Les espaces des morts : Pour une vie harmonieuse

Il est à ce sujet un dernier point à évoquer. La constitution du Viêt Nam définit toujours la famille661 comme cellule de base de la société, or celle-ci se fédère autour du culte des ancêtres. Les morts662 ont une présence palpable dans la culture vietnamienne663. Lors d’un Colloque664, Nguyên Dinh Dau est intervenu pour faire remarquer qu’une ville vietnamienne sera en harmonie lorsqu’elle sera capable d’abriter des lieux pour les vivants, mais aussi pour les morts. Actuellement, des cimetières665 occupent des terrains à l’Ouest de la ville dans le district de Binh Chanh. L’intervention de Nguyên Dinh Dau, volontairement polémique, visait entre autre l’attitude de l’administration qui a transformé l’ancien cimetière à l’angle des rues Hai Ba Trung et Diên Biên Phu en parc, sommant chaque famille de venir récupérer ses morts. Les corps non réclamés ont tous été ensevelis dans une fosse commune.

Notes
661.

article 64 des constitutions de 1980 et 1992.

662.

Les remarques de madame Du ne sont pas différentes lorsqu’elle signale que les collectifs en étages et aux escaliers trop étroits posaient de vrais problèmes lors d’un enterrement. Comment entamer une procession dans un escalier ? Elle demandait s’il ne serait pas possible de prévoir une salle appartenant à la collectivité qui permettrait de veiller les morts autour du cercueil pendant les trois jours réglementaires, de façon décente, puis de former la procession et d’accueillir le repas qui s’ensuit. Après tout, il s’agit aussi d’actes fédérateurs de la société, et le communisme vietnamien le sait bien, qui a toujours toléré le culte des ancêtres, alors qu’il condamne les croyances et les superstitions.

663.

P. Huard et M. Durand [1954 - p.99] soulignent que ’grâce au rituel, le Viêt-nam croit aux morts, tandis que l’Occident ne croit qu’à la mort.’

664.

’Environnement humain et urbanisation au Viêt Nam, en Asie du Su- Est et au Japon’ - 12/15 janvier 1997 - colloque organisé par le Centre d’études de l’Asie du Sud-Est de l’Institut des sciences sociales de Hô Chi Minh Ville et la Fondation Toyota.

665.

L’incinération est aussi une pratique courante et chaque pagode a un recoin destiné aux urnes, mais elle ne fait pas l’unanimité au sein de la population, alors que la tradition enterrait ses morts.