III - 1 DE LA CELLULE A L’APPARTEMENT - Fermeture et Spécialisation des Pièces

Les deux ensembles d’habitat Xom Cai et Hung Vuong sont exemplaires en plusieurs points. Ce sont les premiers ensembles de cette envergure projetés et construits à Hô Chi Minh Ville après la đ message URL ocircaccent.gifi m message URL oqueueaccent.gif i, soit depuis la réunification du Viêt Nam en 1975. Ils sont donc réalisés après plus de vingt ans sans construction équivalente et leurs évolutions

formelles, entre les premiers et les derniers logements construits (sur moins de cinq ans), sont un raccourci des choix en matière de logements promus.

L’organisation générale qui se dégage de ces deux ensembles est induite par ces choix. Ce qui est alors particulièrement intéressant dans la comparaison, c’est la différence des espaces extérieurs publics, collectifs, de ces deux ensembles de logements, très bien imagée par la réponse de monsieur Lê Van Pha à ma question ’lequel préférez vous’ : ’pour y vivre, je préfèrerais Xom Cai, mais les appartements sont petits, je pense que Hung Vuong est mieux car il donnera l’habitude aux habitants de fréquenter un supermarché’ (construit au rez-de-chaussée des trois tours).

Les premières barres de logements collectifs ne dépassaient pas trois étages avant 1975, elles étaient constituées de cellules d’habitat distribuées par une coursive, généralement extérieure, parfois intérieure (centrale). Dans cette configuration, et sans pour autant s’apparenter à des appartements, les logements expérimentaient un nouveau rapport avec la rue et l’espace de circulation/distribution, les deux s’étant séparés.

Au coe ur du centre ville, les immeubles sur l’ancienne rue Catinat se sont élevés plus haut, cinq étages, et ont intégré un ascenseur. Leurs logements, plus grands, sont devenus des appartements organisés en plusieurs pièces aux fonctions séparées. Enfin, deux grands immeubles, destinés aux Américains et construits par eux, se sont élevés jusqu’à 11 étages sur entresol et rez-de-chaussée.

Aucun des immeubles de Xom Cai ou Hung Vuong ne reprend la typologie de la coursive extérieure distribuant des cellules, alors que ce modèle a été reproduit pour la grande majorité des collectifs construits au début des années 1990 dans le cadre du programme de relogement du canal Thi Nghe - Nhiêu Lôc. Cet état de fait est à mettre en liaison avec la différence relevée dans les objectifs des projets, mais aussi avec l’antériorité du programme, même si les constructions ont dans les faits toutes été contemporaines et inaugurées entre 1994 et 1997.

Tableau : LES LOGEMENTS COLLECTIFS DE L’ARRONDISSEMENT 5 (EXTRAIT)
Adresse Nbre 1-4 Nbre % Bureau Nbre x1000 VND Commentaires
Localisation Etages Grade Emprise
Au sol
Equival.
S.H.O.N.
Logt Rapport de
dégradation
Gestionnaire Foyers Coût des
travaux
Opinion de l’arrondissement
Phu?ng 1
1
03 Nguyen Bieu
-
2
-
2
-
1796,76
-
2608,32
-
52
-
30
Arrondt. 5
-
52
-

692.628

Réparation en 1998
2
14 Ham Tu
-
5
-
2
-
596,2
-
2619,9
-
45
60
26,67
-
Eglise de C.Q.
-
45
60

Dangereux

3

727 Tran Hung Dao

13

2

2500

32500

450

mauvais

Ville

450

Réparations prévues

4

Cité de Cho Quan

5

2

3780

18900

240

mauvais

Arrondt. 5

234

300.000

Réparation en 1999

5

53 Tran Binh Trong

4

2

140

560

10


Arrondt. 5

10

202.600

Réparation en 1998
Phu?ng 2
1
410-414
Tran Hung Dao
7
-
2
-
297,4
-
1674,8
-
20
-
20
-
Cie. Ville
-
22
-
2
251-257 E
Nguyen Bieu
4
-
2
-
731,8
-
3734,6
-
36
-
20 Arrondt. 5
-
41
-

538.498

Réparation en 1998
Phu?ng 3
1
297-299
An Duong Vuong
4
-
2
-
273,32
-
975,52
-
16
-
30 Arrondt. 5
-
19
-

121.654
Réparations prévues
Trav. Réalisés 1997
Phu?ng 4
1 4 Tran Phu
bâtiment A
-
bâtiment B
-

3
-
2
-

2
-
2
-

361,2
-
145,8
-

538
-
216,14
-

12
-
8
-

26,56
-
26,56
-

Port Saigon
-

19
-
Est déclassé (grade) sérieusement et
nécessite rénovation
2 258 Le Hong phong
bâtiment A
-
bâtiment b
-

