avez ajourné le paiement trop longtemps depuis des années et que nous vous avons sollicités à ce propos récemment par notre agent et aussi notre conseiller et que vous vous êtes vous-mêmes engagés à ce sujet etc, votre lettre nous semble plutôt malvenue (fremd) et malhonnête (unbillich). Si nous devions envoyer encore une fois notre agent chez vous à ce sujet, les coûts et les frais et vos dommages et intérêts croîtront d’autant plus. C’est pourquoi nous vous prions et demandons paiement et règlement sans faute comme vous y êtes obligés envers vous-mêmes et nous, car nous ne voulons pas nous passer plus longtemps de nos créances et il ne nous appartient pas d’en répondre. En cela, vous nous ferez particulièrement plaisir » 1309 .’Parmi les villes débitrices inscrites dans les comptes de Nuremberg entre 1431 et 1440 figurait aussi la ville souabe de Donauwörth. En 1434, elle reçut pour sa part 2 000 florins Landswährung, versés sur l’ordre du conseil (soit 2 200 livres). Elle remboursa 55 livres en 1435 et 165 livres en 1436, alors présentés comme des intérêts liés au prêt, mais cessa ses versements entre 1437 et 1440. Elle avait alors acquitté sur deux ans 1/10 du capital au titre des intérêts, ce qui laisse entrevoir un intérêt annuel de l’ordre de 5%. Reste le capital dont rien n’avait encore été remboursé 6 ans après l’obtention du prêt. Donauwörth n’entreprit de le payer que dans les années 1440, avec des échelonnements annuels, payables à la saint Martin (260 florins Landswährung).
‘ « Les 260 florins que vous étiez tenus de nous verser pour le jour de la saint Martin en 1445, comme le sait bien votre sagesse, nous ont bien été payés en votre nom par Hans Arzt, notre bourgeois. Mais la somme que vous nous deviez pour le jour de la saint Martin dernièrement passé nous est toujours impayée. Nous demandons à votre honorabilité de bien vouloir faire en sorte que ce même argent nous soit aussi payé sans plus de retard amiablement, comme cela est légitime, étant donné que nous avons fait preuve dans cette même affaire envers votre amitié d’une remarquable compréhension et fidélité. Car si nous pouvons témoigner à votre sagesse etc » 1310 .’Malgré ces retards de paiement, Donauwörth reçut plusieurs fois les subsides de Nuremberg, comme en atteste le « livre entre les deux portes », où le nom de la ville apparaît à trois reprises. Devant les atermoiements de la ville souabe, Nuremberg dut à nouveau négocier les conditions de versements :
‘ « Schwäbisch Wörth (Donauwörth)Selon les termes de l’accord, le remboursement du capital devait donc s’échelonner sur environ 9 ans. Donauwörth s’en acquitta cette fois à peu près correctement, en versant presque tous les ans les 200 florins réclamés. L’identité des payeurs révèle au passage quelques-uns des liens familiaux tissés entre la bourgeoisie de Nuremberg et les familles marchandes de Souabe. Urban Spengler ou à défaut, son frère Jörg 1313 , de même que Heinrich Wolff 1314 ou Hans Pirckheimer 1315 effectuèrent certaines des transactions financières 1316 .
Si le soutien financier offert aux petites villes de Mainbernheim et Heidingsfeld ou à la ville impériale de Donauwörth figurait ouvertement dans les comptes municipaux nurembergeois, il n’en était pas de même pour tous les prêts concédés à des villes et répertoriés dans le « livre entre les deux portes ». Tandis que les registres de comptes n’indiquent rien pour 1437-1438, le livre des trésoriers signale :
‘ « Schweinfurt [fol. 91, actuel fol. 104]Ce prêt à court terme mobilisa donc, sous le couvert du secret, un homme de paille et probablement les fonds secrets du conseil nurembergeois. Conrad Paumgartner, choisi pour être le prêteur « officiel », était ce conseiller spécialiste des affaires intercommunales, déjà rencontré à plusieurs reprises, comme facteur, financier ou diplomate avisé 1319 . En conséquence, il était connu à Schweinfurt et constituait un prêteur plausible.
Le conseil nurembergeois comptait enfin parmi ses débitrices régulières quelques villes « étrangères ». En 1446, il s’efforça de recouvrir des créances détenues auprès des deux cités bohèmes de Pilsen (Neupilsen) et de Tachau.
‘ « Même si nous vous avons plusieurs fois et souvent (ewr liebe) demandé, au sujet des 800 florins Landswährung bohèmes, que nous avons prêté il y a longtemps à votre honorabilité par fidélité, amour et amitié particuliers, de nous faire amiablement paiement et acquittement et alors que nous étions de bonne volonté en la matière, cela ne nous a rien rapporté jusqu’à ce jour, si ce n’est que le paiement de notre créance a été repoussé contre notre volonté, ce qui nous semble quelque peu malvenu en considération de l’affaire. C’est pourquoi nous demandons à votre sagesse avec une insistance particulière de bien vouloir nous payer et régler encore une fois sans plus de retard nos susdites créances, comme cela se doit d’après le contenu de votre engagement etc » 1320 .’Quoi de commun à tous ces prêts concédés par Nuremberg à des villes ?
Il convient d’abord de souligner leur faible nombre au regard des versements à des particuliers ou des princes inscrits dans le « liber cum januis ». Mais ce livre lui-même ne détenait pas un enregistrement systématique des prêts et créances de la ville. Il faut aussi compter avec l’écran formé par les intermédiaires. Sur les vœux du conseil, plusieurs conseillers ou argentiers de Nuremberg purent intervenir en leur nom propre et verser tout ou partie de la somme. Dès qu’elles tombaient entre les mains de particuliers, les affaires financières devenaient difficilement décelables. D’autant que le prêt n’amenait pas nécessairement un transfert d’argent et pouvait lui-même servir à couvrir des dettes. Les rentes viagères et perpétuelles, détenues en nom propre par un conseiller, pouvaient cacher sans peine des avances financières de grande envergure au gouvernement d’une ville voisine.
En dehors d’avances concédées sur la demande du roi, Nuremberg prêta avant tout à des villes familières, intégrées à son réseau de relations. Les financements allaient à des voisines, comme Schweinfurt ou Wissembourg, à des partenaires commerciales comme Francfort, Cologne ou Spire. Même les prêts à des villes bohêmes s’inscrivent dans des rapports d’interconnaissance. Si Nuremberg ne reçut que 7 lettres en provenance de Tachau entre 1449 et 1457 et ne traitait avec elle que des litiges entre particuliers, elle prêta manifestement de l’argent aux villes bohêmes par « amour » de Pilsen. C’est au reste à cette dernière qu’elle prêta la plus grosse somme : 800 florins contre 200 à Tachau. Comme le montrent les lettres échangées entre les deux cités en 1449-1457, les relations se déroulaient ici sur le ton de la cordialité et de la régularité (16 lettres reçues en provenance de Tachau). Leurs conseils respectifs échangeaient des informations sur la situation militaire de leurs pays respectifs et s’inquiétaient du devenir de leurs villes 1321 . Le registre des lettres reçues par Nuremberg indique ainsi en 1449, au moment de la guerre margraviale :
‘ « Item une lettre amicale de ceux de Pilsen au sujet de notre guerre et qui dit qu’ils sont volontiers prêts à nous servir pour cela » (n°459). ’ ‘ « Item une lettre de Pilsen, où ils offrent amicalement leur service à cause de nos difficultés (widerwertigkeit) et où ils demandent à connaître la situation de ces mêmes choses » (n°501) 1322 . ’A l’égard des villes, Nuremberg pratiquait deux sortes de prêts. Elle prêtait d’une part à court terme, de façon plus ou moins fortuite, et exigeait alors un retour rapide de l’argent investi. Elle se montrait par contre beaucoup plus patiente pour plusieurs prêts, remboursés sur le long terme, affichant alors sa « bonne volonté », sa « patience et sa fidélité ». Cette compréhension souligne la dimension, non économique, mais politique du geste accompli envers la ville demandeuse. Malgré les remboursements chaotiques de Donauwörth dès les années 1430, Nuremberg réitéra ses prêts à ce mauvais payeur. Vis-à-vis de Pilsen, Nuremberg soulignait en 1446 avoir déjà réclamé plusieurs fois son dû. Une dette courait cependant toujours (ou à nouveau ?) entre les deux villes en 1452 1323
A l’égard de telles villes, si les trésoriers nurembergeois semblaient ne pas transiger sur un remboursement intégral du capital avancé et des intérêts prévus, ils tolérèrent des remboursements échelonnés sur plus de 10 ans.
