b) La sainteté nouvelle: les fondateurs des ordres mendiants

Dès le début de sa carrière, le cardinal a eu l’occasion de connaître les ordres religieux mendiants, précocement venus s’installer à Paris pour y fonder leurs studia. En outre la querelle ecclésiologique des années 1255-1260, à laquelle il fut mêlé de très près, l’a conduit à intervenir à plusieurs reprises devant des auditoires de frères. Son retour définitif en Italie n’a pu que multiplier les occasions de fréquenter les membres de ces ordres, qui commencent à peupler la Curie, et dont les couvents y sont d’une densité inégalée ailleurs en Occident. Enfin, c’est dans la péninsule que reposent les corps de leurs fondateurs, et qu’on peut voir la plupart des lieux rattachés aux origines mêmes de ces créations nouvelles.

C’est précisément à Assise qu’a été donné le SERMO n° 28, rubriqué « Sermo in domo fratrum Minorum que vocatur Sancta Maria de Portioncula in qua sanctus Franciscus migrauit ad Dominum ». Du fait d’indications contradictoires, il pose des problèmes de datation qu’il convient d’examiner, préalablement à son étude.

Ce sermon est signalé par une note du manuscrit de Paris, BNF lat. 15948, le désignant comme le 52ème du recueil Multi tyranni sederunt in throno 2323 . La première indication chronologique dont on peut se servir est fournie par les dates extrêmes de composition du recueil mentionné: entre février 1265 et avril 1266 2324 . Les déplacements et les activités de la Curie durant cette période suggèrent très fortement de dater le SERMO n° 28 de l’année 1265, plus exactement entre le 31 août et le 8 septembre 1265. A cette époque en effet, Clément IV, qui n’avait pas quitté Pérouse, ralliée après son élection 2325 , depuis plusieurs mois, et qui y séjournera encore longtemps, s’absente une seule fois, brièvement, pour se rendre avec la Curie à Assise, du 31 août au 8 septembre 1265 2326 . La dévotion du nouveau pape pour saint François et son ordre s’était d’ailleurs affirmée dès son élection, avant même sa consécration, puisque sur le chemin du retour en Italie, avant de se rendre à Pérouse, il fit un crochet par Assise pour y vénérer la tombe du saint 2327 . Il me semble que ce bref déplacement à Assise de la Curie est documenté par le SERMO n° 28, donné on l’a vu à la Portioncule, ainsi que par un autre, correspondant au même voyage, donné dans le monastère de sainte Claire d’Assise 2328 . De fait, le SERMO n° 28 et celui aux « Pauvres Dames », qui font partie du même cahier dans le recueil Multi tyranni, ont aussi en commun la péricope liturgique dont sont tirés leurs thèmes bibliques, pris dans les deux cas dans l’Evangile de Luc 10, 23-27 2329 .

On connait parfaitement les raisons de la venue du pape et de la Curie à Assise au début de septembre 1265: il s’agissait de consacrer la nouvelle basilique du monastère Sainte-Claire, où avait été opérée le 3 octobre 1260 la translation du corps de la sainte, conformément à une bulle d’Alexandre IV 2330 , et dont les travaux durèrent encore cinq ans environ après cette translation. Le 6 septembre 1265, la nouvelle église, totalement achevée, fut consacrée par les soins du pape et des cardinaux: Clément IV en chargea Raoul de Grosparmi, cardinal-évêque d’Albano, se réservant pour lui-même la consécration de l’autel majeur 2331 . La preuve de la présence d’Eudes de Châteauroux lors de cette cérémonie est fournie par l’acte original qui en rend compte et nomme, parmi les dignitaires et clercs de Curie, les cardinaux présents 2332 . Compte-tenu de tous ces éléments, il paraît plausible que le SERMO n° 28 en l’honneur de saint François, donné à la Portioncule, et celui pour les « Pauves Dames », prononcé dans la basilique de sainte Claire, ont été entendus entre le 31 août et le 8 septembre 1265 2333 .

Mais les données liturgiques posent un problème. D’une part, le SERMO n° 28, est copié, dans l’unique manuscrit où on le lit, parmi des sermonsdu 12ème dimanche après Pentecôte 2334 . D’autre part, le début du texte, commentant le thèmebiblique choisi (« Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho, et il tomba au milieu de brigands » 2335 ), confirme ce fait; l’orateur dit en effet que « cet Evangile fut lu hier, et court toute la semaine » 2336 ; or l’Evangile de Luc 10, 23-27, est effectivement lu à partir du 12ème dimanche après Pentecôte, et durant la semaine suivante, selon la liturgie papale et franciscaine 2337 . Une telle donnée ne correspond pas à la période proposée durant l’année 1265, car le 12ème dimanche, cette année-là, tombe le 16 août. Les deux sermons, d’après leurs incipit, seraient de la semaine suivante, ce qui est trop précoce par rapport au voyage évoqué du pape et de la Curie.

Puisque les données exploitées au chapitre précédent, c’est à dire les souscriptions dans la documentation pontificale, ne sont ici d’aucune utilité 2338 , deux solutions s’offrent pour résoudre le problème, sans qu’on puisse aboutir à une conclusion sûre. Soit le SERMO n° 28, et celui pour les « Pauvres Dames », sont de 1264, et dans ce cas les indications liturgiques fournies fonctionnent parfaitement, le 12ème dimanche après Pentecôte tombant cette année-là le 31 août. Cette hypothèse ne contredit pas absolument les dates de composition indiquées pour le recueil Multi tyranni, où sont localisés les sermons, car on peut montrer que le texte du prologue qui énumère et date les différents recueils du cardinal n’est pas d’une rigueur extrême sur ce point 2339 . Enfin, si Eudes de Châteauroux est indubitablement présent à Assise avec la Curie au tout début de septembre 1265, rien n’oblige à penser que les deux sermons ont été donnés cette année-là.

