C’est un personnage plus libre, puisqu’elle ne fait pas partie d’une administration, mais plus énigmatique aussi. Elle intervient actuellement pour plusieurs organismes occidentaux dans le cadre de projets et d’études sur des quartiers d’habitat précaire et spontané. Elle organise dans ce cadre des actions d’information avec l’aide de partenaires sociaux qu’elle forme au préalable, sur les terrains concernés.
Sa carte de visite en anglais lui donne pour statut ’social development consultant’. Le coté vietnamien indique : ’Dr. en développement communautaire, vice-présidente de l’association des sciences de psychologie et de l’éducation’283. Madame Oanh, qui a plus de soixante ans, est donc une intellectuelle non seulement reconnue par le système, mais garante de son orthodoxie et qui travaille à son compte.
Si l’on considère que les médecins n’ont le droit d’exercer à leur compte que s’ils pratiquent, en temps que fonctionnaires d’état, un certain nombre de demi-journées par semaine à l’hôpital. Il est possible de faire un parallèle avec le poste de professeur d’université de madame Du. C’est a priori pour elle le moyen de participer à l’oe uvre éducative, ce qui lui permet ensuite de disposer de liberté. L’exemple de madame Oanh me permet de généraliser. Ces femmes qui ont une reconnaissance au sein des institutions gouvernementales peuvent se permettre d’exercer à leur compte sans être considérées comme un acteur privé, puisqu’elles sont accessibles par le biais de la machine administrative.
Ainsi, au niveau de l’individu, la limite entre l’acteur public et l’acteur privé peut prendre différentes formes, même si la différence entre un fonctionnaire et un salarié ou une profession libérale est en soi évidente. En ce qui concerne les organismes, la qualification d’intérêt public s’efface derrière la distinction faite entre organisme d’état et organisme privé.