Comme l’a montré Wolfgang von Stromer, les prêts nurembergeois concédés à des princes furent souvent l’occasion pour la ville de prendre ses ennemis dans un filet de dettes, apparemment contractées auprès d’une multitude de créanciers, mais en définitive liées au conseil municipal. Le gouvernement urbain avait ainsi peu d’argent à sortir, mais pouvait s’assurer, à la signature des contrats de créances, des garanties intéressantes pour la ville : cautions solides ou mise en hypothèque de droits intéressants. C’est par de tels réseaux de prêts que la cité obtint la mainmise sur la moitié des revenus fiscaux impériaux nurembergeois en 1434. De la même façon, elle put prendre à la gorge les margraves de Brandebourg dans les années 1420 et récupérer, sans débourser des sommes considérables, les droits qu’ils détenaient encore sur la ville. Nuremberg osa-t-elle faire usage des mêmes mécanismes au détriment de villes ?
Il est certain que la capitale impériale franconienne sut mettre à profit son crédit quand elle l’avança, sur demande du roi, pour faciliter les libérations d’engagère de ses consœurs franconiennes. Dans de tels cas, ce n’est cependant pas à elles qu’elle réclama des contreparties, mais directement au roi. Ainsi, en 1360, quand Nuremberg fournit 500 florins au roi destinés à aider la libération d’engagère de Windsheim et Wissembourg, elle sut arguer des services rendus pour le bien et la conservation de l’empire et put se rembourser en obtenant à son compte des droits d’usage sur les forêts impériales voisines 1324 . Peut-être obtint-elle aussi à ce titre la reconnaissance écrite d’un certain droit de tutelle sur les deux petites villes voisines ?
Au même titre, le financement de la libération d’engagère d’Heidingsfeld et de Mainbernheim n’était pas, loin s’en faut, désintéressé. En aidant le roi à récupérer les deux villes, Nuremberg entendait bien étendre sa souveraineté sur de nouveaux territoires et en percevoir les droits. Les deux localités qui lui furent confiées en engagère, en contrepartie du financement, formaient de précieux postes avancés pour Nuremberg au cœur de la principauté de l’évêque de Würzbourg. Mainbernheim, sur une des routes qui menaient de Nuremberg au Main, à deux pas de Kitzingen, tout autant que Heidingsfeld aux portes de Würzbourg, étaient à n’en pas douter des bastions importants pour l’espionnage, le contrôle du commerce et la surveillance d’un lieu de passage stratégique.
Nuremberg n’hésita donc pas à négocier son crédit « pour l’intérêt de l’empire » au mieux de ses intérêts. Mais il n’existe pas de preuves d’un quelconque monnayage similaire pour ses prêts directs aux villes familières. Nuremberg n’arrondit pas son lot de droits au détriment de ses débitrices impériales 1325 . Cela n’était, après tout, pas nécessaire, puisque, en tout état de cause, les dettes contractées envers Nuremberg, renforçaient la sujétion de ces villes à la capitale franconienne. Elles lui restaient redevables. Par conséquent, puisque les échanges interurbains se vivaient sur le mode du don et contre-don (« en espérant vous rendre la pareille, disent les lettres), avant même de rembourser leur dû à la ville impériale, elles se devaient de « payer » sous forme d’informations, de coopération militaire ou judiciaire, d’honneurs rendus et de cadeaux.
En concédant un prêt direct à Heidingsfeld et Mainbernheim, le conseil nurembergeois espérait sans doute se rembourser d’une façon ou d’une autre sur les droits qu’elle prélevait dans les deux villes au titre de l’engagère. L’opération fut manifestement un échec du point de vue économique, au vu du faible taux de recouvrement des redevances locales. En termes politiques, Nuremberg put toutefois en profiter pour renforcer sa domination sur les deux cités, les soumettant au contrôle régulier de ses agents, s’immisçant dans leur constitution au point de négocier pour elles leurs privilèges, de leur imposer un renforcement de leurs fortifications en contexte de guerre et d’intervenir dans leurs conflits politiques internes 1326 .
La ville de Nuremberg avait une « compréhension » et une patiente différentielles à l’égard de ses débiteurs et débitrices. Elle toléra de grands retards de paiements pour Donauwörth et Pilsen, mais s’avéra moins conciliante avec Tachau ou des villes seigneuriales qui s’étaient portées garantes de contrats de dettes nobiliaires. Ainsi en 1446-1447, Tachau fait-elle l’objet de plus de relances que Pilsen. Ces demandes de paiement se teintèrent de chantage en septembre 1447, quand le fils de l’écoutête de Nuremberg, Friedrich von Parsberg, s’en prit pour un grief privé à un bourgeois de Tachau. Le Magistrat nurembergeois s’activa alors pour obtenir sa libération par l’entremise de son écoutête 1327 , mais ne manqua pas de faire valoir ce nouvel argument pour réclamer paiement de ses créances à la ville de Tachau :
‘ « Nous avons prêté à votre honorabilité il y a plusieurs années une importante somme en florins pour votre grande nécessité et depuis vous en avez retardé le paiement et ne l’avez toujours pas effectué quand bien même nous vous l’avons souvent réclamé, ce qui nous semble n’être ni légitime ni amical. Nous demandons à votre sagesse avec insistance de bien vouloir nous faire paiement amiable sans plus de retard, au vu de la longue amitié dont nous vous avons fait preuve en la matière et également au vu du zèle particulier que nous avons déployé au sujet de l’actuel emprisonnement de votre bourgeois, nous voulons etc. Faites nous connaître votre réponse écrite en retour à ce sujet par ce même messager » 1328 . ’Dans le recouvrement des sommes prêtées à des nobles, Nuremberg faisait jouer en premier lieu les garants nobles, puisqu’elle pouvait par là récupérer des biens et des droits intéressants. Mais à défaut de paiement, les conseillers n’hésitaient pas à faire appel aux finances des villes seigneuriales qui s’étaient portées caution . Faute d’un remboursement de ses créances par les conseillers et le représentant du duc Johann de Bavière, son débiteur initial, le conseiller Berthold Pfinzing se retourna ainsi contre les garantes urbaines du contrat de prêt, les villes palatines de Neumarkt et Sulzbach :
Lettre de Berthold Pfinzing
‘ « Un de mes bons amis le défunt Hans Tetzel et moi-même avons apporté il y a quelques années à notre gracieux sire le duc Johann von Bayern, de louable mémoire, sur sa prière et pour l’intérêt de sa grâce, une somme en florins, selon les termes d’une lettre de créances légitime et scellée qu’il nous donna pour cela. Vous vous y êtes engagés avec quelques chevaliers, écuyers, honorables gens et autres villes et vous l’avez scellée. Comme sur cette même dette 1 000 florins du capital nous restent encore impayés audit Tetzel et à moi-même, nous les avons réclamés et après le décès dudit Tetzel, j’ai sollicité au nom de ses héritiers et en mon nom et à cause de ce même capital et des intérêts que nous avons pris et prenons en raison du retard, le sévère et fort sire chevalier Albrecht von Murach, administrateur (Vitztum) en Bavière de mon très gracieux sire le roi de Danemark etc, qui m’a répondu par écrit et oralement et a ordonné de nous faire paiement à ce propos, ce qui a été également ajourné jusqu’à maintenant. Je prie votre sagesse au nom des héritiers du susdit Tetzel et de moi-même, de bien vouloir suivre cette affaire et faire en sorte que nous puissions être payés et réglés de nos créances et dommages et intérêts courants sans plus de retard. Nous devons et voulons le mériter de la part de votre honorabilité, d’autant plus que cela est légitime, car cela ne nous convient pas d’attendre plus longtemps ce paiement. Si ce dernier nous était plus longtemps refusé, nous ne pourrions pas abandonner les poursuites, nous devrions avertir et solliciter votre sagesse à ce propos selon notre lettre de créance et accomplir notre nécessité comme il se doit. Nous espérons que vous vous entendrez à faire en sorte qu’il ne soit pas nécessaire d’aller jusque-là. Faites moi connaître en retour votre réponse écrite par ce même messager » 1329 .’La plus grande compréhension et patience de Nuremberg face à des débitrices urbaines comme Donauwörth, l’absence apparente de contrepartie, en dehors de dommages et intérêts somme toute raisonnables (5%) pour des prêts de longue durée et des remboursements ajournés, oblige à chercher les motivations de Nuremberg dans le domaine politique.