Seconde solution, qui paraît étrange devant un auditoire de frères: le cardinal, dans le choix de ses thèmes bibliques, n’aurait pas obligatoirement suivi les usages de la Curie, qui sont aussi ceux de l’ordre franciscain, leur préférant l’ordre des péricopes suivi par la majorité des églises paroissiales, qui lui était beaucoup plus familier. Dans ces églises, c’est au 14ème dimanche après Pentecôte qu’était lu l’Evangile de Luc 10, 23-27 2340 . En 1265, le 14ème dimanche tombe le 30 août, et la présence du pape, donc sans doute celle d’Eudes de Châteauroux, est attestée à Assise dès le 31 août. Si l’on suit l’incipit du SERMO n° 28, c’est ce même lundi 31 août que le cardinal aurait prêché à la Portioncule, en l’honneur de saint François. Quant au sermon aux « Pauvres Dames », il aurait été délivré entre le premier et le 5 septembre, en tout cas point le 6 septembre, jour de la consécration, puisqu’il s’agit d’un dimanche, inaugurant de nouvelles lectures liturgiques.

Cette seconde solution se heurte à de sérieuses objections: pourquoi les deux sermons sont-ils, explicitement ou de fait, classés avec ceux du 12ème dimanche dans le manuscrit où on les lit, s’ils ont été prêchés un 14ème dimanche ? En outre: pourquoi un cardinal de l’église romaine aurait-il suivi une liturgie différente de celle de la Curie, qui plus est devant des Franciscains ? On peut répondre, à la première objection, que l’édition dont font partie ces deux sermons revêt un caractère officiel, et qu’il est probable que les copistes du scriptoriumcardinalice ont négligé, lors de la réalisation de cette édition, la chronologie réelle, au bénéfice du classement liturgique, suivant l’usage romain. Quant à la liberté dont fait preuve le cardinal dans le choix de ses thèmes bibliques, et donc des lectures liturgiques dont il suit l’ordre, elle confirmerait qu’un orateur de son envergure cherche avant tout l’adéquation du texte et du commentaire biblique à l’objet du sermon, et n’a pas besoin de se montrer servile en la matière. Enfin, l’ensemble assurerait que l’unification de la liturgie sur le mode romain était bien loin d’être réalisée au XIIIe siècle, y compris chez les clercs de la Curie, malgré le processus d’homogénéisation conduit par Rome 2341 .

Pour conclure sur ce point, la datation du SERMO n° 28 au lundi 31 août 1265 me paraît séduisante, mais absolument pas certaine. Fondamentalement, cela ne transforme pas le contenu du discours, mais dans la mesure où il s’agit précisément d’une performance orale, la présence éventuelle de la Curie - celle des hauts dignitaires de l’ordre est, on le verra, assurée - en modifie l’impact, surtout dans la perspective ici envisagée, consistant à s’interroger sur la façon dont la prédication du cardinal, à propos des fondateurs des ordres mendiants, pourrait refléter une volonté de promotion particulière de leur culte.

C’est donc dans la parabole du Bon Samaritain qu’Eudes de Châteauroux choisit le thème biblique qui va lui permettre d’exprimer le sens que revêt, à ses yeux, la fondation de saint François. Car de la biographie du saint, il sera peu question. Cette différence avec les précédents sermons, consacrés à des individus récemment canonisés ou en voie de l’être, s’explique facilement par des objectifs de nature très différente: point n’est besoin ici de justifier la sainteté d’une figure aussi éminente que le Poverello. Puis c’est à l’ordre, très précisément à ses plus hautes autorités, que l’orateur s’adresse, comme l’indique la fin du sermon:

‘« Aussi vous, très chers, qui êtes au fondement, c’est à dire à la tête de la religion qu’a instituée saint François, non seulement proches, mais immédiatement copiés d’après l’exemplarlui-même, devez contenir davantage de pureté et vérité, et suivre plus expressément les traces de saint François » 2342 .’

Parmi ces frères, chargés des destinées de l’ordre, qu’Eudes de Châteauroux apostrophe, il est probable, si le sermon est effectivement du 31 août 1265, qu’il faut compter le ministre général, Bonaventure, lequel, revenu en Italie dès 1264, passe l’essentiel de l’année 1265 auprès de la Curie, où Clément IV lui offre, en vain, l’archevêché d’York 2343 . La densité du réseau franciscain en Italie et la solennité de l’événement expliqueraient de même la présence de la hiérarchie 2344 .

Ce sermon est l’un des plus attachants du cardinal, car, quoiqu’on pense, avec le recul historique, de la présentation qu’il y fait de l’ordre des frères mineurs, et des caractéristiques qu’aurait voulu lui imprimer son fondateur, c’est le second et dernier endroit dans sa prédication où j’ai pu repérer un souvenir biographique:

‘« Alors que je me rendais ici, je me suis souvenu que dans mon enfance, comme je contemplais un vitrail où était peinte cette parabole ou histoire, et que j’ignorais ce dont il s’agissait, un jeune homme, un laïc, qui m’était inconnu, se campa près de moi et me dit: ‘Cette représentation confond avec vigueur les clercs et les religieux comparés aux laïcs’, car ceux-là n’ont pas de compassion pour les pauvres et les indigents; par contre les laïcs leur en témoignent et les aident dans la nécessité; et il me raconta l’histoire de l’Evangile. Il me semble qu’à l’époque du bienheureux François, cette histoire s’est réalisée » 2345 .’

