SERMO n° 36 (RLS n° 740), inédit.

Pour sainte Hedwige, duchesse de Pologne

Sermon donné peu après le 27 mars 1267.

« A-t-elle vu un champ, elle l’a acquis; du produit de ses mains, elle a planté une vigne; Elle ceint vigoureusement ses reins » 3988 . Ces mots sont prononcés à propos de la « femme forte », qui désigne métaphoriquement la sagesse; cet éloge de la femme forte contient vingt-deux versets, dont chacun débute par une lettre de l’alphabet hébraïque; chaque lettre est une clef interprétative pour l’intelligence de ces versets; la lettre « zay » précède le verset thématique et s’interprète « vers là » ou « conduis-toi »; verset qui convient aussi à Hedwige et décrit, par la lettre zay, les raisons pour lesquelles elle a été inscrite au catalogue des saints; ensuite, A-t-elle vu un champ, elle l’a acquis, démontre la prudence d’Hedwige et les effets de cette prudence; du produit de ses mains, elle a planté une vigne, indique les bienfaits qu’elle a engendré au profit de l’Eglise de Dieu; enfin, elle ceint vigoureusement se reins prouve sa parfaite chasteté.

1. L’interprétation de zayveut démontrer que si le sort d’un défunt dans l’au-delà ne peut être modifié, l’inscription au catalogue des saints par l’église romaine, seule habilitée à le faire, profite aux vivants en leur indiquant ce à quoi ils doivent tendre; ils peuvent imiter les saints et espérer jouir du même sort; c’est pourquoi la vie et les miracles de ces derniers sont examinés avec tant de soin; tous les habitants du paradis sont saints, mais tous ne sont pas toujours proclamés tels: seuls les plus éminents, sur la foi de ces témoignages, ont droit à l’inscription au catalogue;

2. A-t-elle vu un champ, elle l’a acquis : ce champ, c’est celui de l’éternelle béatitude, trésor de tous les biens, ouvert aux pénitents qui ont soldé leur dû par une juste satisfaction; Hedwige a vu ce champ, où l’on jouit face à face de la vision de Dieu; l’achat par Abraham de la grotte d’Effron fut une figure de ce champ; Hedwige a vuce champet l’a acquis par ses prières dévotes, ses désirs assidus, ses jeunes stricts, ses aumônes abondantes, la libération de captifs, le froid, la nudité, les veilles et la chasteté; elle était de très haute naissance: de ses trois frères, l’un fut archevêque d’Aquilée, l’autre évêque de Bamberg, le troisième duc de Méranie et comte de Tyrol; de ses trois soeurs, l’une fut abbesse cistercienne, le seconde reine de Hongrie, mère de la bienheureuse Elisabeth, la troisième reine de France, épouse du roi Philippe; elle-même épousa le duc de Pologne Henri, en eut deux fils et une fille qu’elle plaça dans le monastère cistercien qu’elle avait fait construire; pourtant, elle refusa tout ce qui venait de la table de son mari et jeûna durant trente-sept années; chaque nuit elle se levait à matines et ne se recouchait pas, se consacrant aux oraisons et à entendre des messes; elle priat toujours debout ou prostrée, jamais assise, marchait nu-pieds, avait les genoux calleux comme ceux des chameaux à force de génuflexions, les pieds fendus par le gel et le froid, au point qu’on suivait à la trace le sang de ses pas; elle s’abstint trente années du lit conjugal et passa les sept années qu’elle survécut à son mari dans les macérations, vivant dans le monastère qu’il avait fait construire et qu’elle avait ensuite doté, multipliant les aumônes, les rachats de captifs; malheureux ceux qui depuis longtemps ont vu ce champ mais ne l’ont pas acheté, accumulant au contraire richesses et pouvoirs, y compris par la simonie; ils lient leur âme et leur corps au diable par un bail emphytéotique, au lieu d’accueillir le roi pacifique en faisant pénitence; cette sainte-ci a quitté le monde pour la contemplation de ce champ; et n’a pu s’empêcher de l’acheter;

