Au Viêt Nam, au moment où le Parti communiste vietnamien, prend la tête du pouvoir et intègre l’Internationale communiste, ce sont les outils produits par un débat avorté, un débat occidental auquel il n’a jamais pris part, qui sont appliqués à travers les coopérations. Les maîtres mots du communisme restent alors : propriété collective, collectivisation, socialisation de la production, mais surtout planification. C’est ici que se concrétise une interprétation des modernes, de leur démarche qui se voulait rationnelle : la séparation des fonctions pour une ville fonctionnelle, une construction rationnelle332.
Toutes les questions sur le contenu des fonctions se retrouverons au sein du master plan d’Hô Chi Minh Ville, à travers la définition des ’secteurs d’habitat’. Pour appréhender le sens donné à ces secteurs, il sera nécessaire de faire une différence entre fonction, activité et usage.
Donc, avec pour toile de fond une image de la modernité et l’industrialisation du pays pour rattraper le ’développement’ des pays riches, l’urbanisme au Viêt Nam se met en place à travers des échanges333 et des coopérations. Si l’adhésion du Viêt Nam au Comecon est ratifiée officiellement en 1978334 (en plein conflit vietnamo-chinois au sujet du Cambodge), la coopération avec l’U.R.S.S. est dans les faits ancienne. D’un intérêt défensif évident, elle est aussi complétée par des projets économiques à long terme qui se traduiront au Viêt Nam par de grands travaux autour des problèmes énergétiques. Depuis, les pays membres du Comecon, tels la Tchécoslovaquie ou l’Allemagne de l’Est, ont assuré des formations et l’U.R.S.S. reste le principal conseiller du Viêt Nam.
Dans ce cadre de coopérations, un premier master plan pour Ha Nôi est étudié et dessiné dès les années 1970 au Centre de recherche scientifique pour l’urbanisme et la construction de Leningrad, il est approuvé à Ha Nôi en 1982. Hô Chi Minh Ville devra attendre 1993 pour voir son premier master plan validé, presque un an après l’approbation du deuxième de Ha Nôi.
A partir de 1986, Hô Chi Minh ville a également un master plan à l’étude en coopération avec l’Institut d’urbanisme de Leningrad. La nouvelle politique d’ouverture décidée lors du VIème congrès et la fin de l’aide soviétique à partir de 1991 ont sonné le glas de la coopération entre les deux pays, du moins telle qu’elle s’était établie. Dean Forbes et Lê Hong Kê335 soulignent l’inadaptation du plan réalisé à Leningrad à la conjoncture vietnamienne de Ha Nôi et qui fut ignoré, mais également le fait qu’il a tout de même servi de base au suivant. Les mêmes remarques sont valables pour celui de Hô Chi Minh Ville.
Si les plans de planification peuvent être remis en cause aussi souvent que le souhaite le gouvernement, il reste de cette coopération la formation qu’ont reçue les architectes et les ingénieurs qui sont aujourd’hui aux postes de pouvoir336, formations qui ont continué dans les différents pays frères, pour les plus brillants élèves. Pour l’architecture par exemple, Prague était une destination courante.
A ce titre, il faut citer les tentatives de création de modèles mathématiques, dans les années 1960-1970, au moment où l’urbanisme est voulu science. Se reporter pour exemple au rapport des recherches urbaines Franco-soviétiques de 1972 : Modèles mathématiques de répartition des populations urbaines - Institut central de recherche scientifique et d’études sur l’urbanisme (Moscou), Centre de recherche d’urbanisme (Paris) - Paris : imprimé par le Centre de recherche d’urbanisme - 1974 - 229 p.
En 1996, le Cabinet de l’Architecte en chef comptait environ 53 personnes : 46 d’entre-elles ont suivi leurs études au Viêt Nam, 4 en Europe de l’Est et 3 en Chine [L. Nguyên - 1998 - p. 148].
Le 28 juin 1978, le Viêt Nam adhère au Comecon, en novembre de la même année, les secrétaires généraux et premiers ministres du Viêt Nam et de l’URSS signent un ’traité d’amitié et de coopération’ pour vingt cinq ans, puis des accords complémentaires sont signés en 1981.
D.Forbes, Lê Hong Kê - 1996 - pp. 85-86 : ’However, the complemented plan was never implemented. It was designed on an overly ambitious scale, required far more land than could have been achieved, and had the characteristics of Russian, not Vietnamese, planning style. it suggested a lack of familiarity with economic conditions and ways of life in Vietnam. The plan was therefore largely ignored. There were a number of principles which provided the foundations for the préparation of the 1990 master plan.’
Lê Van Nam, Architecte en chef de H.C.M.V. aurait une formation d’ingénieur civil effectuée en Chine.