Ce lointain souvenir, dont j’ai montré qu’il pouvait faire allusion au célèbre vitrail de la cathédrale de Bourges où est représentée la parabole du Bon Samaritain 2346 , intéresse d’abord l’historien des représentations iconographiques. La fugacité de la notation ne permet pas de beaucoup approfondir ce point, mais il semble bien que le vieux débat entre primauté du texte ou de l’iconographie, ou articulation de ces deux niveaux symboliques d’expression, qui recoupe souvent celui des niveaux de culture des Médiévaux, et voit dans les représentations peintes ou sculptées la « Bible des pauvres » 2347 , se pose ici en des termes plus complexes: c’est un laïc, parfaitement au courant du sens spirituel de la parabole, puisque le prédicateur appelle « historia » les faits eux-mêmes, qui l’enseigne à un jeune enfant. Il semble donc que certains fidèles du XIIIe siècle avaient bien assimilé les épisodes les plus célèbres de l’Evangile, ainsi que le mécanisme herméneutique qui conditionnait leur exacte compréhension. Le fait qu’il s’agisse ici d’une parabole nourrissant un regard critique sur le clergé indique aussi, peut-être, que lors de la messe, ou de toute autre célébration liturgique qui plonge le chrétien dans l’univers mental biblique, que ce soit par l’iconographie, le texte ou une combinaison des deux, l’attention est sélective et retient ce qui renvoie à soi-même et rassure 2348 . Enfin, quoiqu’on pense du rapport texte-image 2349 , Eudes de Châteauroux, on l’a vu, précise que l’Evangile dont est extraite la parabole « court toute la semaine »: l’effort pastoral devait finir par porter ses fruits, par lente imprégnation, même si le souvenir évoqué se situe tout juste à l’amorce du grand tourrnant clérical qui porte une attention accrue à la « cura animarum » 2350 . Il me semble que se confirment ici les raisons qui, souvent, poussent l’orateur à traiter plus que son thème biblique, c’est à dire une large partie, voire la totalité de la péricope évangélique. Il sait jouer, grâce à ces « histoires », des ressources de la narrativité propre à la Bible; en même temps, c’est l’instrument idéal pour véritablement développer le premier des sens spirituels, l’allégorie qui décèle sous la lettre ce qu’il faut croire, en en dévoilant le sens dans l’économie salutaire. Cette ambition élevée, dans le cadre d’un discours adressé en partie aux laïcs, devrait pousser les historiens de l’exégèse à nuancer l’idée que ces mêmes laïcs n’entendaient dans les sermons, le plus souvent, que les interprétations tropologiques. C’est aussi ce qui a dû plaire à Eudes de Châteauroux dans le mode de vie franciscain: leur volonté de fidélité littérale à l’esprit autant qu’à la lettre de l’Evangile s’explique par la faible culture de François et par ses relations distendues avec le monde des religieux, antérieurement à sa conversion, comme Eudes le précise plus loin dans son discours 2351 . Avant de prendre pitié des autres, le Poverello a d’abord eu pitié de lui-même, dans une prise de conscience personnelle 2352 . Pour autant, le caractère d’ordre religieux de la fondation dès l’origine n’est pas récusé, puisque François a créé une « étable », une « religion » séparée du monde, accueillante à tous ceux, sans distinction de culture et d’origines, qui ont compris que leur passage terrestre était transitoire 2353 . Bref, la présentation de la figure de François insiste tout particulièrement sur les origines laïques et modestes de son ordre, comme des sermons antérieurs, adressés aux Franciscains, l’avaient déjà laissé transparaître, mais dans le même mouvement, elle met en valeur la renonciation au siècle qui a tant frappé les contemporains des premiers développements de l’ordre, tel Jacques de Vitry 2354 .

L’ensemble du sermon est de fait bâti sur la vie de François et sa conversion, puisque le thème, après la brève exposition de sa signification littérale, et le rappel biographique de sa valeur doctrinale, n’entraîne pas l’annonce d’un plan. Il s’applique en quelque sorte entièrement au fondateur, dans les deux étapes de sa vie. Il fut d’abord l’homme qui cheminait de Jérusalem à Jéricho et se fit dépouiller et abandonner à demi-mort par les brigands; un tel type figure tout chrétien qui, à cause de ses péchés, perd la grâce, et s’enfonce dans l’ignominie, la servitude, la pauvreté extrême 2355 , l’infirmité, le non-être, par son amour des biens terrestres et transitoires 2356 . C’est le sens de sa rencontre avec les brigands, mais c’est aussi le grandiose paradoxe de la religion chrétienne, qui relève ceux qui sont tombés au plus bas et leur redonne la grâce, s’ils veulent l’accueillir, car le portrait du pécheur, comme toujours chez Eudes de Châteauroux, ne vise pas à l’humiliation. Significativement, il compare les malheurs de l’homme victime des brigands à ceux de Joseph vendu par ses frères et spolié de sa tunique ornée 2357 ; et plus encore au Christ, dépouillé de ses vêtements avant la crucifixion 2358 . Bref, l’homme, même tombé au plus bas, a toujours le choix entre la grâce et le péché, entre le salut chrétien qui s’apprend, et l’existence animale qui s’expérimente au jour le jour:

‘« Il est abandonné à demi-mort, car une fois perdue la vie de la grâce, il lui reste celle de la nature, la vie présente, grâce à laquelle il peut retrouver la vie de la grâce, et peut récupérer la santé, s’il veut accueillir l’emplâtre de la grâce qu’on lui offre » 2359 .’

Le cardinal ne cache pas que ces hommes ayant perdu la grâce demeurent très nombreux, aujourd’hui comme au temps de saint François. Mais il présente aussi la progression vers le salut comme un cheminement, un processus qui n’est pas linéaire et que l’attention et le soutien des autres peuvent aider à retrouver. Ce faisant, il critique au passage les clercs d’aujourd’hui, qui tels le prêtre ou le lévite de Luc, ne compatissent pas aux blessures des hommes. Il faut sans doute y voir la reconnaisssance que le processus d’acculturation, ou, si l’on file la métaphore du cardinal, d’« hominisation » visé par la religion chrétienne, nécessite de la patience et beaucoup de charité. C’est exactement l’attitude que suppose une prédication régulière, construisant pédagogiquement la croyance. Eudes de Châteauroux admet donc, implicitement, qu’elle est l’apanage de trop peu de clercs. C’est au contraire tout le sens de la fondation du Poverello, nouveau Samaritain, bien placé pour comprendre ce qu’éprouvent de tels pécheurs, puisqu’il fut lui-même « laïc, et non clerc, quoique frotté d’un peu d’instruction - à la façon dont les Samaritains acceptaient la loi de Moïse, mais non les Prophètes [...]. Il s’adonnait à l’argent et les vanités du siècle l’agitaient » 2360 . Ce que représente son exemple, à titre personnel, c’est donc d’abord la coopération de la nature et de la grâce, puisque l’orateur insiste fortement sur la conscience individuelle du péché dont a témoigné François, et son effort personnel pour s’en laver et retrouver le chemin de la consolation divine. De là, il peut enchaîner sur un thème classique de l’évocation de François, son amour pour la création et sa charité:

‘« Mais puisque la nature du bien est de se diffuser, et que la possession d’aucun bien n’est agréable si elle demeure solitaire [...], saint François, après avoir eu pitié de lui-même, prit aussi pitié des autres » 2361 .’

