2.3. L’apprentissage et les principaux agents de la socialisation

C’est par le biais de son insertion dans les groupes auxquels il appartient par la naissance (famille, groupe social, etc.) ou dans lesquels il s’intègre (école, groupes de pairs, club sportif, etc.) que l’enfant devient progressivement un membre à part entière de la société dans laquelle il vit.

2.3.1. La famille: système d’apprentissage, de rôles, de gratifications et de frustrations :

De son groupe familial, l’enfant apprend un certain nombre de savoirs (savoir-faire, savoir-dire, savoir-penser), de valeurs et de normes (explicites ou implicites) nécessaires à son intégration. L’étude de la famille par Talcott Parsons,43 de manière très simplifiée, reposait sur l’idée qu’elle avait une fonction principale, la socialisation. Elle transmet aux enfants, elle maintient à l’intérieur de la famille, les valeurs sociales. En socialisant l’individu, elle assure une fonction sociale majeure, celle du maintien ou de l’entretien des règles et des valeurs sociales.

Comment les parents se comportent-ils à l’égard de leur enfant  et que lui apprennent-ils en se comportant de la sorte? Quels modèles fournissent-ils à l’enfant ? Quelles sont les incitations directes que les parents exercent à l’égard de l’enfant pour lui apprendre à se comporter de façon adaptée dans les relations sociales ?

Certains auteurs font l’hypothèse que les pratiques éducatives parentales sont un des médiateurs essentiels de l’apprentissage des conduites adaptées ou bien déviantes.44 Elles s’acquièrent par le biais des processus d’identification, par le jeu de l’imitation et de l’observation des modèles que les parents fournissent à l’enfant ou en fonctions des incitations et renforcements qui lui sont directement distribués par les personnes de son entourage. La famille est alors considérée comme un lieu d’apprentissage où l’enfant apprend en particulier comment entrer en contact avec autrui, comment maintenir le contact et comment résoudre les situations de conflit social.

Dans quelles conditions l’enfant acquiert-il alors des compétences sociales repérées ensuite dans ses relations avec ses pairs, à l’âge scolaire ?

Les conclusions des différentes études45 montrent qu’un enfant compétent est celui qui ayant bénéficié d’un lien d’attachement suffisamment sécurisant avec sa mère, ou un substitut, continue à chercher auprès d’autrui protection et sécurité. A contrario, l’enfant soumis à une relation défectueuse (frustrations, anxiétés, agressions,...) avec ses parents montre des signes pathologiques (retrait social, manque de confiance en soi, agressivité, etc.) dés l’âge de 6 ans. De plus, des événements stressants tels que le décès d’un parent, la séparation des parents ou un déménagement sont des facteurs aggravants pour comprendre un comportement difficile.

La compétence sociale de l’enfant apparaît dans ses habiletés à établir et maintenir le contact avec l’autre. Il est motivé à interagir avec autrui pour coopérer ou entrer en compétition avec lui. Il sollicite autrui et répond aux sollicitations de l’autre. Certains enfants apparaissent plus capables que d’autres, de participer et de contribuer activement à l’organisation et au déroulement des activités communes (initiatives et régulations dans les jeux collectifs). En revanche, l’enfant mal intégré dans le groupe de pairs se caractérise par une conduite parasite par rapport au déroulement de l’activité (hyperactivité mal contrôlée, agressions verbales ou physiques, non-respect des règles, troubles de l’attention) qui sont souvent à l’origine de son rejet. L’étude des conduites agressives est particulièrement démonstrative : l’enfant peut avoir recours à l’agression parce que ses parents l’utilisent fréquemment à son égard ou à l’égard d’autrui ; l’enfant peut être encouragé et incité à le faire par l’intermédiaire des attitudes maternelles.46

Notes
43.

PARSONS T., Family, socialization and Interaction Process, Free Press, 1955 cité par RAYNAUD J.-D., Les règles du jeu. L’action collective et la régulation sociale, A. Colin, 3ème édition, 1997, p 168.

44.

Sur le sujet voir notamment la synthèse de CARTRON et WINNYKAMMEN , Apprentissage des modalités d’interaction avec autrui dans la famille, in Les relations sociales chez l’enfant, A.Colin, 1995, pp 31-36.

45.

Idem, pp 9-83.

46.

Idem, pp 34-35.