Solidaires d’une humanité marquée par la souffrance et l’injustice

Trois remarques générales peuvent être faites. La symbolique ouverte est missionnaire. Telle est la première observation. Comme dans le fondement des Exercices spirituels de St Ignace, le récit inscrit un rapport triangulaire : Monde - Christ/Parole - communauté rscj. Cette problématique s’annonce dès la première lettre, prend forme dans les suivantes et se vérifie tout au long du recueil. Quelle que soit la raison occasionnelle d’une lettre, son horizon est constitué d’événements, de personnes rencontrées, de besoins entendus. La première circulaire définit, d’emblée, une manière de relire le réel en vue d’une action sociale. «  Seul un regard contemplatif sur les événements et les personnes, affirme la nouvelle supérieure générale, peut nous engager dans la construction d’un monde plus humain et nous faire sentir l’urgence de son appel »  ⁷⁷⁷ . Le récit déploie ensuite la diversité des contextes et des situations. Un panorama international est déployé.

Le regard s’affine au gré des voyages et des réalités rencontrées. La lettre 8, écrite en 1972, reprend l’invitation de M-J Bultó à se faire proches des hommes dans leurs souffrances et dans leurs combats. La condition de possibilité de ce mode de présence est reçue du «  Cœur ouvert du Christ qui continue à ouvrir le chemin », y est-il précisé  ⁷⁷⁸ . La référence à une épître paulinienne (Philippiens 3/10) inscrit alors une équivalence de sens entre :

• l’union au Christ et la compassion ;
• s’engager dans la lutte pour la justice et croire en la puissance de résurrection du Christ.

Voici la représentation de ces équivalences textuelles.

« communier aux souffrances du Christ »	communier chaque jour aux souffrances de l’humanité, participer avec nos frères à la douleur causée par l’injustice et le mal.
« croire au pouvoir de sa résurrection »	lutter contre l’égoïsme.

Après l’Inde et l’Egypte, les visites des membres de l’équipe générale se succèdent dans les provinces de France, d’Amérique du Nord et d’Amérique latine. En 1972, c’est le tour de celles d’Australie/Nouvelle-Zélande, d’Espagne, des Pays-Bas, d’Irlande-Ecosse, du Pérou, du Chili, d’Argentine-Uruguay et du Brésil. Un triple bilan est alors transmis dans la lettre 11  ⁷⁷⁹ . Il mentionne :

• plus de participation et de collaboration avec l’Eglise locale et les autres Congrégations ;
• plus d’ouverture dans le recrutement et les orientations des Institutions scolaires ;
• davantage d’intériorisation de la réalité concrète, en référence à l’Evangile et en particulier à partir de la contemplation des attitudes du Christ, vis-à-vis des pauvres et des marginaux.

Ce mode de vie apostolique, loin des protections frileuses du couvent, conduit alors à l’apparition d’un nouveau motif sur cet horizon missionnaire : la solidarité avec les situations d’injustice  ⁷⁸⁰ . Cette visée s’affirme à partir de la lettre 12  ⁷⁸¹ , sur fond de recontextualisation biblique et théologique. En voici la représentation.

finalité

références

«  nous engager pour un monde plus juste »

1ère) biblique «  porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs la délivrance, et aux aveugles le retour à la vue ; rendre la liberté aux opprimés ». Evangile de Luc 2ème) théologique «  La mission, c’est l’appel de Jésus dans la puissance de l’Esprit. Le mystère de la mission est au cœur même du mystère de l’Incarnation. Inséparable de la mission, nous rencontrons nécessairement la puissance créatrice et libératrice de Jésus. Lui seul peut nous rendre sensibles à l’injustice et à l’oppression sous toutes ses formes, par son action dans notre vie de chaque jour. Lui seul donne la force d’être ouvert à l’Esprit qui permet de lutter contre toute cette injustice et qui fait toutes choses nouvelles ».

Une telle priorité évangélique s’imposera en 1979, c’est-à-dire sept ans après, comme finalité sociale de l’action éducative.