Le fondateur de l’ordre franciscain n’a pas eu d’autre dessein que d’accueillir, en les portant tel une jument sur son dos, les errants, tant hommes que femmes 2362 , connus ou inconnus, pour les conduire à son étable 2363 . Mais le connétable ou palefrenier , c’est à dire Dieu, demande salaire: il veut posséder l’âme et le corps de celui qui lui a confié son troupeau. François lui a donné l’une et l’autre, allusion évidente à l’Eglise en laquelle est donné le sermon, la Portioncule, d’où il « s’est envolé pour le Seigneur », ainsi que l’indique d’emblée la rubrique. Son âme, ce sont les troupes qu’il a converties par son exemple; ainsi, « saint François reviendra à la vie, à son propre corps lors de la résurrection générale » 2364 . Il faut peut-être lire ici, dans cette affirmation de la résurrection intégrale du corps du Poverello, une prise de position feutrée en faveur des stigmates, qui ont tant contribué à sa réputation de sainteté, mais aussi firent l’objet d’un débat, et pour cela furent vigoureusement défendus par Alexandre IV par exemple 2365 .

La fin du sermon resemble davantage à un plan qu’à un texte suivi, preuve formelle supplémentaire que le discours a bien été prononcé 2366 . On passe abruptement, de l’accueil de François au paradis, à la métaphore qui introduit l’adresse finale aux dignitaires de l’ordre, clin d’œil aux usages universitaires, puisque le fondateur est présenté comme l’exemplardont les dirigeants franciscains doivent se rapprocher le plus possible 2367 . Peut-être faut-il y voir un rappel à l’ordre implicite adressé au ministre général Bonaventure, cet universitaire à la tête de l’ordre depuis plus de huit ans. Eudes de Châteauroux avait pourtant joué un rôle considérable dans la promotion de ce jeune et brillant étudiant en théologie, en 1257 au chapitre général de Rome 2368 . Certes les dissensions engendrées par le joachimisme, et les querelles relatives au type de vie et de gouvernement franciscains, se sont bien apaisées au bout de ces huit années; mais justement, l’ordre paraît en sommeil, et l’insistance sur la figure laïque du fondateur, sa capacité à accueillir sans distinction tous les pécheurs désireux de l’imiter, pourrait relever du même genre de reproches 2369 . Le cardinal n’oublie pas ce qui a fait la spécificité de la fondation du Poverello: constituer une véritable fraternité religieuse, avant de devenir une institution hiérarchisée et cléricalisée. Usant du vocabulaire du livre médiéval, il le rappelle avec force à ses successeurs.

S’il semble que l’ordre franciscain ait quelque peu oublié ses objectifs primitifs, par contre le SERMO n° 38, adressé aux frères dominicains réunis en chapitre général à Bologne, le 5 juin 1267, pour la seconde translation de saint Dominique 2370 , montre que l’orateur les considère comme membres d’un ordre savant, totalement intégré dans le monde universitaire: tout le sermon fourmille d’allusions au rôle et au poids du studiumdans la vie dominicaine. Avant de les aborder, quelques explications s’imposent sur le contexte où il prend place, qui justifie, avec d’autres indices, la date proposée.

La rubrique est explicite: « Sermon pour la translation de saint Dominique », non la fête de son natale . Cette translation ne peut être que la seconde, puisque la première a été opérée en 1233, avant la canonisation officielle du saint (1234), dont elle fut largement la cause 2371 . L’orateur fait clairement allusion à la nature de la fête, déclarant:

‘« Aujourd’hui, c’est la fête sollennelle de la translation de saint Dominique. Bien qu’il ait connu de multiples translations, de la vie à la mort par le baptême, de sa patrie au studiumde Palencia, du studiumà la religion, de la religion à la gloire, aujourd’hui aussi, après qu’il a été canonisé par l’autorité apostolique, son corps a fait l’objet d’une translation » 2372 .’

On peut hésiter sur le jour exact du sermon, puisque le propotype de la liturgie dominicaine, dont la composition est probablement achevée en 1260, a fixé au 24 mai la fête de la translation du saint fondateur 2373 . Elle correspond en général à la période précédant Pentecôte, et le chapitre général débute normalement le mercredi suivant cette fête, c’est à dire, en 1267, le 7 juin 2374 . Une chose est certaine, l’orateur s’exprime devant l’instance suprême de l’ordre 2375 . Les actes de ce chapitre général de Bologne de 1267 ne font aucune allusion à cette translation 2376 . Une lettre de Clément IV, ajoutée aux actes, du 27 mai 1267, 2377 , ainsi qu’une autre lettre du maître général de l’Ordre 2378 , ne l’évoquent pas davantage. Ce sont les circonstances concrètes, à savoir la durée des travaux, qui ont conduit l’ordre à fixer au dimanche de Pentecôte 1267, 5 juin, cette seconde translation. Que le sermon date de cette occasion, on en détient une dernière preuve, par l’étude de la tradition manuscrite: le texte ne se lit que dans la seconde édition du cardinal, correspondant à un recueil de sermons composé pour l’essentiel en 1267 2379 .

