III - 1 LES PREMIERS COLLECTIFS

Les premiers logements collectifs identifiables à Saigon ou Cholon, toujours présents à Hô Chi Minh Ville, sont un intermédiaire entre la maison en bande et l’immeuble collectif. Construits par de petits promoteurs à destination d’une population vietnamienne ou chinoise, ils reprennent physiquement les références du compartiment chinois et présentent des façades sur rue similaires. Ils sont de fait souvent identifiés comme un ensemble homogène, loti, de ceux-ci. Mais une cellule fonctionnellement indépendante correspond à chaque trame de chaque niveau. Les premiers comportent un seul étage, voire deux pour les moins anciens.

Construites exclusivement en bordure de voie, les cellules du rez-de-chaussée sont dédiées au commerce, mais l’arrière boutique ou une adjonction sert d’habitation. Celles de l’étage sont distribuées par une coursive, sur rue ou sur cour, accessible par un escalier situé généralement au centre de l’ensemble. Construits par des promoteurs, premiers petits investisseurs immobiliers à Saigon, ces bâtiments peuvent être considérés comme les premiers immeubles 173 de rapports.

Par leur homogénéité ces ensembles ont marqué le paysage urbain et leur qualité architecturale est indéniable. Mais leurs particularismes qui leur interdisent une densification les condamnent à très court terme, comme l’attestent les documents de planification et certaines démolitions.

En effet, production exclusivement coloniale et urbaine, ils se situent dans des quartiers devenus depuis les deux centre-villes. Peu élevés et traversants (les compartiments n’ont qu’une étroite façade sur rue, tout le reste est aveugle), ils ne rentabilisent pas un sol devenu rare. D’un fonctionnement collectif, ils sont une propriété collective et ne permettent pas une densification, par surélévation ou reconstruction, comme les compartiments. Enfin, à la réunification du Viêt Nam, l’Etat devenu propriétaire les a loués mais jamais entretenus. Construits pour la majeure partie entre 1890 et 1920, certains sont aujourd’hui à la limite de l’effondrement. Cette typologie, très caractéristique, ne correspond plus aux contraintes actuelles des constructions urbaines de l’hypercentre et, par dégradation ou par programmation, va tendre à disparaître.

Notes
173.

Je n’emploierais le terme immeuble que dans le sens ’grand bâtiment urbain de plusieurs étages’. Mais ici l’expression ’immeuble de rapport’ l’emporte. Ceci dit, si ce sens ne correspond pas aux premiers bâtiments collectifs d’un seul étage, c’est en rapport d’une part à leur faible hauteur, mais surtout à cette division verticale de la façade qui fait référence plus à un ensemble homogène qu’à une unique construction.