3. du produit de ses mains, elle a planté une vigne : à la lettre, elle a poussé son mari à construire un moanstère de nobles dames; après sa mort, elle a planté un autre monastère où mille personnes sont nourries chaque jour; malheur à ceux qui font pousser des forêts stériles, pleines d’épines et de ronces;

4. elle ceint vigoureusement se reins : quoique mariée à un homme noble et puissant, elle le persuada dès leur jeunesse de vivre séparément pour se consacrer à la prière; ils sont ainsi demeurés chases trente ans, bien que l’union charnelle fût dans leur cas parfaitement licite; malheur à nous qui transgressons tant d’interdits, et continuons dans cette voie; par la chasteté l’homme maîtrise la chair, qui constitue une bonne part de son être; il maîtrise la sensualité qui constitue une bonne part de son âme; ce combat, c’est en quelque sorte un combat contra la raison; suivons, même de loin, les traces de cette sainte, pour espérer recevoir, certes sous une forme différente, la récompense qu’elle a reçu.

Ms P, f. 122rb-125rb; ms A, f. 144ra-146va.

Sermo de sancta Adwigi ducissa Polonie. Prouerbiis ultimo: Considerauit agrum et emit illum; de fructu manuum suarum plantauit vineam, accinxit fortitudine lumbos suos 3989 .

Hec verba dicuntur de muliere forti, per quam metaphorice sapientia designatur, que opponitur mulieri fornicarie, id est errori a cuius amplexibus Salomon paruulos dehortatur, et inuitat econtrario ad amplexus sapientie, ut ei inhereant matrimonialiter, id est inseparabiliter, et eam commendat multipliciter in multis locis dicti libri, et ad ultimum in laudibus ipsius terminat librum suum. Et loquitur de ea sub metaphora mulieris quando dicit: Mulierem fortem quis inueniet 3990 etc? Et laus ista continet viginti duos versiculos siue clausulas, quarum quelibet incipit in hebraico a litteris hebraicis, secundum ordinem alphabeti, prima a prima et secunda a secunda, et sic deinceps, ut per hoc ostendatur quod hanc laudem sapentie debemus habere descriptam in tabulis cordis nostri, ut eam semper habeamus pre oculis, ut eam non negligamus nec eius obliuiscamur 3991 . Et littere iste ratione interpretationum scripturarum 3992 sunt quasi tituli et claues ad ingrediendum ad intelligentiam ipsarum clausularum seu versuum, quibus preponuntur. Predicto enim versiculo preponitur zay, quod interpretatur « huc » vel « duc te »; et licet predicta verba intelligantur ut dictum est de sapientia, nichilominus conueniunt 3993 beate Adwigi 3994 , que fuit amatrix sapientie et discipula 3995 eius. Et primo ostenditur nobis quare laboratum est ad hoc ut beata Adwigis ascriberetur sanctorum cathalogo per hanc litteram: zay ; secundo nobis ostenditur prudencia eiusdem domine et opus eiusdem prudencie cum dicit: Considerauit agrum et emit illum ; tertio quem fructum fecit in ecclesia Dei, cum dicit: De fructu manuum suarum plantauit vineam ; quarto eius perfecta castitas, cum dixit: Accinxit fortitudine lumbos suos.

