1.1Système et structure

1.1.1. Qu’est-ce qu’un système ?

Avant de décrire l’organisation fonctionnelle des structures vivantes, nous reprendrons la définition d’un système. Selon Van Bertalanffy7, « ‘Un système est un ensemble d’éléments en interaction dynamique, organisés en fonction d’un but.’ »

Les éléments d’un système sont de nature et de nombre différents : ils peuvent être humains, matériels. Etudier un système passe d’abord par la recherche des éléments qui le constituent. Ceux-ci sont en interaction dynamique « ‘Par interactions nous entendons des éléments p liés dans une relation R en sorte que le comportement de p dans R diffère de son comportement dans une relation R’. ’»8. Les éléments en relation dans un système acquièrent des caractéristiques « en plus » du fait de leurs relations dans ce système : on peut donc dire que le «  tout » d’un système est plus que la somme de ses parties, dans la mesure où les liens qui unissent les éléments d’un système leur donnent d’autres propriétés en « plus ». Mais inversement, ce tout d’un système est moins que la somme de ses parties, ce qui signifie que des qualités ou propriétés attachées à certains éléments, lorsqu’ils sont hors du système, peuvent disparaître, lorsque cet élément est présent dans le système. D’autre part, la suppression ou l’adjonction d’éléments dans un système modifie les relations entre éléments, et transforme donc le fonctionnement du système .

Les interactions à l’oeuvre peuvent être uniquement d’ordre interne, si le système est fermé, coupé d’un environnement extérieur. Il utilise pour fonctionner la réserve potentielle d’énergie dont il dispose : cette énergie, constante, se dissipe depuis un état d’ordre jusqu’à un état de désordre (selon le second principe de la thermodynamique). Mais on considère que les systèmes sociaux humains sont au contraire toujours ouverts sur un environnement avec lequel ils entretiennent des relations. Il n’existe donc pas de système humain clos et autonome, mais tout système peut aussi être considéré comme un sous système d’un ensemble plus large. Qu’il s’agisse des relations internes ou externes avec d’autres systèmes, chaque système définit ses limites ou frontières, qui lui permettent d’effectuer des échanges, tout en maintenant son intégrité, sa structure. Ces frontières doivent donc à la fois le protéger mais aussi permettre des relations.

Edgar Morin propose une définition des interactions à l’oeuvre dans un système et montre comment elles créent de l’ordre et du désordre 9:

‘« ‘les interactions sont des actions réciproques modifiant le comportement ou la nature des éléments, corps, objets, phénomènes en présence ou en influence. Les interactions’ ’
  • supposent des éléments, êtres ou objets matériels, pouvant être en rencontre ;

  • supposent des conditions de rencontre, c’est-à-dire agitation, turbulences, flux contraires etc. ;

  • obéissent à des déterminations, contraintes qui tiennent à la nature des éléments, objets ou êtres en rencontre ;

  • deviennent dans certaines conditions des interrelations ( associations, liaisons, combinaisons, communication etc.) c’est-à-dire donnent naissance à des phénomènes d’organisation.

‘Ainsi, pour qu’il y ait interactions, il faut qu’il y ait rencontres, pour qu’il y ait rencontres il faut qu’il y ait désordre (agitation, turbulence) »10.’

L’organisation d’un système lui permet de se transformer, de produire, de se maintenir, mais elle est bien le produit de forces antagonistes : le fait de fonctionner dans un système, nous l’avons déjà vu, impose à ses éléments des contraintes, voire des répressions qui inhibent certaines de leurs propriétés, qui, si elles se manifestaient atteindraient l’intégrité du système. Ceci permet à E. Morin d’affirmer :

‘« La solidarité manifeste au sein du système et la fonctionnalité de son organisation créent et dissimulent à la fois cet antagonisme porteur d’une potentialité de désorganisation et désintégration . On peut donc énoncer le principe d’antagonisme systémique : l’unité complexe du système à la fois crée et refoule de l’antagonisme . »11

Notes
7.

BERTALANFFY, L. VON, La théorie générale des systèmes, Dunod, 1973, p 53.

8.

ibidem

9.

MORIN E , La méthode : La vie de la vie, Paris :Le Seuil, 1980.

10.

Op.cit., p 51.

11.

Idem, p 119.