Le caractère universitaire du SERMO n° 38, donc la conscience d’avoir affaire à un auditoire savant, se marque par l’entrée en matière abrupte 2380 ; après le thème biblique, « Car qui donc méprisait ces jours de peu d’importance ? On se réjouira en voyant la pierre d’étain dans la main de Zorobabel » 2381 , le plan suit immédiatement:

‘« Ces mots relèvent d’une triple exposition: littérale, allégorique, tropologique. A la lettre; ils assurent les Juifs revenus de la captivité babylonienne que le Temple et les murs de Jérusalem seront reconstruits et achevés par le ministère de Zorobabel [...]. Allégoriquement, ils démontrent la venue du Christ dans la chair, et même pour le jugement, cela en tout premier lieu et principalement; dans un sens secondaire, ils nous indiquent comment saint Dominique a réparé la ruine de l’Eglise. Moralement, ils nous instruisent à mépriser la vie présente et à nous transporter vers la joie spirituelle, et nous démontrent la raison pour laquelle nous devons nous consacrer aux œuvres pies » 2382 .’

La première partie du sermon consacre d’abord un long développement à justifier la valeur et le sens de la lettre dans l’exégèse, la comparant, comme fondement de l’exégèse spirituelle, au rôle des faits dans l’établissement du droit. Ce parallèle n’est évidemment pas dû au hasard, puisque vers la fin de son discours, le cardinal s’en prend aux Dominicains qui ne respectent pas le testament de leur fondateur et usurpent le droit des autres religieux 2383 . Mais il s’agit aussi de justifier la méthode exégétique pour elle-même, car filant la métaphore juridique, le cardinal insiste sur l’exactitude scrupuleuse que l’examen de la litterarequiert: « Dans [l’étude] du sens littéral ou historique, il faut faire très attention à l’ordre des mots » 2384 . Cela après avoir défini, de la façon la plus classique et canonique, les quatre sens spirituels de l’Ecriture:

‘« Ainsi le sens historique est le préambule et comme le fondement pour accéder aux sens allégorique, tropologique, anagogique. Car c’est du sens historique ou littéral qu’est dégagé , comme d’un fait, le droit spirituel, à savoir ce qu’il faut croire, ce qu’il faut faire, ce qui sera, c’est à dire ce que nous devons croire, faire, espérer. Le devoir relève du droit, ou encore, il emporte le droit » 2385 .’

Une telle insistance sur le le lien entre droit et exégèse d’une part, entre principes fondés sur les faits et conduite d’autre part, ne prend son sens qu’à la lumière des très violentes attaques déclenchées contre les Dominicains et leurs principaux représentants à la fin du discours: ils sont accusés de détruire le droit naturel, fondement de la grâce, de ne pas respecter la morale élémentaire qui veut qu’on ne fasse pas aux autres ce qu’on ne voudrait pas qu’ils vous fassent 2386 . Visiblement, c’est d’usurpations, de violences et d’abus vis-à-vis d’autres établissements religieux, qu’un certain nombre de dignitaires de l’ordre de saint Dominique se sont rendus coupables 2387 . Il est difficile d’en dire plus, c’est à dire de deviner quels faits concrets sont visés par ces accusations, faits auxquels le cardinal donne tant d’importance au début de son sermon, comme révélateurs des dispositions spirituelles réelles qui animent ceux qui les commettent. On sait que les Dominicains n’ont pas marqué les mêmes scrupules que les Franciscains vis-à-vis de la propriété des bâtiments qu’on leur donnait 2388 . Avec le développement de leurs privilèges d’autre part, ils étaient très tôt entrés en conflit avec le clergé séculier, concernant les revenus liés à la cure d’âme 2389 . Il ne paraît pas plausible que l’orateur vise des débordements disciplinaires internes à l’ordre, tels ceux sanctionnés par les chapitres généraux, ce que ne manque pas de faire celui de Bologne en 1267 2390 . Une affaire précise est peut-être à l’origine de ces attaques: en février 1267 au plus tard, l’ordre mendiant « concurrent » des Servites de Marie s’est installé à Bologne dans une nouvelle église; après avoir d’abord reçu l’appui du cardinal-légat Simone Paltinieri, qui leur accorde le droit de bénéficier d’un autel portatif, les Servites sont victimes des attaques de l’évêque local, qui veut les empêcher d’exercer pleinement les fonctions pastorales que les privilèges du légat favorisent. Ils portent l’affaire en Curie, et si l’on n’en connaît pas l’issue, on sait qu’elle est encore en cours le 8 juillet 1267. En outre et surtout, les Dominicains, qui ont la faveur exclusive de l’évêque, conscient des bénéfices que lui vaut la présence dans sa ville du corps de Dominique, utilisent la translation proche pour faire valoir un privilège du même légat Simone Paltinieri, de 1265, interdisant toute construction d’une maison ou d’une église d’un autre ordre religieux dans un rayon de trois cents « cannes » autour de l’église San Domenico. Les Servites, qui tombent sous le coup de cet interdit, contestent dans le même appel en Curie la validité de ce privilège, postérieur disent-ils à leur installation dans le borgo concerné, San Petronio. Je serais enclin à penser que l’affaire, étant venue en Curie, n’est pas inconnue du cardinal. Comme en outre il n’aime pas Simone Paltinieri, l’un de ces cardinaux italiens promus par Urbain IV pour se ménager les clans romains et italiens au début de son pontificat, ses attaques contre les Dominicains, qu’il accuse accuse proprement de trahir le testament de leur fondateur 2391 , s’expliqueraient ainsi 2392 .

Ce testament se résume en trois mots: la charité, l’humilité et la pauvreté volontaire, qui suffoquent sous la violence de ceux qui devraient l’observer, et se comportent au contraire comme des brigands 2393 . Avec habileté, il retourne, contre maîtres provinciaux et prieurs, la seconde interprétation allégorique annoncée en introduction: Dominique a réparé l’Eglise en ruines, eux la détruisent, en détruisant le fondement sur lequel leur religion est installée, le testament du fondateur; affleure ici, les auditeurs y pensent obligatoirement, la phrase célèbre de l’Evangile, où le Christ confie son Eglise à Pierre pour qu’il la construise sur un roc solide, c’est à dire lui-même 2394 . Le cardinal ne peut pousser trop loin le parallèle, car il a pris soin au début de son discours, on l’a vu, de soigneusement distinguer l’interprétation allégorique, applicable au Christ dans son premier et son second Avent, et celle qu’il convient, à distance respectueuse et de façon secondaire seulement, d’appliquer à Dominique.