Le soutien à Donauwörth apparaît dès lors, non comme une opération à but lucratif, mais comme un soutien de l’immédiateté impériale contre les princes. Nuremberg apporta son renfort financier à Donauwörth dans les années 1430 et dans les années 1450, pour aider cette dernière à se libérer d’engagères concédées aux ducs de Bavière. Ainsi, en 1434, les 2 000 florins Landswährung prêtés sur ordre du conseil, avec un intérêt de 5%, facilitèrent la libération de la ville souabe. Ils entrèrent dans la somme de rachat de 13 000 florins payée par Donauwörth, au même titre que 1 000 florins prêtés par Augsbourg. Nuremberg avait certes un intérêt direct à soutenir cette ville impériale, point de passage stratégique sur les routes commerciales d’Allemagne du Sud. Mais l’entreprise de financement n’est pas ici à l’initiative d’une ville, mais de plusieurs. Elle découle d’une véritable politique de soutien de la ligue urbaine souabe et de ses partenaires, comme Nuremberg et Augsbourg, au maintien de l’immédiateté impériale de quelques points névralgiques de la région. Les registres de compte nurembergeois en apportent la preuve en mentionnant plusieurs réunions des villes franconiennes et souabes à Donauwörth en 1433-1434. Anton Derrer et Siegmund Stromer en furent les principaux artisans pour Nuremberg 1330 . L’autre avance de fonds consentie par Nuremberg, et inscrite dans le Liber cum januis remonte sans doute à l’année 1453. Elle s’inscrivait tout autant dans une politique commune de lutte contre la médiatisation 1331 . A cette époque, Nuremberg venait de s’engager aux côtés d’Augsbourg, Nuremberg, Ulm, Nördlingen, Dinkelsbühl, Wissembourg et Bopfingen dans un contrat de soutien à « nos amis l’ensemble des bourgmestres, conseillers et bourgeois de Werde pour qu’ils puissent rester d’autant mieux dans le saint Empire » 1332 . Le prêt sur la longue durée n’était donc qu’une des facettes d’une aide apportée par différents moyens. Les lettres reçues en provenance de Donauwörth entre 1449 et 1457 rappellent ainsi qu’outre un coup de pouce financier, la ville impériale souabe reçut de Nuremberg une assistance militaire. Elle bénéficia aussi, des années durant, de l’aide juridique et judiciaire de la capitale franconienne dans des affaires qui touchait à ses privilèges. Tout au long des années 1450, Donauwörth profita de la sorte des conseils du Magistrat nurembergeois et de l’entremise de ses meilleurs docteurs pour traiter à la cour pontifical un procès relatif à l’abbé de Keilsheim 1333 .
Partie intégrante de la stratégie d’une ville à l’encontre de ses adversaires nobles et princiers, la politique de prêts intercommunaux correspondait aussi, dans le cadre d’associations interurbaines, à une politique commune. Ensemble, les villes impériales mirent parfois sur pied des entreprises financières de très vaste envergure.
En 1385, peu de temps après l’entrée de Nuremberg dans la ligue urbaine souabe, les 38 villes de l’union ébauchèrent, avec l’appui du roi, un plan de récupération des créances juives 1334 . Au cœur du dispositif, les villes d’Augsbourg, Ulm, Rothenbourg, Windsheim et Wissembourg prévirent même une commission d’arbitrage commune destinée à traiter les litiges qui ne pouvaient manquer de naître d’une telle opération.
Le roi Wenceslas, pour avoir accepté cette atteinte contre ses sujets de l’empire, reçut des villes, par l’entremise des Nurembergeois Berthold Pfinzing et Berthold Behaim, la somme rondelette de 40 000 florins, utile à couvrir ses propres dettes. Par une loi impériale du 2 juillet 1385, les villes purent donc s’approprier la totalité des créances contractées par des particuliers auprès des juifs établis dans leurs murs. Le recouvrement en revenait dorénavant aux gouvernements urbains 1335 . Contrairement aux apparences, les juifs n’étaient pas les premiers ni les seuls visés par la manipulation financière 1336 . Dans le cadre de la préparation d’un conflit contre les princes et une partie de la noblesse, les villes avaient trouvé là ensemble un moyen de couper le crédit de leurs adversaires, de les priver du nerf de la guerre et d’hypothéquer pour l’avenir le recours futur aux prêts des juifs. Devenues détentrices des dettes contractées par une vaste partie de la noblesse locale 1337 , les cités impériales de la ligue purent en outre monnayer leurs titres de créances contre des droits et des terres auprès de tous les hobereaux et nobles non solvables. De fait, la progression des territoires urbains de Rothenbourg ou d’Ulm à la fin du XIVe siècle semble devoir beaucoup à cette initiative urbaine concertée.
Le prêt à court terme que Nuremberg inscrivit en 1437 dans son livre de créances au profit de Schweinfurt apparaît quant à lui comme une offensive commune contre l’ordre teutonique. Depuis 1265, l’ordre teutonique possédait en effet à proximité de Schweinfurt, « auf der Peterstirn », un monastère, transformé en maison de l’ordre, et avait de nombreux droits seigneuriaux dans les campagnes environnantes. Sous la présidence du maître de l’ordre, Eberhard von Seinsheim (1420-1444), cette présence devint une menace permanente pour la ville. Comme le révèle un diplôme du roi Sigismond, le 5 novembre 1427 1338 , l’ordre commença cette année-là à transformer l’établissement religieux en un lieu fortifié et à exercer une juridiction sur ses possessions rurales dans des cas qui relevaient normalement du Landgericht (ancien tribunal de centène). Le conseil obtint une interdiction royale, mais chercha aussi à se prémunir contre l’ordre teutonique par d’autres moyens.
Dès la fin des années 1420, après s’être assurée de la Paix avec ses voisins chevaliers et écuyers 1339 , voire du soutien militaire de certains en cas de guerre contre l’ordre teutonique, Schweinfurt entreprit de conforter ses positions politiques et économiques. Son conseil acheta à grands frais de nouveaux privilèges à l’empereur Sigismond, à l’exemple de trois privilèges sur les juifs consentis en 1429 et 1430 1340 . Ils permirent à la ville d’exercer la tutelle directe sur les « königlichen Kammerknechte » pendant 20 ans, de prélever sur eux des impôts, taxes et amendes judiciaires si le besoin s’en faisait sentir, de les gouverner selon leur meilleure raison (Vernunft).
Dans le même temps, le conseil étoffa ses possessions rurales autour de la ville. La méthode employée était bien éprouvée. Pour arriver à ses fins et acquérir le village d’Oberndorf avec ses dépendances, Schweinfurt se rapprocha des seigneurs en titre, les Thüngen. L’office d’Amtmann (ou de Reichsvogt), retiré en toute licence à Erkinger von Seinsheim grâce à un privilège royal, fut attribué par le Magistrat à Karl von Thüngen. En apparence bienveillante à son égard, la ville multiplia alors les prêts aux frères Karl et Kunz von Thüngen, de même qu’à leur parent Dietz. A raison de 100 florins rhénans prêtés à l’un ou l’autre, la cité devint créancière des Thüngen à hauteur de 1 600 florins entre 1431 et 1437 1341 . En échange du rachat de ces traites, elle put proposer l’acquisition d’Oberndorf et en devint de fait propriétaire et seigneur à titre perpétuel en 1436 1342 , contre la somme de 5 900 florins rhénans.