1. Ut dictum est huic clausule preponitur zay, siue hec clausula initiatur ab hac littera: zay, quod interpretatur « huc » vel « duc te » 3996 . Licet enim merita post 3997 mortem non mutentur nec possint statum suum mutare 3998 anime mortuorum, quia ut dicit Salomon, Ecclesiaste xi°: Si ceciderit lignum ad austrum aut ad aquilonem, in quocumque loco ceciderit ibi erit 3999 , nec per hoc quod aliquis ascribitur cathalogo sanctorum, ingreditur quis paradisum vel egreditur ab inferno, nec ob hoc ipsius merita augmentantur, vel ei datur corona amplior, tamen hec ascriptio facta per ecclesiam romanam, que sola habet auctoritatem talia faciendi, fit ad utilitatem viuentium, ut sciant quo tendere debeant et quo se ducere. Per huius enim canonizationem diuulgatur bona vita illius qui sanctorum cathalogo annotatur, ut hec audientes sciant per que opera ad sanctorum consortium valeant peruenire, ac si diceretur unicuique audienti: zay , quasi « huc » -supple: tende-, huc dirige iter tuum tanquam tui ductor et rector, id est operare que talis sanctus vel talis sancta 4000 operata est. Ac si diceremus cum Psalmista: Vias tuas Domine demonstra michi et semitas tuas edoce me 4001 , per quas possim venire ad te; et Dominus respondet nobis per ecclesiam: « Sequamini vestigia istorum ut quemadmodum isti fecerunt, ita et vos faciatis ut ad locum ad quem peruenerunt valeatis peruenire ». Ad hoc inuitabat 4002 apostolus cum dicebat: Imitatores mei estote sicut et ego Christi 4003 . Sic Dominus dedit filiis Israel columpnam quam sequerentur pergentes per desertum, que eos ducebat ad hereditatem sibi a Domino repromissam. Sic dedit eis et angelum qui eos precederet et duceret ad locum destinatum. Sic ecclesia canonizando sanctos dat nobis et assignat quos sequi debeamus. Si enim non canonizarentur, nesciremus quos sequi deberemus, nec qualia opera fecissent sciremus certitudinaliter. Et ideo cum tanta diligentia vita eorum examinatur nec non etiam et miracula, per que certificamur de supereminenti sanctitate eorum, ut libentius eos imitemur. Omnes enim qui in paradiso sunt sancti sunt, non tamen sancti vocantur, nec de eis sollempnitas agitur, sed illi tantum quorum supereminens sanctitas per testes omni exceptione maiores probatur. Ideo recte huic versiculo in quo sanctitas beate Adwigis describitur, zay littera preponitur, que interpretatur « huc » vel « duc te », ac si dicas: « Sequere vestigia huius sancte ut ad gloriam ad quam venit valeas peruenire ».

2. Versiculus autem talis est: Considerauit agrum et emit illum. Ager iste est eterne hereditatis 4004 possessio, de qua: Ecce odor filii mei sicut odor agri pleni quem benedixit Dominus 4005 . Odor enim sanctorum est sicut odor agripleni. Redolent enim in eterna beatitudine ut in nobis excitent desiderium habendi et acquirendi eam. De isto agro est thesaurus omnium bonorum, sed absconditus a nobis, quia eum modo non videmus, unde Psalmista dicit: Quam magna multitudo dulcedinis tue Domine quam abscondisti timentibus te 4006 . Sed in morte iustis qui soluerunt debita sua per fructus dignos penitentie vel per martirium, thesaurus iste aperitur. Et ideo mortem expectant cum desiderio, quasi effodientes thesaurum, gaudentque 4007 vehementer cum inuenerunt sepulchrum, quia tunc thesaurum istum inueniunt et possessionem ipsius adipiscuntur. Hunc agrum considerauit beata Adwigis, scilicet quam delectabilis, quam securus, quam plenus omni bono et quod omni libertate dotatus et privilegiatus, quod ibi vita perpetua, sanitas perfecta, societas angelorum, et quod plus est visio Dei aperta et amor Dei perfectus absque ullo impedimento, et Dei fruitio. Et quia inuenit eum talem, ideo emit eum, in cuius figura legimus quod Abraham emit speluncam dupplicem quam habebat Effron in extrema parte agri sui; unde Effron dixit ei: Agrum tradam tibi et speluncam que in eo est 4008 . Et dedit pecuniam pro agro 4009 , quadringentosscilicet argenti siclos 4010 . Et dixit Effron: Quadringentis argenti siclis valet, istud est pretium inter me et te. Sed quantum est hoc ? 4011 ; et subiungitur quod Abraham appendit pecuniam quam Effron 4012 postulaverat, audientibus filiis Hetz, quadringentos siclos argenti probate monete publice dedit ei 4013 . Confirmatusque est ager ei 4014 . Ager iste fuit Effron, qui interpretatur puluis inutilis, id est malorum angelorum qui ab eo velut puluis inutilis vento superbie sunt eiecti. Hunc agrum sancti non volunt habere pro nichilo, licet ad hoc inuitet eos Effron. Et verum est quod, quantumcumque sit pretium, nullum est in comparatione agri, sicut dicit Effron. Et hoc precium debet esse probate monete, ut habeat debitam materiam et pondus debitum, ut scilicet sit de genere bonorum et facta recta intentione et informata caritate. Ea vero quibus debeamus emere agrum istum, debent esse publice monete. Non enim petitur a nobis ut pro regno celorum habendo extranea et inconsueta faciamus, sed ea que publica sunt et consueta. In signum etiam huius Ieremias, licet predixisset imminentem 4015 captiuitatem populi, et licet esset in atrio carceris 4016 , cum magna diligentia emit agrum Ananael patruelis sui, qui erat in Anathoth in terra Beniamy, quia ei competebat ex propinquitate, Ieremia xxxii° 4017 . Ananael interpretatur gratus Deo vel cui donauit Deus, hic est Christus, cuius hereditatem emere debemus dum sumus in hoc mortali corpore, et maxime dum sumus in atriohuius carceris, hoc est in morte per quam est egressus ab hoc carcere.