Le SERMO n° 38, dans ses louanges comme ses attaques, est donc entièrement construit sur les règles de l’herméneutique biblique qu’a toujours professées Eudes de Châteauroux, et qu’il ne se fait pas faute, face à une majorité d’auditeurs très au fait de toutes ces méthodes, d’utiliser contre eux.

A côté de ces attaques en effet, le vocabulaire de l’exégèse, de la logique et de la sémiotique lui permet de dresser un portrait flatteur de saint Dominique, comparé implicitement au prophète Elie 2395 . A partir de la notion de translation, le cardinal développe une série de considérations sur les relations de la cause et de l’effet, du modèle et de la copie, du signifiant et du signifié, qui reflètent parfaitement les termes en lesquels s’exprimait la réflexion herméneutique au XIIIe siècle:

‘« Vous savez en effet que les causes premières se transfèrent dans les causes secondes et exercent une certaine influence sur ce qu’elles ont causé. La cause influence ce qu’elle a causé, ou se transfère en ce qu’elle a causé, par influence, l’exemplar dans ce qui la copie, par imitation, les mots d’une langue dans ceux d’une autre langue, par interprétation, les mots d’une langue dans ceux de la même langue, par une exposition ou une explication, qu’on appelle glose. Ainsi saint Dominique par une sorte d’influence s’est translaté en ses disciples, qui ont reçu de sa plénitude, et continuent de recevoir, non en tant qu’il est cause ou agent, mais en tant qu’il est intercesseur » 2396 .’

L’origine réelle de la conversion observée chez certains hommes, Eudes de Châteauroux n’omet pas de le sous-entendre, c’est Dieu; le saint est seulement médiateur. L’intérêt essentiel de ce passage, c’est de revenir, au moyen du lexique de la translation, du transfert et de l’influence, à ce qui, en définitive, fonde la relation complexe de la lettre et de l’esprit dans la tradition herméneutique occidentale 2397 . L’effort pour accéder à la plénitude de l’Ecriture, même si cela n’est pas dit expressément, paraît vain, puisque toujours il y a perte de substance entre la cause ou exemplar ou agent, et ce qui en dérive. C’est pourquoi le cardinal, après avoir appliqué l’ensemble de ces processus à Dominique, comme à la cause et au modèle de son ordre, se sent obligé de marquer une réserve et de qualifier sa véritable fonction comme celle d’un interceseur. La même idée est reprise un peu plus loin, avec une variation: il n’y a jamais identité entre l’exemplaret l’exemplatum , et cela vaut pour la relation entre Dominique et ses disciples. Faute de pouvoir l’imiter exactement, ceux-ci peuvent au moins respecter ses volontés, ce qu’ils semblent s’abstenir de faire. L’un de leurs devoirs, c’est l’apostolat, et tout le SERMO n° 38 se donne comme la démonstration méthodologique de la façon dont on commente la Parole. En particulier, le très long passage, au début du sermon, consacré à l’explication de la lettre de la prophétie choisie pour thème, est un modèle d’exploitation des ressources complexes dont successivement la littera, le sensus et enfin la sententiadéroulent le processus 2398 .

On le voit, il n’y a pas de trace spécifique, dans les deux SERMONES consacrés aux fondateurs des ordres mendiants, d’une volonté de les singulariser particulièrement. Eudes de Châteauroux est plutôt enclin à utiliser leurs figures pour dénoncer, dans l’actualité de la vie des ordres, ce qui lui paraît un gauchissement, voire une trahison, de l’idéal primitif. Il distingue de ce fait nettement la différence, en voie de s’estomper à son époque, entre les deux principaux ordres mendiants: les Franciscains sont beaucoup moins cléricalisés 2399 et savants que les Dominicains, d’emblée hommes de la culture et de l’université. Mais sans préjugés en faveur de l’un ou l’autre modèle, c’est le risque de trahison qu’il pointe.

Plus généralement, l’ensemble des messages délivrés à propos de la sainteté, qu’il s’agisse de celle, toute récente, de Richard ou d’Hedwige, ou de celle, indiscutable et largement répandue, de François et Domnique, me paraît résumé dans l’insistance sur l’humanité de ces quatre personnages. Saints imitables plutôt qu’admirables, pour reprendre une expression d’A. Vauchez 2400 , ils le sont d’abord pour des raisons théologiques: très au-dessus deux, se tient le seul Sanctus . C’est bien pourquoi il revient au vicaire du pape de proclamer la sainteté, non de la décider. En retour, le caractère exemplaire de la sainteté que veut valoriser Eudes de Châteauroux s’explique avant tout par des buts pastoraux: procurer aux Chrétiens des modèles dont ils ne se sentent pas trop éloignés, pour leur rappeler que par la grâce et le baptême, ils sont tous appelés à partager à la fin des temps la royauté du Christ. Bref, les saints prennent place, dans l’ecclésiologie du cardinal, du côté de l’Eglise militante et du temps humain, non de l’Eglise triomphante et de l’éternité.

Notes
2323.

F. 89v: « lii°. Sermo in domo fratrum minorum que vocatur Sancta Maria de Porciola ubi migrauit ad Dominum beatus Franciscus, Luca x°: Homo quidam descendebat de Iherusalem, quaterno xi° voluminis quod incipit: Multi tyranni  ».

2324.

Voir ci-dessous, la troisième partie du chapitre.

2325.

Lorsqu’il apprend la nouvelle, Gui Foucois, l’élu, était légat pontifical pour l’Angleterre, tentant de régler sans y parvenir la querelle entre le roi Henri III et les barons anglais menés par Simon de Montfort. Il rejoint précipitemment les cardinaux ses électeurs dans la ville du conclave, Pérouse, et accepte son élection le 5 février 1265, cf. A. Franchi, Il conclave... op. cit., p. 53-58.