L’année suivante, le 27 mai 1437, la ville de Schweinfurt acheta pour 18 000 florins rhénans la maison de l’ordre teutonique, toutes ses dépendances et la Pfarrhof de Geldersheim. Quand bien même Schweinfurt disposait de marchés annuels, profitait du commerce sur le Main et avait désormais la main mise sur le crédit juif, une telle manne financière en l’espace de quelques années ne laisse pas de surprendre…
Les méthodes employées sont elles mêmes trop proches des stratégies de Nuremberg et de la ligue urbaine souabe pour ne rien leur devoir. Tous les ingrédients sont là : privilèges royaux, court-circuit des réseaux financiers juifs, utilisation de l’endettement nobiliaire pour des acquisitions territoriales 1343 . On sait par ailleurs que dès 1429, la ligue urbaine souabe, sollicitée par Schweinfurt, avait assuré la ville impériale de son soutien dans sa lutte contre l’ordre teutonique. C’est donc sans aucun doute avec l’aide matérielle et logistique de la ligue, et surtout de Nuremberg, que Schweinfurt put mener l’offensive et renforcer son assise territoriale. Les villes entourèrent leurs transactions du plus grand secret, pour ne pas les dévoiler aux yeux de la noblesse voisine. A la non inscription dans les comptes municipaux nurembergeois des 2 000 florins prêtés à Schweinfurt, s’ajoutèrent des écrans fournis par l’intervention de particuliers. Outre Conrad Paumgartner, signalé dans le Liber cum januis, d’autres conseillers semblent en effet avoir accordé leur concours à l’opération. Les titres de rentes viagères et perpétuelles conservées à Schweinfurt signalent de façon fort opportune, deux gros achats de rentes schweinfurtoises effectués par des Nurembergeois en 1437-1438. Le 18 juin 1437, le bourgeois de Nuremberg Heinz Ketzel 1344 acquit à Schweinfurt en son nom propre et celui de sa femme Elsen pour 900 florins de rentes viagères et perpétuelles (dont 500 florins de rentes perpétuelles). Les versements annuels de 50 florins liés à la rente perpétuelle et de 70 florins pour la rente viagère lui étaient payables, de même qu’à ses 5 enfants 1345 .
A leur niveau, Rothenbourg et ses voisines impériales de Souabe étaient capables de montages financiers similaires. Les sires de Hohenlohe, qui cherchaient au XIVe siècle à consolider leur territoire autour des localités de Kirchberg et de Ilshofen, en furent les principales victimes. Pressés par le besoin d’argent et en dépit des efforts de la ligue nobiliaire de Mergentheim, les seigneurs de Hohenlohe sollicitèrent un prêt auprès des villes impériales environnantes. Aucune, même Rothenbourg, n’avait une puissance financière suffisante ou les liquidités requises pour satisfaire la demande. Qu’à cela ne tienne ! Leurs gouvernements municipaux, habitués à la concertation au sein de la ligue urbaine souabe, unirent leurs forces. Le 16 février 1384, Ulrich von Hohenlohe déclara un emprunt de 15 000 florins rhénans contracté auprès des villes de Rothenbourg, de Windsheim, Dinkelsbühl, Schwäbisch Hall, Heilbronn, Wimpfen et Weinsberg 1346 . Gagé sur la localité, les offices et châteaux de Kirchberg, Ilshofen et Honhardt, le prêt était remboursable sur 10 ans, et soumis à un intérêt exhorbitant de 12% 1347 . Les forces financières impliquées ne se restreignaient cependant pas aux précédentes protagonistes. Des villes fort éloignées participèrent en sous-main à l’affaire. Pour une fois, Nuremberg, encore en marge de la ligue, n’en était pas. Mais les marchés de l’argent rhénans, tels Spire, Worms ou Mayence furent mis à contribution. Preuve en est fournie au travers des rentes vendues par Rothenbourg en 1374-1385 1348 . Ces années-là, aux côtés de détenteurs de titres habitant Rothenbourg, les bourgeois de Mayence trustèrent les rentes de la ville sur la Tauber. 60% à 80% du service des intérêts lié aux rentes partaient chaque année en direction de Mayence. Quand le conseil rothenbourgeois versait en moyenne 35 livres annuelles (soit 12 florins environ) aux rentiers de Rothenbourg, les gens de Mayence en recevaient le quadruple. Aux détenteurs de titres issus de Rothenbourg, intéressés avant tout par un placement familial, s’opposaient en la matière les spéculateurs de Mayence, guidés par le souci de faire des affaires, bientôt rejoints par les bourgeois de Spire. Lesquels achetèrent massivement dans les années 1385-1407 des rentes viagères et perpétuelles, parfois émises conjointement par les villes de Rothenbourg et Windsheim ou de Rothenbourg et Dinkelsbühl 1349 . En 1398, incapable de rembourser, Ulrich de Hohenlohe dut établir quittance pour 15 000 florins de dettes envers les villes de Heilbronn, Wimpfen, Weinsberg, Windsheim et Rothenbourg 1350 . Ce fut le prélude à la saisie de Kirchberg et de son office par le consortium intercommunal. Moins intéressées par les biens de Kirchberg et Ilshofen 1351 que ne l’étaient les villes de Rothenbourg, Hall et Dinkelsbühl, les autres partenaires urbains se désengagèrent de l’opération, donnant lieu une nouvelle fois à l’émission de rentes par les trois cités, qui rachetèrent ainsi les parts. Rothenbourg, Schwäbisch Hall et Dinkesbühl devinrent à partir de 1399, et jusqu’en 1562, les propriétaires conjointes d’un même territoire. Selon les termes du contrat qu’elles conclurent à cet effet, aucune ne pouvait vendre sa part, ni s’allier à une tierce puissance sans l’accord des autres membres. Les Magistrats menèrent dès lors conjointement la gestion des affaires courantes de Kirchberg, qui devint un poste avancé de surveillance et d’information utile aux trois villes impériales. Encore au XVIe siècle, une grande part des lettres échangées entre Rothenbourg, Hall et Dinkelsbühl était relative à la détention de Kirchberg, aux tenues de comptes et aux assemblée communes que cette terre commune générait 1352 .
Voir chapitre sur les institutions intercommunales
Cf. StAN, BB 26, fol. 256 (08/11/1456)
Cf. StAN, BB 27 (1457), fol. 191v-192. Wissembourg, déjà en proie à de graves difficultés financières, tarda à effectuer le remboursement. Une nouvelle lettre de demande émise par Nuremberg figure au folio 215v
Cf. BB 18, fol. 238 : Strasbourg (13/05/1447) ; voir aussi fol. 238v : lettre « in bapiro » à Hans von Talheim (13/05/1447) : « …vous nous demandez, entre autres choses, de vous écrire notre avis s’il advenait que vous aviez besoin d’une voiture avec nos compagnons et ceux de Windsheim et de Wissembourg qui se sont aussi joints à vous, et si vous pouviez alors la commander dans l’endroit où vous êtes […] Vous nous avez aussi demandé d’écrire à nos bons amis de Strasbourg et de leur demander de vous prêter de l’argent si vous en aviez besoin etc, nous vous envoyons donc par la présente notre lettre de demande amicale aux susdits de Strasbourg pour vous prêter en notre nom jusqu’à 200 florins, quand bien même nous ne doutons pas que vous ne prendrez pas plus que ce que la situation réclame. Si vous en avez le besoin et si donc vous leur prenez de l’argent, écrivez nous aussitôt de combien il s’agit et si ils veulent recevoir paiement de quelqu’un par ici dans le pays ou si nous devons donner ordre de paiement à Strasbourg, car nous ne voulons pas traîner en la matière… »
Cf. StAN, BB 18, fol. 79v (1446) : « Lorsque le prince sérénissime, notre très gracieux sire le roi des Romains est venu la dernière fois dans notre ville de Nuremberg, nous avons été visités et sollicités par votre conseiller Hans Sirend et également par votre secrétaire municipal, sur vœu de sa grâce royale, pour leur prêter en votre nom 100 florins bernois qu’ils voulaient nous rendre rapidement, selon les termes de leur lettre établie à ce sujet. Ce que nous avons accepté de faire pour faire plaisir à votre sagesse et comme ces 100 florins ne nous sont pas encore payés, nous vous demandons avec insistance particulière de bien vouloir suivre cette affaire pour nous et de commander que les 100 florins nous soient payés et acquittés sans plus de retard amiablement ».