4
-
4
-

2
-
2
-

249,6
-
249,6
-

525,6
-
525,6
-

12
-
12
-

26,66
-
26,66
-

Société
-

26
-
3 402/4A1
An Duong Vuong
4
-
2
-
74,48
-
250,56
-
11
-
21,66
-
Cie. Arrondt. 5
-
12
-
4
322/13-322/15
An Duong vuong
2
-
2
-
178,54
-
630,42
-
14
-
Hopitâl P.N.T.
-
14
-
Est déclassé (grade)
nécessite rénovation
Phu?ng 5
1
1149-1169
Tran Hung Dao
4
-
2
-
2079,36
-
9433,09
-
128
-
28
-
Arrondt. 5
-
135
-

829.900
Réparations prévues
Trav. Réalisés 1997
2
82/5 An Binh
-
3
-
2
-
113,88
-
305,94
-
6
-
28
-
Arrondt. 5
-
6
-
3
94-98
Tran Tuan Khai
5
-
2
-
241,08
-
817,8
-
26
-
30
-
Arrondt. 5
-
135
24

209.057
Réparations prévues
Trav. Réalisés 1997
4
286 Ham Tu
-
5
-
2
-
120
-
600
-
25
-
28 Arrondt. 5
-
25
-

Réparation en 1998
5
1 Dao Tan
-
4
-
2
-
211,37
-
963,31
-
9
-
33,3 Arrondt. 5
-
9
-

114.713

Réparation en 1998
6
33 Chieu Anh Cac
-
5
-
2
-
238,42
-
1933,34
-
22
-
28,33
Arrondt. 5
-
22
-
7
94/2 An Binh
-
3
-
2
-
591
-
1389,12
-
24
-
25 Arrondt. 5
-
24
-

111.782
Réparations prévues
Trav. Réalisés 1997
8
66 Bach Van
-
3
-
2
-
744,17
-
3006,76
-
43
-
23,33
-
Arrondt. 5
-
43
-
Rénov. du syst. éva. eau déjà réalisée
9
26 Bach Van
-
4
-
2
-
424
-
1271
-
24
-
30 Arrondt. 5
-
24
196.000
Réparations prévues
Réparation en 1998
10
236 Ham Tu
-
3
-
2
-
899
-
2234,16
-
36
-
32 Arrondt. 5
-
36
-
Réparations prévues
Trav. Réalisés 1997
[Note: D’après le ’Tableau statistique de situation et de gestion des logements collectifs de l’arrondissement 5’
établi par le Comité populaire de l’arrondissement 5
[ La ligne du haut correspond aux données du tableau de 1995, celle du bas aux données du tableau de 1999 ]]
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Ainsi, pour les deux opérations du cinquième arrondissement, dans les premiers immeubles640 construits, une cage d’escalier dessert de grands paliers traversants qui distribuent quatre logements mono-orientés et qu’un puits de lumière / aération relie deux par deux aux logements des cages voisines. La cellule a été abandonnée pour un appartement de deux ou trois chambres. Le séjour ouvre sur un balcon et sur l’espace public. Si les premiers bâtiments sont réalisés en béton enduit, les suivants intègrent des décors en carreaux de terres cuites. D’autres ensembles de l’arrondissement 5, sans doute réalisés par la même entreprise, présentent ces mêmes modénatures de façade. La cage d’escalier, intégrée dans les volumes des premiers bâtiments est aérée par des claustras. Elle sort du volume dans les derniers et tend à se fermer derrière des vitres. Ces immeubles abritent, dos à dos, en rez-de-chaussée et entresol des cellules comparables au rez-de-chaussée (et mezzanine) des compartiments-commerçants. La structure de ces immeubles est toujours celle du compartiment : une trame de poteaux d’une portée de trois et quatre mètres.

La cité Xom Cai s’organise donc autour de deux types de logements rassemblés en immeubles dont la modénature a évolué pendant le temps du projet, plus une bande de treize petits compartiments adossés à des compartiments existants et réalisés en tout premier.

Dans le cas de Hung Vuong641, trois types de logements ont été réalisés. Tout d’abord, une bande de compartiments mitoyens de trois étages sur rez-de-chaussée et entresol, le long de la rue Nguyên Trai, axe urbain important. Puis des bâtiments du type de ceux de Xom Cai pour fermer les trois autres cotés de l’îlot, enfin au centre de celui-ci, trois tours de logements, les premières de ce type à Hô Chi Minh Ville. Chaque niveau642 dessert huit appartements organisés autour d’un palier éclairé par un patio central et desservi par un double escalier et trois ascenseurs. La structure du bâtiment repose sur des murs porteurs et d’imposants poteaux. Les portées sont de 5,5 et 7,5 mètres. Les appartements, tous identiques, possèdent deux chambres. Le balcon des pièces humides se retrouve en façade, mais très en retrait et abrité derrière un claustra construit sur toute la hauteur.

Les immeubles de Xom Cai ont des ouvertures pourvues de grilles et des volets en bois persiennés. Quelques habitants ont remplacé les volets par des vitres. Dans ceux de Hung Vuong les fenêtres sont vitrées, tous les logements des barres possèdent des aérations supérieures, traditionnellement situées sur le linteau de la fenêtre, elles ont toutes disparues dans ceux des tours. Dans les uns comme dans les autres, certains habitants ont installé des climatiseurs que le recul du balcon dissimule. La porte palière, toujours ouverte dans les collectifs surpeuplés desservis par une coursive extérieure, est ici close, même si un habitant est présent. Presque tous ont rajouté des grilles métalliques pour se protéger contre une éventuelle effraction.

