Les fondateurs de la sociologie

Auguste Comte 29(1798-1857) créa le mot « sociologie » pour désigner ce qu’il appelait d’abord « physique sociale ». Dans son Cours de philosophie positive, il distinguait la statique sociale et la dynamique sociale, la première étudiant les conditions du « consensus », la deuxième dégageant les phases « d’une évolution graduelle vers un régime propre à la vraie nature de l’homme ». Herbert Spencer (1820-1903) a développé l’analogie société-organisme dans le cadre des 4 tomes des Principes de sociologie qui montrent le développement des sociétés et des « institutions » au travers d’une philosophie de l’évolution. A noter que Spencer écrivit des textes pédagogiques traduits sous le titre De l’éducation. Durkheim, bien qu’ayant été fortement influencé par eux, critiquait l’aspect philosophique des approches de Comte et Spencer :on se trouve en présence de philosophie sociale, non d’une science au sens où les sciences de la nature se donnent des objets d’observation et d’explication. Avant donc de prétendre enseigner aux hommes le groupe, il émit le projet de construire une science du social méritant ce nom.30

Pour répondre à la question des rapports entre individu et société, il chercha d’abord à définir une société, un groupe ainsi que les conditions de cohésion et d’intégration qui fondent l’unité du groupe

Le modèle théorique d’approche du champ social que Durkheim a construit s’inscrit en filiation de ce qu’on apporté les premiers sociologues : l’analogie d’une société avec un organisme vivant, fait d’organes (structure) remplissant des fonctions. On parlera donc d’anatomie et de physiologie sociales, de « faits de structure » et de « faits de fonctionnement », voire de « manière d’être » et « de manière de faire » pour signifier qu’une société est bien une sorte d’organisme, un système. La différence avec l’organisme biologique étant cependant que le genre d’unité d’un système social est d’ordre psychologique, dans la mesure où ce qui unit les hommes, condition de toute coopération sociale, prend la forme d’une commune subordination à des règles, des valeurs, des normes partagées. Le modèle dit « structuro-fonctionnaliste » durkheimien a donc la particularité de poser d’emblée que le rapport des parties au tout dans le fonctionnement d’une société se situe au niveau de ce qui est désigné sous le terme de conscience collective  : un certain type de communion, de manière de vivre des liens de groupe. Si les phénomènes sociaux doivent être conçus par le sociologue comme ayant leur spécificité propre, et en particulier n’être pas réductibles à des faits d’ordre psychologique strictement individuels - qui s’additionneraient en quelque sorte pour fabriquer du groupal -, reste que les deux facteurs fondamentaux de pérennité et de survivance d’un groupe social sont ceux qui permettent sa cohésion (facteurs d’intégration) et son unité morale (facteurs de régulation).31

L’explication du social par le social, posée par Durkheim comme une règle fondamentale de la méthode sociologique référait donc à un modèle n’excluant en aucune manière les hommes, les sujets, tout en les situant toujours au sein d’une totalité systémique qui, une fois constituée, exerce sur eux une contrainte spécifique.32

Notes
29.

FILLOUX , J.-C., Durkheim et l’éducation ,P.U.F. , 1994, p10.

30.

Idem

31.

idem, p15.

32.

Idem, p16.