Ce prêt ne repose pas sur des relations étroites entre les deux villes. Il paraît tout à fait fortuit, dans la mesure où Nuremberg n’entretenait pas une correspondance suivie avec Zurich. Elle ne reçut par exemple que 3 lettres en provenance de Zurich entre 1449 et 1457, toutes relatives à une affaire judiciaire touchant un artisan nurembergeois. Cf. Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997
Nuremberg eut quelques difficultés à se faire payer. Malgré sa demande de remboursement en 1446, le règlement n’avait pas encore eu lieu le 10/09/1447 : « Nous vous avons prêté il y a déjà pas mal de temps une somme en florins pour votre intérêt dont vous nous avez repoussé jusque-là le paiement et que vous n’avez pas encore réglée. Nous demandons à votre honorabilité avec insistance de bien vouloir nous faire paiement amiable de cet argent et de ne plus tarder davantage… »
Cf. StAN, BB 18, fol. 11 : lettre de Nuremberg à Augsbourg (29/07/1446) ; voir aussi fol. 12
Cf. StAN, BB 5, fol. 273’ : lettre de Nuremberg à Esslingen ; voir aussi fol. 279 : 750 florins transmis à Eger pour le compte d’Esslingen par le biais de Nuremberg
Jacob Groland fut ancien bourgmestre à partir de 1407 et jusqu’à sa mort en 1420. Il faisait donc partie dès 1405 du petit conseil. Hans Groland fut « ancien Genanter » en 1409-1410.
Cf. BB 1, fol. 9 : lettre au roi de Hongrie, Sigismond (10/02/1405) et lettre à Marcus von Nürnberg, Kamergraf en Hongrie (10/02/1405).
Hans Tetzel fut commandant suprême (Oberster Hauptmann), membre du Triumvir, donc à la tête du conseil nurembergeois, en 1444. Il décèda en 1445. Berthold Pfinzing fut jeune bourgmestre de 1432 à 1436, puis ancien bourgmestre chaque année, au moins jusqu’en 1450.
Cf. StAN, BB 18, voir entre autres fol. 79 (14/10/1446) : lettre de Berthold Pfinzing à Hans von Parsberg et Mertin von Wildenstein : « L’honorable Hans Tetzel, mon défunt ami, et moi-même avons prêté au défunt duc Johann de Bavière une certaine somme d’argent, comme le montre notre lettre de créance (Hauptbrief), dont 1000 florins restent impayés. C’est pourquoi, tous deux et après le décès de Tetzel moi seul, avons plusieurs fois écrit à votre honorabilité pour obtenir un paiement amical, qui n’a pas été fait jusqu’ici à nos dommages. C’est pourquoi je demande paiement sans délai des 1000 florins, pour éviter de plus grands frais (schaden) qui pourraient en résulter si j’applique le contenu de l’engagement…». Il ressort de cette lettre que Hans von Parsberg et Mertin von Wildenstein s’étaient portés garants du prêt pour le duc Johann de Bavière. Sur la même affaire de prêt au défunt duc Johann de Bavière, voir BB 18, fol. 83, 101v, 177v, 199v, 212v, 213, 222v
Sebald Groland fut « alter Genante » de 1432 à 1447. Nicolas Muffel fut jeune bourgmestre entre 1433 et 1442. Il devint ensuite ancien bourgmestre entre 1443 et 1446, puis fut membre des 7 Anciens Sires (Älterer Herr) à partir de 1447. Il fut jugé pour vol dans les caisses municipales en 1469.
Voir Wolfgang von Stromer, Oberdeutsche Hochfinanz 1350-1450, Wiesbaden, 1970, Beilage 11 : « 1422 : Opération et descriptif du montant des dettes, de l’argent et des rentes viagères procurés à l’extérieur, dont de nombreux bourgeois ici à Nuremberg sont devenus créanciers et cautions envers des princes, barons, chevaliers, écuyers et autres / et ce que le conseil a convenu avec eux pour éteindre ces engagements… ». La liste des bourgeois concernés est la suivante : Erhart Schürstab, Hans Derrer, Hans von Locheim [ajout : et sa société], Herdegen Valzner, Hans Rummel, Conrad Kress, Conrad Baumgartner, Seiz Biderman, Sigmund Stromer, Peter Tetzel, Fritz Tandorffer, Andres Haller, Ulrich Voland, Hans Hübner, Ulrich Haller junior, Hans Schürstab, Peter Haller junior, Friedrich Schrecker, Hans et Sebald Graser, Heinz Imhof, Peter Rieter, Wilhelm Scheuenpflug, Herman Friderecker, Fritz Pirckheimer, Conrad Tanner, Ulrich Fütterer senior, Jörg Stromer, Rudolf Sachs, Niclas Noll, [ajout : Peter Steinberger et sa société]
En 1422, le roi Sigismond cherchait à mettre en place ses projets de Tierce Allemagne avec l’appui de la ville de Nuremberg. Avec le soutien d’une coalition des villes et des chevaliers d’empire, Sigismond espérait contrebalancer la toute puissance des princes. Cependant, pour rendre cette politique efficace, il lui fallait aussi mener l’action sur le plan économique et financier. Tandis que les négociations battaient leur plein entre les villes et les chevaliers, le roi et sa bonne ville de Nuremberg, cherchèrent à couper une partie du crédit des princes. L’interdiction de prêts auprès des princes et des barons pouvait être un moyen efficace de pression contre eux. Nuremberg mena l’expérience chez elle pour inciter peut-être ensuite les autres marchés de l’argent , comme Strasbourg, Augsbourg, Ulm, Francfort et Nördlingen, à la suivre dans cette voie. Mais l’opération ne fit manifestement pas d’émules.
Le 2 août 1427, le conseil nurembergeois repoussa la demande de l’archevêque Otton de Trêves qui demandait qu’on lui procure 4000 florins auprès de prêteurs nurembergeois. Un prêt de 12000 florins au duc Frédéric d’Autriche est de même décliné en juin 1429.
En 1422, lorsque le conseil invita les financiers nurembergeois à lui communiquer l’ampleur de leurs opérations de prêt, Heinrich Imhof ne mentionna que son rôle de caution pour l’ancien écoutête nurembergeois, Hans von Sparneck. A l’époque, c’était Sebald Imhof qui entretenait des relations étroites avec l’archevêque de Cologne et figurait parmi ses créanciers habituels.
Le prêt de 1000 florins consenti à l’évêque en 1425 était remboursable avant 1428, puisque les négociations pour le remboursement sont entamées entre l’évêque et Imhof à Francfort avant janvier 1428. Comme la dette n’était toujours pas payée en juin 1428, on fit appel, sans succès, aux conseillers du margrave de Brandebourg qui s’étaient portés garants. Ce n’est qu’en 1431 que le prince électeur de Cologne fit le premier geste de bonne volonté, en promettant de s’acquitter de sa dette par le biais des impôts impériaux des villes impériales de Haguenau, Sélestat, Colmar, Rossheim, Münster et Kaysersberg. Mais en 1432, sur les 1000 florins de capital et les 200 florins de dommages et intérêts, 367 florins 4 schilling restaient impayés.
Voir Wolfgang von Stromer, Oberdeutsche Hochfinanz 1350-1450, Wiesbaden, 1970
Par ces opérations, le conseil nurembergeois et le roi forcèrent donc un des grands adversaires du souverain à des paiements qui l’affaiblissaient. En prenant cet argent sur les fonds secrets du gouvernement municipal, le conseil nurembergeois ne cherchait pas une opération spéculative, mais effectuait une démarche politique. A son terme, les percepteurs durent se résoudre à inscrire 167 florins prêtés à fonds perdus.
