Guillaume de Saint-Amour, on l’a dit, apporte en curie avec lui trente et un extraits, confectionnés par les maîtres séculiers et qui sont selon eux autant d’ « erreurs », du brûlot apocalyptique que le Franciscain Gherardo de Borgo san Donnino vient de mettre en circulation au sein de l’université, l’Introductorius ad evangelium eternum 1333 . Il n’est pas simple d’aborder le contenu de cet ouvrage, malheureusement perdu 1334 ; d’où découle la difficulté d’évaluer la façon dont les maîtres ont travaillé. Il faut tout de même tenter de comparer ces extraits avec ce qu’on peut connaître de l’oeuvre originale, et surtout avec l’oeuvre de Joachim de Fiore (c. 1132-1202), à laquelle Gherardo, qui la nomme Evangelium eternum, a souhaité comme l’indique son titre introduire; le Père Denifle a sur ce point fait toute la clarté possible 1335 .
M.-M. Dufeil, Guillaume... op. cit., p. 118 et passim, parle de trente deux extraits; j’a beau relire les sources (citées supra, note 124), je n’en trouve que trente et un.
M.-M. Dufeil a toutefois procédé à une reconstitution intéressante, une anastylose comme il la nomme, dont il infère les principales articulations de l’ouvrage, voir son article: Trois « sens de l’histoire » affrontés vers 1250-1260, dans 1274 année charnière... op. cit., p. 815-835, auquel il ajoute, p. 836-848: des extraits traduits des trente et une erreurs de Frère Gherardo; des extraits du Protocole d’Anagni; sa tentative de reconstitution sur cette base de l’ouvrage de Gherardo; la traduction du chapitre huit du De periculisde Guillaume de Saint-Amour; celle du chapitre vingt-quatre du Contra impugnatesde Thomas d’Aquin; celle de la bulle d’Alexandre IV Romanus pontifex , du 5 octobre 1256, condamnant le traité de Guillaume. Par ailleurs, B. Töpfer prétend avoir identifié un ms. de Dresde contenant une partie de cet ouvrage, voir son article, Eine Handschrift des Evangelium æternum des Gerardino von Borgo San Donnino, dans Zeitschrift füt Geschichtwissenschaft, t. VIII (1960), p. 156-163; sa démonstration me semble convaincante (le ms. de Dresde contiendrait la compilation des extraits des trois œuvres principales de Joachim, réalisée et glosée par Gerardo, amputée toutefois de l’introduction qui les présentait comme le nouvel evangile; preuve selon B. Töpfer que Gerardo aurait ainsi mis à exécution ce que l‘exemplaire de l’Introductoriusqui a circulé à Paris en 1254 n’avait qu’ébauché, cf. ci-dessous; mais il faudrait collationner systématiquement le ms., inédit, avec celui du Protocole pour trancher, ce que je n’ai pu faire); voir les observations de M. Reeves, The Influence... op. cit., p. 189.
H. Denifle, Das Evangelium... art. cit.; bref mais solide résumé de sa contribution dans M. Reeves, The Influence... op. cit., p. 59-70.