2.3.4. Les techniques de communication de masse et la socialisation par l’image

Pendant des siècles, la socialisation des enfants s’est effectuée dans des milieux bien circonscrits, par le canal de la famille et de l’environnement proche, puis par l’école.

Si la part relative de l’école dans la préparation à la vie tend à s’accroître par rapport à celle de la famille et du milieu proche, elles se trouvent l’une et l’autre limitées par l’influence grandissante d’un milieu extérieur de plus en plus largement ouvert sur le monde grâce aux progrès des techniques de communication. Les jeunes ont désormais de multiples occasions d’apprendre et de se former en dehors de l’école et de la famille « ‘Pour les enfants, les émissions que leur propose le petit écran tiennent un rôle ’d’école parallèle’’ ».55La télévision surtout, mais aussi le cinéma, la presse et imprimés de tout genre, la radio, les affiches constituent autant de sources culturelles auxquelles les enfants ont accès directement et souvent plus aisément que les adultes. « ‘Ce phénomène se présente avec plus de force et de persistance que jamais dans la société moderne, grâce aux techniques de communication de masse, qui sont devenues un important agent de socialisation des jeunes aussi bien que des adultes’ ».56 En même temps, constate Marie-José Chombart de Lauwe, les jeunes sont de plus en plus éloignés des activités professionnelles,  «‘Leur initiation aux réalités de la vie s’effectue moins au travers d’activités et d’expériences directes’ ».57 Certaines études ont alors tenté d’observer comment les enfants perçoivent et utilisent les connaissances et les représentations sociales qui leur sont offertes par l’univers d’images que constituent les médias. Observations qui se sont déroulées chez les enfants qui se trouvent à l’âge de la consommation maximum d’images et d’émissions télévisuelles, c’est-à-dire aux écoliers de sept à douze ans. Il serait trop long d’aller ici dans le détail. Nous citerons simplement le fait que la consommation des différents moyens de communication varie selon les milieux des enfants.

Par exemple, les enfants des couches populaires restent plus longtemps devant les émissions de télévision, en discutent moins avec les parents et bénéficient de loisirs moins diversifiés. Les activités de détente des enfants de milieux plus aisés sont non seulement plus variées, mais aussi classées comme plus culturelles (livres de ’qualité’, dessin, musique, etc.). Les d’enfants des couches sociales défavorisés choisissent de s’identifier à ’un héros qui réussit’, mais préfèrent des personnages de contes totalement féeriques (Peter Pan, par exemple). Leurs perspectives d’avenir et leurs niveaux d’aspirations sont plus limités que ceux des enfants de milieux aisés, et ils se gratifient plutôt alors dans l’imaginaire le plus éloigné du réel.58

En conclusion, l’enfant vit dans un environnement social, ce constat d’évidence est reconnu par tous. Dans un sens restreint, l’environnement social de l’enfant est constitué par ses proches. Le milieu familial est son premier environnement social, et nous avons pu observer l’influence des parents sur la qualité et stabilité des premiers liens d’attachement et des apprentissages des conduites adaptées ou non socialement. Durant la croissance de l’enfant, le réseau social s’élargit. Progressivement il intègre les membres les plus éloignés de la famille, les partenaires habituels de la vie sociale familiale, les adultes détenteurs de rôles éducatifs spécifiques, etc.

Au sens large, l’environnement social désigne les milieux socio-économiques, socioculturels, etc. Beaucoup de travaux, notamment en sociologie, ont été consacrés dans ce domaine, à la nature et à l’importance de leur influence sur les systèmes d’éducation, et donc sur l’enfant.

Notes
55.

CHOMBART DE LAUWE M.-J., L’enfant et la socialisation par l’image, in MALEWSKA-PEYRE et TAP op. cit., pp 267-288.

56.

ROCHER G., op. cit., p 154.

57.

La socialisation de l’enfance à l’adolescence, op. cit., p267.

58.

Idem, p 284.