Sur les fonds secrets nurembergeois, voir Paul Sander, Die Reichsstädtische Haushaltung Nürnbergs, Leipzig, 1902, p. 326-331, 402-405 et 714 ; de même que Wolfgang von Stromer, Oberdeutsche Hochfinanz 1350-1450, Wiesbaden, 1970. Ces fonds secrets provenaient de l’agiotage créé par l’écart entre les recettes en monnaie-or (comme les recettes de l’impôt direct, le Losung) et les comptes et paiements effectués en monnaie-argent. Ces gains n’étaient pas enregistrés, mais on connaît quelques-unes des dépenses effectuées par les trésoriers à l’aide de ce fonds. Il servait, outre les prêts secrets du conseil, à des dépenses administratives : des cadeaux et gratifications aux plus éminents conseillers et officiers, les repas festifs donnés au sein du conseil lors de l’élection des nouveaux conseillers, à la Pentecôte et à la reddition des comptes, les collations prises par les trésoriers…
Le « Liber cum januis », traduction latine erronée de Buch mitt’ den Thüren (livre entre les deux portes, accroché entre les deux portes qui séparaient la chambre du trésor de la perception, cf. StAN, Amts- und Standbuch n°269) mentionne sporadiquement des dépenses issues des fonds secrets et des fonds généraux de la ville, entre 1425 et la guerre margraviale. Une liste tirée d’un deuxième livre perdu, qui recoupe le premier à partir de 1448 et va jusqu’en 1460, détaille des prêts accordés sur les fonds secrets à des princes, sires, villes amis et intermédiaires financiers. Elle recense 70 postes de dépenses allant de 3 florins à 6000 florins, pour un montant total de 33 425 florins et 300 livres. Cf. fol. 133 à 134 v.
L’aide allait peut-être plus loin. Pour certains cas, en l’absence de recouvrement de l’argent investi, il est probable que le conseil dédommageait les financiers sur les fonds secrets.
Parmi les noms figurent par exemple Franz Rummel, Hans Rummel, Franz Volkmeir, Hans Teufel et Ulrich Ortlieb, le bourgmestre Hans Tetzel, Jacob Topler, Peter Volkmeir, Peter Haller, Peter Rieter, Peter Steinberger, Paulus Vorchtel, Sebald Schürstab, le messager nurembergeois Fritz Tirolt, , les agents nurembergeois Hans Erlbeck, Hans Ulmer, Hans Grefenöder, Niklas Griess, Peter Heidenaber, Peter Weineugel, les secrétaires nurembergeois Hans Dummen et Jobst Kappfer, l’ancien secrétaire municipal et procureur, Johann Marquard, le traducteur Johannes Dürrschmid, les docteurs Johann Heck, Johann Lochner et Johann Zenner.
Le livre répertorie aussi plusieurs prêts ou avances consentis dans le cadre de campagnes militaires à des Büchsenmeister. Des paiements au roi Sigismond sont en outre indiqués.
La liste ne restitue pas ici l’ensemble des villes indexées dans le répertoire de l’ouvrage. Des prêts apparaissent aussi au fil des Briefbücher. Ainsi dans le StAN, BB 27, fol. 209, un prêt à la ville de Schwäbisch Gmünd. Il y est question d’une dette de 200 florins contractée par Gmünd auprès de Nuremberg, dont un remboursement a été repoussé jusqu’à la saint Michel. Le samedi suivant le 28 octobre 1457, le dû n’ayant toujours pas été versé, Nuremberg en réclame à nouveau le paiement (fol. 251v)
On trouve de fait dans ce livre de créances à l’actuel fol. 203 la remarque suivante sous la rubrique « Weissemburg : Ceux de Wissembourg nous sont encore redevables de 165 florins landswährung 4 lb alt 28 dn
Note : ils ont envoyé au conseil une missive à ce propos et reconnaissent ladite dette anno 1461 ».
La vérification dans les Briefbücher est impossible puisque le volume correspondant à l’année 1461 est manquant. Mais la dette reconnue en 1461 coïncide peut-être avec celle que l’on relève dans le Briefbuch n°27, en 1457. Cf. StAN, BB 27, 191v et 215v.
Voir Paul Sander, Die Reichsstädtische Haushaltung Nürnbergs, Leipzig, 1902, p. 686-687. Les autres prêts indiqués dans les comptes de 1431-1440 allèrent au margrave Frédéric de Brandebourg junior (800 florins en 1439, soit 880 livres) ; au chancelier Caspar Schlick (2 000 florins, soit 2 200 livres), au sire de Plauen (300 florins, soit 330 livres) et à plusieurs autres particuliers moins notoires.
Voir Paul Sander, Die Reichsstädtische Haushaltung Nürnbergs, Leipzig, 1902, p. 686
Nuremberg prêta en 1430 au roi Sigismond 9 000 florins pour le rachat des deux villes d’Heidingsfeld et Bernheim jusque-là mises en gage. Les deux cités furent concédées en retour à Nuremberg qui en percevait les cens et les droits. Sur les 9 000 florins, 6 100 florins Landswährung (soit 6710 livres ) allèrent à d’anciens détenteurs de droits sur les deux cités : 2 000 florins au sire de Rosenberg, 4 100 florins à Balthasar et Sigmund von Thüngen.
Cette mention issue des comptes municipaux de 1431-1440 corrobore l’index du Liber cum januis, qui renvoie aux folios 39 et 53 à propos de Heidingsfeld et Mainbernheim. Voir plus haut
Des intérêts sont de fait versés en 1433. Ils s’élèvent pour Heidingsfeld à 203 florins Landswährung 4 sch. 8 dn et pour Bernheim à 151 florins Landswährung 12 sch.
En 1434, sont respectivement inscrits pour Heidingsfeld 101 florins Landswährung 13 schilling 4 dn et pour Mainbernheim 50 florins Landswährung 16 schilling 8 dn.
En 1435 et 1436, Bernheim est la seule à servir des intérêts de 135 florins Landswährung à chaque fois.
En 1440, Heidingsfeld verse à son tour 131 florins Landswährung au titre des intérêts.
Cf. StAN, BB 18, fol. 79v (1446)
Cf. StAN, BB 18, fol. 97
Cf. StAN, BB 18, fol. 122 (19/12/1446)
Cf. StAN, BB 18, fol. 136v
La date de 1443 est peut-être erronée. Ne s’agit-il pas plutôt de 1453 ? En effet, la dette de Donauwörth est sujet de négociations plusieurs fois en 1453-1454. Elle est évoquée dans les registres de lettres reçues par Nuremberg. Cf. Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997, n° 4402, n° 5040 : « Une réponse de Werde, à propos de nos créances », n° 5063 : « une réponse de Werde, à propos des créances dont ils nous restent redevables », n° 5377 : « Une réponse de Werde (Donauwörth) à propos du paiement de notre créance ». Voir aussi les lettres envoyées par Nuremberg : StAN, BB 23, fol. 228 (25/05/1453), BB 24, fol. 127 (23/01/1454), fol. 129-129v (29/01/1454), fol. 201-201v (24/05/1454)
Cf. StAN, Amts- und Standbuch n° 269 (liber cum januis), fol. 196 (ancienne pagination)
Jörg Spengler disposait vers 1500 d’une fortune d’environ 3 000 florins. Originaire de Donauwörth, il devint secrétaire de chancellerie à Nuremberg après son entrée dans la bourgeoisie nurembergeoise en 1464. Il accéda au poste de secrétaire du conseil en 1480. Marié en 1468 à Agnès la fille de Daniel Ulmer, il eut pour fils Georg, Daniel, et Lazarus, le futur réformateur, qui devint lui aussi secrétaire du conseil nurembergeois.
En dépit de ses activités de chancellerie, Jörg garda des contacts avec le monde du commerce, que semble davantage représenter son frère Urban Spengler. Voir Helmut Haller von Hallerstein, « Grösse und Quellen des Vermögens von hundert Nürnberger Bürgern um 1500 », dans Beiträge zur Wirtschaftsgeschichte Nürnbergs, p. 117 et s. ; de même que H. von Schubert, Lazarus Spengler und die Reformation in Nürnberg, Leipzig, 1934 ; J. Ohlau, « Neue Quellen zur Familiengeschichte der Spengler », MVGN 52 (1963/1964), p. 232 et s.
