IV - 4 PETITES RUES ET IMPASSES RESIDENTIELLES

Mais il ne faut pas associer de manière systématique et équivalente le terme de ruelle avec celui d’habitat précaire. Car il s’agit aussi d’un mode de vie, un type d’organisation de l’espace. Il est certain que la largeur de la ruelle est déterminante pour le type d’habitat qu’elle abrite, nous verrons plus loin qu’en ce sens, le développement du quartier de la marine est étonnant. L’îlot du K.P.5 P.5 Q.5 est situé en centre ville, dans un arrondissement ancien, dense, mais dès que l’on s’éloigne de ces secteurs très centraux, l’habitat s’organise aussi le long d’impasses595, de larges ruelles ou de petites rues dont la largeur avoisine les huit mètres. Les plus agréables à habiter sont celles dont la situation à l’écart des itinéraires de dessertes les protège des flux agressifs de la circulation. Certains coe urs d’îlots sont alors très recherchés.

message URL p374.jpg

Ces tissus là sont caractéristiques de l’habitat à Hô Chi Minh Ville, tout comme l’habitat résidentiel qu’ils abritent. Nulle part ailleurs en Asie du Sud-Est je n’ai retrouvé cet archétype urbain systématique. Il peut être comparé à certains quartiers résidentiels de Jakarta, mais les compartiments n’y sont pas l’habitat traditionnel qui s’organisait à l’intérieur de maisons non mitoyennes à patios. Et la densification de la ville n’a pas imposé la mitoyenneté du compartiment mais un étalage urbain. De ce que je connais, les kampung centraux denses, dont l’habitat n’est pas toujours salubre, ne se sont pas densifiés en refermant l’espace ainsi. L’habitat développé le long des soï centrales de Bangkok peut être verdoyant dans le cas de maisons avec jardins non mitoyennes, alors que le développement constaté des compartiments, au centre d’hyperblocs596, est issu de lotissements déjà anciens. L’architecture y est alors minérale et l’ambiance austère : l’échelle des îlots et des impasses de Hô Chi Minh Ville n’est en rien comparable à celle des hyperblocs et des soï de Bangkok.

L’impasse est souvent interprétée négativement, or elle n’est pas nécessairement synonyme d’isolement. Elle est aussi vécue, dans le cas de quartiers résidentiels en terme de sécurité et de tranquillité. Ces valeurs dépendent d’abord de quel coté l’on se place et ensuite de l’échelle des quartiers desservis, comme de la voie elle-même. A Hô Chi Minh Ville, beaucoup d’impasses ou de petites rues offrent tout à la fois intimité et perméabilité.

Mais encore une fois, les règlements eux-mêmes, poussent à un amalgame.

message URL p376.gif
Notes
595.

cf. photos p. 372 [ruelles larges] et p. 374 [ruelles résidentielles]

596.

Terme emprunté à Eric Charmes, qui l’utilise pour traduire l’anglais superblock, afin d’accentuer la marque de l’excès et de les différencier des superblocs, terme utilisé pour désigner des unités architecturales de grandes tailles, tels les centres commerciaux. E. Charmes - 2 000 - p. 66.