2326.

Cf. A. Paravicini-Bagliani, La mobilità... art. cit., p. 155-278, ici p. 237.

2327.

Cf. A. Franchi, Il conclave... op. cit., p. 53; et sur l’attention portée par le pape à l’ordre franciscain, P. Gratien, Histoire...op. cit., par exemple la bulle du 11 octobre 1265, citée p. 280 et note 35; en général à l’index s.v « Clément IV », p. 699.

2328.

Ce sermon est rubriqué: « Eadem duodecima dominica, in monasterio sancte Clare de Assisio, Luca x° », copié dans le ms. de Rome AGOP XIV, 34, f. 125vb-127ra (= RLSn° 464); et indiqué en note, au f. 87 du ms. de Paris, BNF lat. 15948, où on lit: « liii°. [même rubrique] Diliges Dominum tuum, xi° quaterno voluminis quod incipit: Multi tyranni ).

2329.

Fait confirmé aussi par des incipits très proches: pour le SERMO n° 28, voir l’édition; pour celui aux « Pauvres Dames »: « In euangelio quod currit per istam septimanam scribitur quod quidam legis peritus... » = Luc 10, 25.

2330.

Cf. M. Bihl, Documenta inedita archivi protomonasterii sanctae Clarae Assisii, dans AFHt. V (1912), p. 666 et notes 2 et 3.

2331.

Ibidem, p. 667-670

2332.

Ibidem, p. 669: mention d’Eudes de Châteauroux.

2333.

Ils ne peuvent avoir été prononcés pour la fête de ces saints: le 12 août pour sainte Claire; lors des nombreuses fêtes de saint François, canonisation, natale, translation, stigmatisation, dont aucune ne tombe en septembre; on les lit de plus dans un ms. de sermons du temps, celui de Rome, AGOP XIV, 34.

2334.

Sermons qui précèdent: RLSn° 459 à 464; sermon suivant: RLSn° 466.

2335.

Lc. 10, 30.

2336.

Lignes 3-4.

2337.

Cf. M. O’ Caroll, The Lectionnary... art. cit., p. 99 pour l’Evangile de Luc 10, 23-27.

2338.

Eudes de Châteauroux souscrit pour la dernière fois sous le pontificat d’Urbain IV le 30 janvier 1264 (Potthast, n° 18793; un document des Reg. Urbain IV, n° 686, fait allusion à lui le 17 juillet 1264). Le pape étant mort le 2 octobre 1264, et son successeur, Clément IV, ayant été désigné le 5 février 1265, le cardinal souscrit pour la première fois sous le pontificat de ce dernier le 26 février 1265 (Potthast, n° 19037 et 19038), puis à nouveau le 4 novembre 1265 (Potthast, n° 19436).

2339.

Voir ci-dessous, troisième partie du chapitre.

2340.

Sur les raisons de ce décalage de deux dimanches entre les deux systèmes de lectures liturgiques, décalage qui ne vaut que pour les lectures évangéliques d’ailleurs, cf. L. J. Bataillon, Sur quelques sermons de saint Bonaventure... art. cit., note 38 p. 503.

2341.

Cf. P.-M. Gy, La papauté et le droit liturgique aux XII e et XIII e siècles, dans The Religious Roles... op. cit., p. 229-245.

2342.

Lignes 109-112.

2343.

Cf. P. Gratien, Histoire... op. cit., p. 315 note 116.

2344.

Cf. A. Vauchez dans Histoire du Christianisme, t. V: Apogée... op. cit., p. 767-793.

2345.

Lignes 5-11.

2346.

Voir le chapitre I.

2347.

Cf. E. Mâle, L’art religieux du XIII e siècle en France, Paris, réédition de 1986, p. 15.

2348.

Sur les ambiguïtés de la réception par les laïcs du message religieux au XIIIe siècle, cf. A. Vauchez, dans Histoire du Christianisme, t. V: Apogée... op. cit., p. 849-852.

2349.

Voir J. Wirth, L’image médiévale. Naissance et développement (VI e -XV e siècle), Paris, 1989: mise au point équilibrée sur l’interaction texte-image, p. 221-230. Je précise que j’emploie « image » ici au sens général de figuration narrative, non dans celui, plus spécialisé, que lui a réservé H. Belting dans ses différents travaux, par exemple Image et culte. Une histoire de l’art avant l’époque de l’art, Paris, 1990.

2350.

Pour une tentative d’évaluation de ce que pouvait connaître des Evangiles un laïc assistant régulièrement à l’office dominical et aux grandes fêtes, cf. L.-J. Bataillon, Ad litteram. Authoritative Texts... art. cit., passim.

2351.

Lignes 61-63.

2352.

Lignes 80-81.

2353.

Lignes 89-92. cette description correspond bien aux premiers témoignages sur le développement de l’ordre, selon K. Esser, Origines et objectifs primitifs de l’ordre des frères mineurs, Paris, 1966, p. 27-60.

2354.

Cf. J. de Vitry, Histoire occidentale... trad. cit., p. 193-200.

2355.

L’allusion est évidente devant des Franciscains, adeptes de la pauvreté volontaire, car connaissant la source des vraies richesses.

2356.

Lignes 12-40.

2357.

Cf. Gn. 37, 23.

2358.

Lignes 43-44.

2359.

Lignes 49-51.

2360.

Lignes 61-65.

2361.

Lignes 79-81.

2362.

Cette insistance, à deux reprises, sur le caractère aussi bien féminin que masculin de la fraternité franciscaine, qui ne correspond pas aux origines de la fondation (cf. K. Esser, Origines... op. cit., p. 49), peut s’expliquer par la présence de « Pauvres Dames » dans le public, si le sermon est bien de 1265 et devait être suivi à peu de jours d’intervalle d’un second sur sainte Claire.

2363.

Lignes 86-92.

2364.

Lignes 99-100.

2365.

Cf. A. Vauchez, Les stigmates... art. cit., p. 146-147; à l’époque du sermon, 1264 ou 1265; la polémique semble avoir connu toutefois une accalmie.