Heinrich Wolff est originaire de l’élite de Nördlingen. Il devint bourgeois nurembergeois en 1469. Il figure parmi les Genannten à partir de 1475 et appartint au petit conseil de 1499-1502. Il fut ensuite Ancien Genannter de 1502 à sa mort en 1504. Une liste des plus grosses fortunes nurembergeoises établie par Christoph Scheurl (père) vers 1500 le situe dans le groupe le plus aisé, disposant d’une fortune de 100 000 florins. La société commerciale des Wolff couvrait un secteur qui allait jusqu’aux Pays-Bas, l’Italie et la Pologne. Elle pratiquait le commerce de multiples marchandises, mais son activité principale se concentrait sur le commerce et la production métallurgique : plomb, argent. Heinrich Wolff perdit l’essentiel de sa fortune après 1494 dans l’exploitation d’une mine d’argent.
Le parcours de Jörg Spengler et de Heinrich Wolff confirment l’utilisation par le conseil nurembergeois des liens familiaux créés par les élites nouvellement incorporées à la ville. Ces nouveaux venus étaient tout désignés pour servir d’agents de l’intercommunalité et jouer les facteurs entre leur ville d’origine et la capitale franconienne. Voir aussi chapitre sur les acteurs de l’intercommunalité.
Cf. Helmut Haller von Hallerstein, « Grösse und Quellen des Vermögens von Hundert Nürnberger Bürgern um 1500 », dans Beiträge zur Wirtschaftsgeschichte Nürnbergs, p. 117 et s.
Hans Pirckheimer quitta lui aussi la ville de Donauwörth pour s’installer à Nuremberg. Au début de l’année 1457, le conseil de Donauwörth écrivit en effet à celui de Nuremberg au sujet de son Nachsteur (taxation relative à l’abandon du droit de bourgeoisie du lieu) à Donauwörth. Cf. Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997, n° 8173
Le « livre entre les deux portes » signale les versements suivants :
200 florins Landswährung de Hans Kürsner pour ceux de Werde sur les 1 820 florins dus (1472)
66 florins Landswährung payés par Hans Pirckheimer au nom de ceux de Wörth à cause de leurs intérêts
200 florins payé par Jörg Spengler, secrétaire de chancellerie, au nom de ceux de Wörth pour la dette susdite (1474)
200 florins payés par Lorenz Püchen ( ?) de Werde au nom de ceux de Wörth pour la dette (1475)
200 florins payés par Michel Imhof et Urban Spengler de Wörth pour la dette (1476-1477)
200 florins payés par Urban Spengler (1477- 1478)
200 florins payés par H. Wolf (1478-1479)
200 florins payés par H. Wolf (1479-1480)
200 florins payés par Urban Spengler (1481)
200 florins payés par Görg Spengler sur recommandation de Urban Spengler son frère au nom de ceux de Wörth (1482)
200 florins payés par Urban Spengler pour ceux de Wörth (1483)
Cf. StAN, Amts- und Standbuch n° 269, fol. 209 (anciennement fol. 196)
L’homme ici mentionné comme changeur figure dans d’autres sources, dont les comptes municipaux, parmi les messagers de Nuremberg. Son nom est en outre inscrit dans l’index du « livre entre les deux portes ».
Voir chapitre sur les acteurs de l’intercommunalité, § sur les agents municipaux.
La somme prêtée à Schweinfurt ne figure pas dans les comptes officiels de la ville de Nuremberg. Mais elle n’en provient pas moins des fonds secrets de la ville de Nuremberg. Le prêteur officiel était Conrad Baumgartner,
Les interventions de Conrad Paumgartner dans le domaine de la haute finance ne manquent pas. En 1431, Conrad Paumgartner, associé à Hans Rummel et Ulrich Ortlieb, prêta au roi Sigismond la somme considérable de 8 000 ducats, soit 9 960 florins. En 1439-1444, il intervint aussi aux côtés de Peter Steinberger dans le financement de la guerre contre Louis de Bavière-Ingolstadt. Cf. Wolfgang von Stromer, Oberdeutsche Hochfinanz 1350-1450, Wiesbaden, 1970
Cf. StAN, BB 18, fol. 21v (même lettre à Tachau pour un prêt de 200 florins). Voir aussi pour Tachau, StAN, BB 18, fol. 338. Il est à nouveau question de dettes contractées par Pilsen et Tachau en 1452. Cf. Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997, n° 3933 : « Item une réponse de Pilsen à propos de notre créance / De même de Tachau » (entre le 22 novembre et le 20 décembre 1452). Voir aussi StAN, BB 23, fol. 77v (06/11/1452 : lettre de réclamation de Nuremberg aux deux villes).
Cf . Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997, n° 370, n°459, n°501, n°814, n°1402.
Voir la réponse de Nuremberg 4 jours plus tard, dans StAN, BB20, fol. 169v-170 (18 septembre 1449). De même que le fol. 311 (19/12/1449) en réponse au n° 814 : « Item une lettre amicale de Pilsen à propos de nos soucis de la guerre et aussi sur la façon dont les margraves se présentent (sich bewerben) dans le pays de Bohême. Inversement, Nuremberg demande ou obtient des nouvelles de la Bohême et de la guerre de Meissen, au vu des n° 1563, 1633, 1745, 3278, 4727. Cf. Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997
Cf. Rübsamen n° 3933 ; StAN, BB23, fol. 77v. Idem à Tachau /
Cf. UB Windsheim n° 227
Pour s’en assurer vraiment, il faudrait, outre le « liber cum januis », retrouver dans les archives les contrats de dettes rédigés entre villes. Ce constat ne peut être définitif qu’après avoir eu connaissance des clauses négociées par Nuremberg en cas de non-remboursement de la somme prêtée. Quels étaient les garants et les hypothèques consentis ?
Dans le cas des relations entre Nuremberg et Pilsen, il faudrait ainsi s’assurer des circonstances qui ont pu amener à la liberté douanière contractées entre les deux villes, tardivement, en 1499. Est-ce simplement la résultante des relations amicales et commerciales attestées au cours du XVe siècle ? Les dettes contractées par Pilsen auprès de Nuremberg n’ont-elles pas pesé un peu dans la balance pour l’obtention de tels droits ?
Les relations entre Nuremberg et les deux cités seraient sans doute très riches d’enseignements, d’autant que les archives concernant les trois localités sont relativement bien conservées. L’étude serait alors à mener de la veille de l’engagère, dans les années 1420 jusqu’à la fin du XVe siècle. Voir aussi StAN, BB26 et BB 27, en particulier le folio 95v-96 : Lettre à Augsbourg, Ulm, Esslingen, Nördlingen, Rothenbourg, Dinkelsbühl, Windsheim, Wissembourg, Bopfingen.
Cf. StAN, BB 18, fol. 329v : Lettre de Nuremberg à Wernher von Parsberg, écoutête de Nuremberg : « Vous nous avez écrit et vous avez répondu à notre dernière lettre à propos du bourgeois prisonnier de ceux de Tachau, sachant que Friedrich von Parsberg votre fils retient ce même prisonnier etc. Nous en avons pris bonne note. Vous comprenez bien qu'il nous appartient de répondre au burgrave et au conseil de Tachau sur la base de votre lettre à ce sujet. Si nous devions leur répondre aussi brièvement que votre susdite lettre le fait, alors que nous ne connaissons pas les revendications de votre fils, nous devons nous soucier du fait que cela puisse tourner en notre défaveur à vous et à nous. C'est pourquoi nous vous demandons de bien vouloir faire votre bonne volonté et votre zèle en la matière pour que ce pauvre prisonnier soit relâché sans caution etc. Ecrivez nous aussi exactement la situation de l'affaire et les revendications de votre fils en même temps que votre réponse favorable à propos du prisonnier par ce même messager, pour que nous sachions ensuite comment répondre à ceux de Tachau. »
Cf. StAN, BB 18, fol. 338 (07/09/1447) : lettre à Tachau
Cf. StAN, BB 18, fol. 212v. Voir aussi fol. 222v : lettre à Andres Punzinger.
Cf. Paul Sander, Die Reichsstädtische Haushaltung Nürnbergs, Leipzig, 1902, p. 531 et s.
En mars 1452, dans une lettre à Nuremberg, Donauwörth confirme à sa correspondante son souhait de rester dans l’empire. Cf. Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997, n° 3169.