Hunc agrum considerauit beata Adwigis et emit eum desideriis assiduis, orationibus deuotis, artis ieiuniis, largis elemosinis, liberatione captiuorum, frigore, nuditate, vigiliis, castitate. Licet enim esset nobilis, immo nobilissima filia ducis Merannie 4018 , habens tres fratres carnales, patriarcham Aquilegensem, episcopum Bambergensem et ducem Merannie comitem de Tyrol; tres sorores, unam que fuit abbatissa in ordine ciscertiensi, alteram reginam Ungarie, matrem beate Helizabeth, tertiam reginam Francie uxorem regis Philippi; haberet et ducem Polonie Henricum in maritum et duos filios ex eo et unam filiam quam posuit in monasterio ordinis cisterciensis quod ipsa construxerat; ipsa enim, licet esset habundans ex omni parte, nolens tangere ea que erant de mensa mariti sui, artissimam vitam duxit in ieiuniis continuis, abstinens a carnibus, piscibus et pulmentis per triginta septem annos, et etiam a vino ut frequentius. Omni nocte ad matutinum surgebat, post matutinum numquam dormiebat, orationibus intenta et missis audiendis usque ad meridiem. Numquam sedebat in ecclesia, sed stans vel prostrata orabat, ex frequenti genuflexione callos 4019 habens in genibus ad modum camelorum, nudis pedibus ambulabat ad ecclesiam, quantumcumque remota esset ecclesia a domo sua -numquam enim in domo sua audire volebat missam-, pedes scissos habebat ex violentia gelu et frigoris et propter asperitatem vie, ita quod frequenter sanguis de eis fluebat, qui in eius vestigiis apparebat. A thoro mariti triginta annos abstinuit, post mortem autem mariti sui septem annos superuixit, in quibus etiam artiorem vitam duxit in monasterio quod maritus suus edificauerat, et ipsa postmodum dotauerat. Largissima erat in elemosinis, vestibus non utebatur 4020 , nisi prius fuissent attrite ab aliis, captiuos propria pecunia liberabat. Hiis et multis aliis que longum esset enumerare predictum agrum emit, vere bona negotiatrix.