2366.

Voir en particulier les lignes 105-108.

2367.

Lignes 107-108, et conclusion, lignes 109-111.

2368.

Voir le chapitre IV.

2369.

Sur cet aspect du généralat de Bonaventure, J. Dalarun, François d’Assise... op. cit., est particulièrement incisif, voir par exemple p. 99, p. 108.

2370.

Sur cette seconde translation, cf. A. Mortier, Histoire des maîtres généraux de l’ordre des frères Prêcheurs, t. II, Paris, 1905, p. 53 s.; Bibliotheca Sanctorum, t. IV (1964), col. 692-734, ici col. 721; A. Vauchez dans Histoire des saints et de la sainteté chrétienne, t. VI: Au temps du renouveau évangélique, 1054-1274, Paris, 1986, p. 122. C’est le maître général de l’ordre, Jean de Verceil, qui pense, face au développement du culte du fondateur, qu’il est nécessaire de construire, dans l’église San Domenico inaugurée en 1251 par Innocent IV pour abriter les restes du saint, un nouveau sépulcre. Le tombeau, dit l’« arca », toujours visible aujourd’hui, fut l’œuvre de Nicola Pisano, aidé par Arnolfo di Cambio.

2371.

Cf. M.-H. Vicaire, Histoire... op. cit., t. II p. 334-342, sur la première translation et la canonisation.

2372.

Lignes 77-81.

2373.

A. Walz, dans sa brève présentation à l’édition du texte, suggérait cette date, sans proposer d’année, cf. Idem, Odonis de Castroradulphi... art. cit., p. 209.

2374.

Cf. M.-H. Vicaire, Histoire de saint Dominique... op. cit., p. 335 note 29.

2375.

Ligne 190: « Vos chapitres, en particulier généraux, devraient se tenir dans ce but... »; et ligne 193: « Que le Seigneur Jésus-Christ vous donne d’agir ainsi dans vos chapitres... ».

2376.

Ed. B. M. Reichert, MOPH, t. III, Acta capitulorum... op. cit., vol. I (ab anno 1220 usque ad annum 1303 ), p. 136-140.

2377.

Potthast, n° 20022.

2378.

Ed..B. M. Reichert, MOPH, t. V, Litterae encyclicae magistrorum generalium O. P. (1235-1376), Rome, 1900, app. n° xviii p. 71-73.

2379.

Une note du ms de Paris, BNF lat. 15947, le signale de la façon suivante, f. 277v: « Sermo in translatione sancti Dominici, Zacharia iii°: Quis enim despexit dies paruos ? , xx°iiii° quaterno, scilicet voluminis quod incipit: Gratia Domni nostri »; or la composition de ce recueil, mentionné dans le prologue, sous Clément IV, à Viterbe, est datable des neufs derniers mois de 1267 (voir ci-dessous, troisième partie du chapitre).

2380.

En toute hypothèse, on peut se demander si Thomas d’Aquin ne faisait pas parti de l’auditoire, puisqu’il a beaucoup côtoyé la Curie durant son long séjour à Orvieto, de 1261 à 1265, puis enseigne à Rome, entre 1265 et 1268, cf. J.-P. Torrell, Initiation... op. cit., p. 171-259.

2381.

Zach. 4, 10.

2382.

Lignes 3-10.

2383.

Lignes 177-192.

2384.

Lignes 17-18.

2385.

Lignes 13-16.

2386.

Lignes 177-184.

2387.

Lignes 160-172.

2388.

Cf. A. Vauchez, dans Histoire du Christianisme, t. V: Apogée... op. cit., p. 785-792.

2389.

Voir le chapitre IV.

2390.

Cf. B. M. Reichert, Acta... éd. cit.,p. 139-140, lignes 24 s.

2391.

Lignes 158-160. Sur ce testament, cf. J.-J. Berthier, Le testament de saint Dominique avec les commentaires du cardinal Eudes de Châteauroux et du bienheureux Jourdain de Saxe, Fribourg, 1892, en particulier p. XII-XIII; l’auteur étudie et traduit un autre sermon d’Eudes de Châteauroux sur ce sujet, le RLS n° 654 (Cf. aussi A. Walz, Odonis de Castroradulphi... éd. cit., p. 204-209).

2392.

Voir sur toute cette affaire F. A. Dal Pino, I frati servi di Santa Maria dalle origini all’approvazione (1233 ca.-1304), t. I, Storiografia - Fonti - Storia, vol. 2, Louvain, 1972, p. 996-1000.

2393.

Lignes 114-115.; lignes 160-162.

2394.

Mt. 16, 18 : « quia tu es Petrus, et super hanc firmam petram aedificabo ecclesiam meam ». Que le « roc solide » s’applique au Christ lui-même, non à l’apôtre, et que ce passage biblique n’ait servi que postérieurement aux théocrates pour appuyer la primauté papale et la commission pétrine, est amplement démontré par K. Froechlich, Saint Peter, Papal Primacy... art. cit., p. 3-40; la mutation majeure intervient, comme souvent, avec Innocent III, p. 40 s.

2395.

Ligne 91.

2396.

Lignes 83-89.

2397.

Cf. G. Dahan, L’exégèse chrétienne... op. cit., p. 389-444, sur le vocabulaire et le sens de la translatioen exégèse.

2398.

Lignes 17-64. Sur ces différentes étapes de l’exégèse littérale, analyse textuelle, contextuelle et enfin analyse du sens, philosophique ou théologique, contenu dans la lettre, cf. G. Dahan, L’exégèse... op. cit., p. 239-297.

2399.

Ce qui n’est pas contradictoire avec la notion d’ordre religieux, puisqu’au départ, les moines sont des laïcs.

2400.

Cf. A. Vauchez, Saints admirables et saints imitables: les fonctions de l’hagiographie ont-elles changé aux derniers siècles du moyen âge ?, dans Les fonctions des saints dans le monde occidental (III e -XIII e siècles), Rome, 1991, p. 161-172.