Chapitre VII : 011MODE DE PENSEE, MODES D’ACTIONS
Eléments de Réponse

‘’Les Chinois ne conçoivent pas l’idée de loi. Aux choses comme aux hommes, ils ne proposent que des modèles.’
M. Granet - La pensée chinoise - 1988 (1934) - p. 281’

Afin de pouvoir s’attarder sur le sens des termes récurrents, voire des concepts qu’ils véhiculent, il est nécessaire de se tourner vers le terreau culturel vietnamien, de discerner en quoi il caractérise les pratiques relevées. Il est possible de s’étonner de ne voir aborder ce thème qu’à la fin de la thèse, mais d’une part il est nourri par ce qui précède et ensuite je souhaitais absolument éviter tout déterminisme culturel : il s’agit ici de dégager des éléments de réponses aux questions posées par les attitudes observées.

Pour cela, je m’attacherai ici à rassembler les différentes informations relevées afin de mettre en évidence le sens général qui s’en dégagent en ce qu’il peut éclairer et informer les pratiques relevées dans le cadre du développement urbain. Et en aucun cas il est question de trouver une explication à toute attitude. Le sens donné à ce chapitre est inverse alors qu’il s’organise à partir de la mise en relation de différentes données pour permettre d’avancer des éléments de réflexions. Ainsi, ce chapitre a pour objectif de tenter de particulariser des modes de pensées qui prédisposent aux modes d’actions.

Le langage, par exemple, informateur bien connu, donne un cadre673 à la pensée. Au Viêt Nam, les relations patriarcales confucéennes ont été élargies à toutes relations à travers le respect hiérarchique. Et deux individus se désignent mutuellement avec des noms emprunts au vocabulaire de la famille, en fonction de leurs âges respectifs. Le je neutre n’est employé que très exceptionnellement.

Un seul mot sert à nommer un cadet : em. Par contre pour les aînés les distinctions sont très précises. Si l’interlocuteur est de la même génération, il sera nommé anh (grand frère) ou ch message URL ipoint.gif (grande soe ur), mais s’il est plutôt de la génération de ses parents, il deviendra tante ou oncle. Sachant que le vietnamien a des termes distincts s’il s’agit de la famille du père (famille intérieure - n message URL opointaccent.gifi), ou famille de la mère (famille extérieure - ngo message URL apoint.gifi), qu’il établit des différences s’il s’agit d’un membre rapporté ou non, que les caractéristiques retenues ne sont pas les mêmes s’il s’agit d’un homme ou d’une femme674, etc ..., le locuteur a le choix entre plusieurs noms en fonction de l’estime qu’il accorde à son interlocuteur. Il suffit donc que deux personnes s’adressent la parole pour qu’un cadre théorique se dessine instantanément : le contexte relationnel est inhérent à la société vietnamienne.

Notes
673.

Pour ne pas dire qu’il la forme, à travers les concepts véhiculés par les mots, tout comme à travers l’absence de mots pour désigner un objet, une idée, un concept : le langage est un outillage mental qui permet une forme, donc une pensée, avant d’être un outil de communication avec autrui.

674.

Ainsi, le dictionnaire français vietnamien indique cinq traductions pour le nom ’ tante’ :

- cô : petite soe ur du père

- d message URL iaccent2.gif : petite soe ur de la mère
- th message URL ibarre.gifm : femme du petit frère du père
- m message URL oqueuepoint.gif : femme de l’oncle maternel

- bác gái: femme de l’oncle (grand frère ou grand cousin du père ou de la mère)

et quatre pour le nom ’oncle’ :

- chú : petit frère du père

- bác : grand frère ou grand cousin du père ou de la mère

- c message URL apointaccent.gifu : oncle maternel
- d message URL ubarre.gif message URL oqueuepoint.gifng : mari de la tante