Sed multi sunt qui, licet longo tempore considerauerunt agrum illum, tamen illum emere negligunt. Sed miseri qui, consideratione non habita, emunt agrum sterilem plenum miseria et angustia. Si enim bene considerassent, non illum emerent neque illum acciperent, si pro nichilo eis daretur. Emunt enim honores et delicias multis laboribus et expensis, etiam anima propria et corpore proprio, non considerantes quid emunt. Sed tarde hoc considerare volunt, etiam post mortem, sicut ille de quo legitur Luca xiiii°: Villam emi et necesse habeo ire et videre illam 4021 . Similiter ibidem: Iuga bovum emi quinque et eo probare illa 4022 . Et uterque istorum dixit: Rogo te habe me excusatum 4023 . Multi enim excusant se postquam emerunt laboribus et expensis dignitates et potestates, ad litteram etiam aliquando per symoniacam prauitatem, similiter et diuicias cumulauerunt, quod si probassent et considerassent ea que 4024 in predictis inuenerunt, numquam ea emissent. Verum qui duxit uxorem non se excusat quia carnis voluptas totum absorbat hominem, nec permittit quod consideret quid emerit, ne sic considerando peniteat. Attendunt enim isti mercatores tantum caput vituli et caudam non considerant. Caput delectatio est, cauda quod sequitur ex peccato, dampnum, pena, confusio. Si enim consideraret caudam, numquam caput vituli adorarent. Volunt enim edificare turrim et non considerant sumptus qui necessarii 4025 sunt. Qui enim emunt predicta et circa hanc emptionem laborant, sumptus non considerant, quia non tantummodo in emendo consumunt sua, sed etiam corpus et animam obligant diabolo in perpetuam emphiteosim, Luca xiiii° 4026 . Iterum non considerant quod emendo predicta, prouocant contra se regem cui non poterunt occurrere resistendo. Quod si considerarent, occurrerent regi illi mittendo legationem et rogando ea que pacis sunt, preoccupando faciem Domini, penitendo et satisfaciendo.

Ista beata de qua loquimur antea considerauit agrum regni celorum et postea emit illum, unde decepta non fuit. Fuit enim de numero illarum in quarum persona dicitur Cantico vii°: Egrediamur in agrum 4027 . Per considerationem fecit sicut Ysaac, de quo legitur Genesi xxiiii° quod egressus fuerat ad meditandum in agro 4028 . Sic ista beata egressa a sollicitudinibus mundi ingressa est in agrum istum per contemplationem, ut meditaretur que et qualia essent in agro illo, hoc est consideraret, quibus inspectis et consideratis non potuit se continere quin emeret agrum illum, dando pro agro illo omnem substantiam domus sue. Quasi nichil despexit illam, id est omnem substantiam domus sue, unde vere poterat dicere cum Psalmista: Et substantia mea tanquam nichilum ante te 4029 , id est diuicie et honores, delicie et nobilitas nichil sunt in comparatione Dei, quem emimus emendo agrum istum. Unde vere poterat dicere illud psalmi: Quid enim michi in celo et a te quid volui super terram ? Defecit caro mea et cor meum, Deus cordis mei et pars mea Deus in eternum 4030 . Dicitur in Prouerbiis xx°: Malum est malum est, dicit omnis 4031 emptor et cum recesserit gloriabitur 4032 . Hec autem considerato agro predicto in emendo non dixit: Malum est malum est, sed potius: bonum est, bonum est. Bonum sibi, bonum aliis, quia alios exemplo suo et verbo inuitabat ad emendum dictum agrum, et ideo recedens ab hoc seculo gloriata est in premio quod accepit et etiam in premio quod alii exemplo suo acceperunt vel accepturi sunt.

3. Sequitur: De fructu manuum suarum plantauit vineam. Ad litteram induxit virum suum ad edificandum nobile cenobium dominarum et post mortem viri illud dotauit de dote sua et plantauit illud monasterium de virginibus nobilibus, monachis et conuersis et aliis familiaribus. Posuit ibi magnum conuentum. Sustentantur enim cotidie in monasterio illo mille persone. Ibi viget religio et floret. Habundat ibi vinum compunctionis, habundat ibi vinum leticie spiritualis quo redundant. Ibi torcularia, iuxta promissionem Ioelis prophete: Redundabunt torcularia vino et oleo 4033 . Sacre enim virgines ibidem commorantes prelo, id est pondere obseruationis monastice, divini officii, disciplinarum, vigiliarum, ieiuniorum oppresse, vino iocunditatis interioris redundant et aliis etiam ministrant. Secundum enim multitudinem onerum que portant et sustinent, consolationes diuine letificant animas eorum. Et ut plenius et perfectius exponamus quod dicitur: De fructu manuum suarum plantauit vineam, vere possumus dicere quia quotquot bona opera fecit, tot vites plantauit, quia ex hiis collegit et 4034 colligere non cessat leticiam et iocunditatem 4035 . Vinum enim in iocunditate creatum est et letificat Dominum et homines, ut legitur in libro Iudicum ix° 4036 . Introducitur enim ibi loquens vitis, loquens ad ligna siluarum que nolebant ut imperaret eis; et ipsa respondit eis: Numquid possum deserere vinum meum quod letificat Deum et homines et inter cetera ligna commorari ? 4037 Ipsa enim plantauithanc vineam, quasi vineam Soreth, in cornu filio olei 4038 , in loco pingui et eleuato; eam plantauit de plantis electis, id est de operibus electis.

