La période choisie pour l’étude correspond à ces dix années de mise en place de la politique de ’renouveau’ : 1988 - 199815.
Le Viêt Nam est actuellement toujours dirigé par un gouvernement à idéologie communiste. Le Parti communiste vietnamien a la particularité de s’être formé à la fois sous la tutelle du communisme soviétique, mais au sein d’un territoire à la culture très marquée par les apports chinois. Alors que de par le monde, tous les gouvernements à idéologie communiste18 se sont transformés avec plus ou moins de bonheur et tentent de s’équilibrer après l’apparition de l’économie de marché sur leur territoire, Jean Luc Domenach et François Godement19 posent la question de la vivacité des communismes d’Asie, qui loin de s’effondrer se transforment et conjuguent avec le capitalisme. La réponse qu’ils esquissent met l’accent sur l’avènement du communisme en Asie à l’issue de guerres de résistances nationales et de l’importance donnée à la paysannerie, et non seulement aux ouvriers comme dans les communismes plus occidentaux. Mais l’impossibilité constante que j’ai ressentie à pouvoir identifier, à l’intérieur des modes d’actions vietnamiens, les références aux influences anciennes de la tradition confucianiste ou aux mises en pratiques de l’idéologie communiste me posent la question de la pré-adéquation de ces sociétés anciennes au communisme, ou du moins de la possible transposition par interprétation des antécédents d’une société confucéenne. Sans avoir les moyens de répondre au fondement de cette interrogation, il est par contre possible d’apporter des éléments de réponses à l’aide des différents exemples et attitudes relevés.
Tous ces changements, évolutifs ou par ruptures, conduisent à aborder la légitimité du gouvernement et de ses représentants. Au Viêt Nam, celle-ci est d’abord issue de la guerre révolutionnaire qui a abouti à l’indépendance. La légitimité du gouvernement est donc avant tout nationaliste. L’hypothèse avancée est alors qu’afin de préserver la légitimité du gouvernement et de ses dirigeants, la Nation est élevée au-dessus de l’Etat. Ce manque de pouvoir donné à l’Etat est-il une des particularités des gouvernements à idéologie marxiste-léniniste, alors que Jacques Sapir20, citant Claudio Ingelform, constate que la caractéristique principale de la culture Russe, n’était pas le sur-développement de l’Etat, mais au contraire, son inexistence en tant qu’instance séparée de qui exerce directement le pouvoir ?
La tutelle exercée par le communisme soviétique sur le communisme vietnamien et ses dirigeants se traduit par la mise en place d’une organisation hiérarchique pyramidale que dirige sans partage les responsables du parti communiste. La propension au clientélisme est régulièrement relevée dans le fonctionnement de tels systèmes qui pratiquent la planification décisionnelle. Et comme le soulève Jacques Sapir :
‘’un élément à prendre en compte est le fait que l’autorité, dans un tel système, n’est donc pas rattachée à la fonction mais à la personne. D’où l’importance décisive des réseaux d’alliances et de connaissances entre les individus. On est ainsi en présence d’un système de ’clans’, en lutte perpétuelle pour développer la sphère de leurs compétences .../... La contrepartie de ce pouvoir est que les compétences professionnelles sont facilement sacrifiées sur l’autel des amitiés personnelles et que toute décision devient immédiatement contestable.’21 ’Si dans le relationnel vietnamien, une organisation du pouvoir par ’clans’ est également relevée22, j’avancerais qu’il s’agit plus d’un fonctionnement par réseaux, en liaison avec le contexte culturel propre au Viêt Nam où la communauté familiale (comprise dans son sens large de lignée patronymique) se conjugue avec les alliances pour reconnaissances.
J’utilise ce terme en référence à l’ancienne Europe pour désigner de manière globale les ressortissants issues de nations occidentalisées (Etats-Unis, Canada, Australie, etc. compris). Ils sont aujourd’hui les principaux instigateurs et gestionnaires (il conviendrait de rajouter le Japon) de l’économie mondiale qui accordent aides ou sanctions aux pays moins développés (en référence à cette économie).
Cuba reste certes un cas à part marqué par la personnalité de Fidel Castro.
J.L. Domenach, F. Godement (Dirs.) - 1994.
J. Sapir - 1996 - Le chaos russe - p. 160.
J. Sapir - 1996 - Le chaos russe - p. 195
S. Rouziès - 1996.