Voir chapitre sur les institutions intercommunales
Voir liste des lettres reçues dans Rübsamen Dieter (éd.), Das Briefeingangsregister des Nürnberger Rates für die Jahre 1449-1457, Sigmaringen : Thorbecke, (Historische Forschungen, 22), 1997, index p. 619, et autres autres StAN, BB26 (1456)
Cf. UB Windsheim n° 428 et n°429
Les créances détenues par les juifs de Nuremberg et ainsi récupérées par la ville impériale s’élevaient au total à une somme de 80 986 florins, dont 19 000 furent versés au roi. Lors de la mise en recouvrement de ces créances, et à l’encontre des interdictions du prêt à intérêt, les villes en conservèrent souvent les taux d’intérêt élevés et les mirent à leur profit.
L’opération affaiblit les juifs, sans pour autant les ruiner. Elle ne s’inscrit donc pas dans la même lignée que la confiscation des biens juifs orchestrée à Nuremberg en 1349, qui permit aux Nurembergeois de s’arroger des parcelles et des maisons en plein centre ville, puis de mener une opération d’urbanisme (marché, église saint Laurent) à l’emplacement de l’ancien quartier juif.
Parmi les débiteurs des juifs nurembergeois figurait à l’époque l’essentiel de la petite et grande noblesse de Franconie et de Bavière.
Cf. Friedrich Stein, Monumenta Suifurtensia historica, Schweinfurt, 1875, n° 235, 238 : « On nous a rapporté et informé exactement du fait que les honorables (ersamen) croisés (creuziger) de l’ordre teutonique ont une maison auprès de notre ville impériale de Schweinfurt et établie dans son territoire (marckt, markung) qui a été pendant longtemps un couvent (closter) et qu’ils détenaient au titre de couvent, mais qu’ils ont renforcée avec des tours et autres constructions et ils en ont fait un fort (Burg) et ont supprimé le couvent et le service divin du lieu, et ont peuplé et occupé la maison, qui devrait être un couvent, de laïcs et d’officiers et ils tiennent aussi des tribunaux (Gerichte) sans notre permission et avis dans ce même couvent où le jugement et les serments se font contre les anciens us et coutumes, car ce même couvent et ses gens et biens relèvent de notre Landgericht et de celui de l’empire à Schweinfurt… » Le roi demanda une révocation immédiate des mesures prises par l’ordre et une destruction des édifices illicites, sous peine de 20 mark or, payables pour moitié au trésorier impérial et pour moitié à la ville de Schweinfurt. Le document n° 235 prolonge cet interdit en proscrivant les constructions menaçantes et les places fortes à moins d’une Meile de la ville (environ 7,5 km).
Cf. Privilège accordé par Sigismond dans le cadre de la Tierce Allemagne, le 5/11/1427, permettant à Schweinfurt de s’allier avec les amis de l’empire qu’elle voulait, puisqu’elle était trop éloignée des autres villes d’empire. Monumenta Suifurtensia historica, n° 239. Outre les paix conclues par la suite avec des membres de la chevalerie franconienne, Schweinfurt mit ce privilège à profit en 1435 en scellant un contrat d’alliance avec le comte Wilhelm de Henneberg contre l’ordre teutonique, en cas de guerre. Cf. MSH n° 265
Dès 1427, le conseil de Schweinfurt semble avoir cherché à s’accaparer une partie des revenus juifs. L’évêque Johann de Würzbourg promulgua en effet le 2 mars 1427 un contrat entre lui et le conseil à propos des juifs de Schweinfurt. Cf. Friedrich Stein, Monumenta Suinfurtensia Historica, Schweinfurt, 1875, n° 234. Pour les privilèges concédés en 1429-1430, voir n° 240, 241, 242. A ces privilèges touchant les Juifs, s’ajoutèrent des privilèges de nature judiciaire, comme la confirmation de la détention du Blutbann par le conseil, et le libre choix de l’Amtmann.
Cf. Friedrich Stein, Monumenta Suinfurtensia Historica, Schweinfurt, 1875, n° 255, 264, 270, 271, 274
Cf. Friedrich Stein, Monumenta Suinfurtensia Historica, Schweinfurt, 1875, n° 267
Si le prix d’achat des biens reste conséquent, cela permet à la ville d’échelonner les sorties d’argent et de verser peu d’argent liquide au moment de la vente elle-même.
Mais ne s’agirait-il pas plutôt de Hans Tetzel ? Jeune bourgmestre jusqu’en 1430, il fait preuve de ses capacités financières en 1427 lors du rachat des droits et du château burgraviaux par la ville de Nuremberg. Il apparaît alors qu’il avait prêté au margrave 7 000 florins Landswährung en compagnie de Stefan Coler, Ulrich Ortlieb, Jörg Stromer, Conrad Pfinzing et Konrad Kress. Il devint ancien bourgmestre après 1430 et était maître de quartier. A partir de 1432, il revêtit une des fonctions les plus élevées au conseil, celle de commandant en chef (Oberster Hauptmann). Dès 1436, s’y ajouta l’office de maître du grain (Kornmeister).
Une rente viagère de 30 florins allait à son fils Heinz et à sa fille Anna ; 20 florins allaient à ses fils Jörg et Sebald ; 20 autres florins revenaient à ses fils Heinz et Paul. Cf. Helmut Winter, « Der Rentenkauf in der freien Reichsstadt Schweinfurt », Mainfränkisches Jahrbuch 22 (1970), p. 129. Voir Stadtarchiv Schweinfurt U 217 ; et Monumenta Suinfurtensia Historica n° 277. Une autre vente importante de rente perpétuelle est émise par Schweinfurt en 1438 au profit de Hans et Anna Schultheiss pour un capital de 1 000 florins contre le versement d’une rente annuelle de 50 florins (taux de la rente de 5%), payable à Nuremberg pour moitié le 1er mai et pour moitié à la saint Martin.
Rothenbourg, Windsheim et Dinkelsbühl avancèrent ensemble la somme de 6000 florins. Les quatre villes restantes fournirent 9 000 florins. Voir Stadtarchiv Rothenbourg A 198, fol. 2 ; UB Windsheim n° 397
Le prêt s’accompagnait aussi de conditions politiques. Les seigneurs de Hohenlohe durent garantir leur neutralité aux villes prêteuses, alors même que l’animosité croissait entre les villes de la ligue urbaine souabe et les princes.
Voir Jürgen Uwe Ohlau, Der Haushalt der Reichsstadt Rothenburg ob der Tauber in seiner Abhängigkeit von Bevölkerungsstruktur, Verwaltung und Territorienbildung (1350-1450), Dissertation Univ. Erlangen, 1965
Voir Stadtarchiv Rothenbourg, Fonds Leibgedings- und Ewiggelquittungen,
bourgeois de Spire : Urkunden n° 20, 32, 33, 34, 36, 39 à 44, 46 à 60
bourgeois de Mayence : Urkunden n°23, 24, 25, 26 à 29
Par des rachats de rentes perpétuelles et le jeu de l’extinction des rentes viagères, la ville de Rothenbourg parvint à réduire considérablement les créances tenues par des habitants de Worms et de Mayence dans la première moitié du XVe siècle. Les détenteurs de titres issus de Spire restaient cependant très présents, tandis que de nouveaux spéculateurs s’étaient introduit dans le capital de la ville, à l’image des Nurembergeois et des Augsbourgeois.
Cf. Stadtarchiv Rothenbourg, A 1268 (Steuer und Schatzungsbuch), fol. 52 et 52v.
Sur cet épisode, voir G. Wunder, « Das Kondominium der drei Reichsstädte Rothenburg, Hall und Dinkelsbühl in Kirchberg an der Jagst 1398-1562 », Jahrbuch für fränkische Landesforschung 34/35 (1975), p. 751-785 ; Voir aussi Ludwig Schnurrer, « Schwäbisch Hall und Rothenburg. Die Nachbarschaft zweier Reichsstädte in der Geschichte », Württembergisch Franken 65 (1981)
Honhardt fut racheté par la seule ville de Schwäbisch Hall
Cf. Stadtarchiv Rothenbourg, Missivenbücher n° 216 à 221