Sed vhe miseris qui de fructu operum suorum plantant non vineam, sed ligna siluarum sterilia, spinas et tribulos 4039 quibus punguntur in conscientiam et lacerantur intrinsecus, et cruentantur sanguine peccatorum ex quibus ad ultimum comburentur. Terra eorum germinat sibi spinas et tribulos. Ea enim que faciunt plantaria sunt et seminaria dolori et cruciatus eterni. Congregant enim sibi ligna quibus comburentur, id est mala opera sibi accumulant. Dicit apostolus ad Hebreos vi° quod terra proferens spinas et tribulos reproba est et maledictioni 4040 proxima cuius consummatio in combustione 4041 . Et in Prouerbiis xxiiii°: Per agrum hominis pigri transiui et per vineam viri stulti et ecce totum repleuerant urtice et operuerant superficiem eius spine 4042 ; et Ysa. xxxiiii°: Orientur in domibus eius spine et urtice 4043 .

4. Sequitur: Accinxit fortitudine lumbos suos. Hoc verificatum fuit in ista domina. Licet enim nupta est viro nobili et potenti quem diligebat et a quo 4044 diligebatur et a quo susceperat duos filios et unam filiam, induxit virum suum, licet adhuc esset in flore iuuentutis, ut se separarent ad inuicem et vacarent orationi; et sic permanserunt separati quo ad thorum per triginta annos. Vere accinxit fortitudine lumbos suosabstinens a carnis commixtione sibi licita, se castrans propter regnum celorum. Licet enim commixtio carnalis 4045 sibi esset licita, abstinuit tamen ut melioribus vacaret liberius et expeditius. Habebat enim in mente verbum apostoli dicentis ia ad Corinthios: Omnia michi licent sed non omnia expediunt 4046 . Habebat enim in corde suo et in opere illud apostoli ia ad Corinthios vii°: Hoc itaque dico fratres: tempus breue est, reliqum est ut qui habent uxores tanquam non habentes sint 4047 . Ista illicita non commiserat, ut oporteret eam a licitis abstinere.

Sed vhe nobis miseris, qui multa illicita commisimus; tamen 4048 per satisfactionem commissorum a licitis non volumus abstinere -quod esset facere dignos frictus penitentie-, et quod peius est, etaim ab ipsis illicitis abstinere nolumus, sed ea continuamus, imitatores diaboli qui nec satisfacere vult de preteritis, nec cauere a futuris, sed in sua malicia perseuerat. Dictum est peccatori per prophetam: Peccasti, quiesce 4049 ; et Ysa. i° dicitur: Quiescite peruerse agere, discite bene facere 4050 ; et nota quod dixit: Accinxit fortitudine lumbos suos, non dixit: Accinxitcastitate lumbos suos, quod si dixisset verum dixisset; sed dixit fortitudine, ad ostendendum 4051 quod magne fortitudinis est seipsum vincere, et quodammodo maioris virtutis, quam vincere alium. Per castitatem enim homo superat carnem suam que magna portio ipsius est. Superat etiam et sensualitatem que pars anime est; superat enim serpentem et Evam; nichilominus in hoc superat mundum suggerentem et diabolum incendentem; et ideo bene castitatem fortitudinem appellauit et dixit: Accinxit, quod est pugnantium. Magna enim pugna est resistere concupiscentie carnis, maxime cum iustam et licitam causam habere videatur concupiscendi, ut in coniunctis matrimonio, unde hic oportet quodammodo contra rationem pugnare. Accingit autem homo se gladio, ut 4052 gladium semper habeat paratum ad pugnandum. Et si enim parati semper esse debemus ad pugnandum contra alia vicia, maxime contra vicium carnis, quod numquam dormitat nec cessat ab insultu, et cum alia videantur vicia de necesse quodammodo dormitare, maxime omnibus dormientibus, hoc vicium tunc non cessat sed tunc maxime insultus dat et vires tunc sumit ad faciendum insultum. Ideo semper debet homo esse accinctus gladio castitatis, sicut Hesdras precepit edificantibus muros Iherusalem ut essent accincti gladio et una manu tenerent gladium ne hostes subito irruerent in ipso, Hesdra iiii° 4053 . Hec autem bene fuit accincta fortitudine castitatis, et pugnauit continue contra carnales concupiscentias et usque 4054 ad mortem in hoc perseuerauit, et ideo victoriam habuit et brauium et coronam glorie immarcessibilis sempiternam.

