SERMO n° 57 (RLS n° 931), éd. F. Iozzelli p. 229-235 4357 .

Réponse aux envoyés de Paléologue, Empereur des Grecs.

Sermon donné le 29 juin 1269.

1. (lignes 1-62) Je glorifierai le lieu où je me tiens et les fils de tes anciens oppresseurs s’humilieront devant toi; et se prosterneront à tes pieds ceux qui te méprisaient 4358 . Dieu a promis cela à son Eglise, tout spécialement à l’église romaine, qui constitue les pieds du Seigneur, c’est à dire à Pierre et à Paul qui la supportent devant les rois et les chefs, car leur ferveur et leur lien avec la tête de l’Eglise les assimilent particulièrement au Christ parmi les apôtres; les autres apôtres se sont vus attribuer des provinces déterminées, eux ont exercé une juridiction sans limites, Paul sur les Gentils, Pierre sur les Juifs; Pierre a été désigné par le Christ comme le chef des apôtres et son vicaire général: sa foi serait celle de l’Eglise, même si Jean ou Jacques n’en ont pas professé une différente; c’et pourquoi en cas de doute on a recours à son successeur; les papes ont présidé tous les conciles où fut définie la foi; mais si Pierre fut la tête immédiate de la circoncision, il ne fut qu’intermédiaire par rapport au prépuce: de même aujourd’hui certaines provinces lui sont directement soumises, d’autres indirectement; ainsi les Gentils furent directement soumis à Paul ici, indirectement là, c’est à dire dans les provinces confiées à d’autres apôtres; ces deux apôtres furent donc les deux pieds du Seigneur, Pierre le pied droit, car il pr^cha le premier aux Juifs qui lui étaient directement soumis, Paul le pied gauche, qui évangélisa les Gentils; la droite commande à la gauche, comme le peuple juif prévaut sur les Gentils, car de dignité supérieure;

2. (lignes 63-88) ces deux pieds ont convergé à Rome, aspirant à y répandre le nom du Christ; ils s’y arrêtèrent définitivement; Dieu l’a voulu ainsi pour démontrer la primauté de ce siège et supprimer toute cause de schisme sur ce point; si chacun était mort dans deux endroits différents, par exemple Paul à Nicée ou Constantinople, ces deux sièges pouraient être équiparés à Rome; mais puisque Dieu a fait de Rome le siège primatial, en y installant Pierre et Paul, toujours il l’a glorifié et le glorifiera; comment glorifiera-t-il ce lieu où il se tient ? Viendront à toi, l’église de Rome, s’humilieronten suppliant les fils de tes anciens oppresseurs ; ceux qui t’ont trainée dans la boue, les Empereurs, les rois et les princes baiseront les pieds du pape, lui obéiront, ainsi que ceux qui te méprisaient , les Juifs, les hérétiques et les Sarrasins qui contredisent la foi romaine;

3. (lignes 89-134) cela interviendra à une époque déterminée par Dieu, lorsque tous les peuples, proches et lointains, entreront dans l’Eglise; heureux ceux qui verront cela ! Si seulement cela pouvait survenir maintenant ! Nous en concevrions une immense joie, le pape en premier: il est prêt à accueillir le fils prodigue au bercail, en s’adaptant et se réduisant à lui en quelque sorte; prêt à se donner entièrement au salut de ce fils, l’église grecque longtemps amalde et rebelle à son giron, à sa doctrine dont virt le juste; certains papes sont allés jusqu’à pardonner les fautes, la déposition voire le meurtre de partiarches; jusqu’à approuver les rites grecs; jusqu’à restituer les biens temporels et les augmenter de bienfaits variés; le père des pères, le pape, est prêt à accueillir le fils prodigue si ce dernier en manifeste la volonté, à lui rendre son statut premier, en lui conférant l’étolle et l’anneau; à le défendre des offenses, à cueillir le fruit de la passion du Seigneur en faisant de son retour une immense joie pour tout le peuple chrétien;

4. (lignes 134-148) mais les papes ont été tant de fois déçus: des messagers promettaient; le pape envoyait les siens, mais trouvait un fils contumace, refusant de venir à lui; puisque cette aversion du fils provient de celle envers la foi, du refus de professer que l’Esprit procède du Fils, et de quelques autres points du dogme, le père l’a deshérité, y compris au plan temporel; le fils a persisté dans l’erreur, se contentant de jouir de ses biens; les envoyés du pape sont revenus plus d’une fois bredouilles; pourtant, il n’aspire qu’au retour du fils pour lui pardonner, en discute fréquemment avec ses frères les cardinaux pour trouver le chemin; peine perdue jusqu’ici; il ne faut cependant pas desespérer de la miséricorde divine: elle ne laissera pas ce fils indéfiniment errer; elle le rappellera et le convaincra; nous devons en prier le médiateur entre les hommes et Dieu.

Ms Pi f. 128ra-129vb; ms R5, f. 120rb-121vb.

Notes
4357.

F. Iozzelli édite le texte d’après Pise, mais fournit les variantes de Rome, c’est à dire l’édition officielle; les différences sont minimes, se réduisant essentiellement à des graphies dissemblables.

4358.

Is. 60, 13-14.