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Les parois coupent tous les contacts avec la rue, les petits marchands ne montent plus, le bâtiment se referme sur le logement, sur l’intérieur. C’est toute la vie sociale qui

est en jeu. Certaines barres de Hung Vuong sont réputées malfamées, alors même que de l’extérieur elles semblent plus riches, plus modernes que celles de Xom Cai.

Les immeubles de Xom Cai ne comportent pas d’ascenseur et les deux derniers niveaux ont été réservés aux personnes relogées. En priorité, celles qui résidaient dans l’îlot détruit. Nguyên Thien Thanh643 m’a présenté les immeubles de Xom Cai : ’les rez-de-chaussée sont vendus 400 millions de V.N.Dongs, les deux derniers étages sont gratuits pour les familles relogées’. Après étonnement et nouvelle question, il a précisé ’elles payent juste la construction’. Lê Van Pha disait ’ils ne payent pas le droit d’usage du sol’ : dans le cas d’un collectif, le droit d’usage défini par l’administration est réparti entre les habitants. De manière courante, l’Etat ou la ville subventionne une opération, en fournissant gratuitement 644 le sol à l’administration responsable.

Les niveaux hauts sont donc vendus à prix coûtant, les rez-de-chaussée avec leur mezzanine en entresol, au prix du marché, les niveaux intermédiaires sont subventionnés et généralement destinés aux fonctionnaires. Cette répartition économique, critiquable dans l’éloignement des populations qui utilisent la rue comme cadre de revenus, permet un brassage des populations et niveaux sociaux a priori 645 du même type que celui de l’îlot et du coe ur d’îlot.

Le même principe a été appliqué dans les tours de Hung Vuong. Certes, tous les paliers sont desservis par ascenseurs, mais un planton en bas, carnet de tickets à la main fait payer chaque passage ... tout a un coût. Le prix est dérisoire : 500 V.N.D. pour un habitant (1 000 pour un visiteur) à chaque montée, la descente est libre. Chacun peut s’abonner pour 40 000 V.N.D. par mois et par personne. Lorsque l’on sait que les plus pauvres sont logés en hauteur, si ce prix est mis en rapport avec les loyers des immeubles collectifs anciens, qui sont de 60 000 à 150 000 V.N.D. par appartement et par mois, le manque de cohérence s’impose. Même s’il est évident que des arrangements factuels voient le jour : le planton peut laisser passer absolument qui il veut.

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Une tour abrite 64 logements plus 8 (ou des bureaux au deuxième étage). Une cage d’escalier d’une barre dessert 20 logements, plus quatre en rez-de-chaussée. Une barre de trois cages d’escaliers est donc l’équivalent d’une tour, si ce n’est la présence du supermarché. De fait, dans le paysage l’impact d’une barre de 50 mètres est beaucoup moins prégnant que celle d’une tour de 10 étages.

Finalement, ni la densité, ni le fonctionnement ne justifient l’apparition de ce type de forme d’immeuble de logements sociaux, seule l’image de modernité à laquelle cette forme urbaine est associée lui donne une aura.

Notes
640.

cf. p.414 le plan d’un étage courant des immeubles (lô ) D et F de Xom Cai (en vietnamien, le mot désigne un lot foncier, un terrain).

641.

cf. p. 410 [Les ensembles de logements de Hung Vuong] le plan masse et une photo de la maquette.

642.

cf. p. 416 le plan d’un étage courant des tours de Hung Vuong.

643.

Directeur du bureau de la gestion urbaine de l’arrondissement 5.

644.

De manière générale, le gouvernement vend, au prix fixé par lui-même, le terrain aux compagnies de construction d’état qui le viabilisent et le revendent ... avec une forte plus value. Dans le cadre de logements collectifs subventionnés, le prix est nul ou suffisamment insignifiant pour que dans les faits tout le monde parle d’attribution.

Ces procédés expliquent la localisation parfois éloignée des opérations de relogement, comme par exemple dans le cas du nouveau centre de Vinh Lôc (dans le district de Binh Chanh), qui répond à l’éradication de l’habitat illégal le long des rives du canal Ben Nghé - Tau Hu dans l’arrondissement 5.

645.

Je n’ai pas réalisé d’enquête sur ce sujet, B. Garnerone [1998] a réalisé son mémoire de maîtrise d’aménagement sur l’ensemble d’immeubles de Nguyên Thien Thuât. Pour cela il a effectué une campagne d’enquête socio-économique systématique sur un immeuble. Cet ensemble date de 1968 et avait été construit à la place du quartier précaire qu’un incendie venait de détruire. S. Wust [2 000] a soutenue une thèse sur l’étude des relogements effectués dans le cadre du projet sur l’assainissement des berges de l’arroyo Thi Nghe - Niêu Lôc. A ma connaissance, aucune étude n’a été réalisée sur un grand îlot urbain de la ville régulière.