Sequamur ergo karissimi vestigia eius et si a longe, ut brauium, et si non tamen sicut ipsa, opitulantibus eius meritis et precibus, recipiamus, prestante Domino nostro Ihesu Christo qui cum patre et spiritu sancto viuit et regnat, Deus per omnia secula seculorum. Amen.

Notes
3988.

Prov. 31, 16-17.

3989.

Prov. 31, 16-17.

3990.

Prov. 31, 10.

3991.

Cf. Prov. 31, 10-31.

3992.

sciarum] mss.

3993.

F. 144rb A.

3994.

F. 122va P.

3995.

disciplina] mss.

3996.

M. Thiel, p. 445, s.v « Zain » d’après Ambroise.

3997.

mortem non mutentur nec possint statum suum mutare anime mortuorum, quia ut dicit Salomon] add. marg. P.

3998.

nec possint statum suum anime mortuorum] A.

3999.

Eccle. 11, 3.

4000.

F. 122vb P.

4001.

Ps. 24, 4.

4002.

F. 144va A.

4003.

1. Cor. 11, 1.

4004.

he-(f. 123ra)-reditatis] P.

4005.

Gn. 27, 7.

4006.

Ps. 30, 20.

4007.

F. 144vb A.

4008.

Gn. 23, 11.

4009.

Gn. 23, 13.

4010.

Gn. 23, 16.

4011.

Gn. 23, 14.

4012.

F. 123rb P.

4013.

Gn. 23, 16.

4014.

Gn. 23, 17.

4015.

F. 145ra A.

4016.

Cf Jer. 32, 2.

4017.

Cf Jer. 32, 7-8.

4018.

F. 123va P.

4019.

cal-(f. 145rb)-los A.

4020.

F. 123vb P.

4021.

Lc. 14, 18.

4022.

Lc. 14, 19.

4023.

Lc. 14, 19.

4024.

F. 145va A.

4025.

ne-(f. 124ra)-cessarii P.

4026.

Cf. Lc. 14, 24-35.

4027.

Cant. 7, 11.

4028.

Gn. 24, 63.

4029.

Ps. 38, 6. F. 145vb A.

4030.

Ps. 72, 25-26.

4031.

F. 124rb P.

4032.

Prov. 20, 14.

4033.

Joel 2, 24. et oleo] add marg. P.

4034.

F. 146ra A.

4035.

iocun-(f. 124va)-ditatem P.

4036.

Idc. 9, 13.

4037.

Idc. 9, 13. commoueri] Vulgate.

4038.

Is. 5, 1.

4039.

Cf. Hb. 6, 8.

4040.

maledicto] Vulgate.

4041.

Hb. 6, 8.

4042.

Prov. 24, 30-31.

4043.

Is. 34, 13.

4044.

F. 124vb P.

4045.

car-(f. 146rb)-nalis A.

4046.

1. Cor. 6, 12.

4047.

1. Cor. 7, 29.

4048.

tamen] add. marg.P.

4049.

Cf. Eccli. 21, 1.

4050.

Is. 1, 16-17.

4051.

F. 125ra P.

4052.

F. 146va A.

4053.

Cf. 2. Esr. 4, 16-18.

4054.

F. 125rb P.