2.4. Le développement du processus de socialisation

Selon Tap et Malewska59, le caractère unilatéral de la socialisation (le fait que les conduites individuelles soient considérées comme le produit mécanique des pressions sociales) cède la place à une conception transactionnelle selon laquelle la socialisation réussie ne se confond plus avec la conformité de l’enfant aux normes adultes, mais est le résultat dynamique d’une adaptation réciproque enfant - adulte.

Toujours selon ces auteurs, l’intériorisation des valeurs et des normes n’est pas limitée à l’apprentissage des comportements appropriés. Elle se développe à partir des prises de sens, des significations accordées par les individus et les groupes à différentes conduites. Elle évolue dans le jeu des rapports complexes entre la pensée individuelle, les représentations collectives et les significations symboliques s’actualisant dans la capacité de l’enfant à porter des jugements et à s’approprier des normes et des valeurs60.

Pour reprendre le développement de l’enfant, Montagner61 a voulu montrer comment la qualité du lien d’attachement à la mère était l’une des conditions favorables à la relation avec des pairs d’âge. Par la suite, les interactions adulte - enfant ne produisent pas des situations équivalentes car le contexte adulte - enfant et l’asymétrie des relations qu’il représente constituent pour l’enfant un ensemble de stimulations, d’incitations directes ou indirectes à apprendre et développer de nouvelles compétences. Dans le contexte enfant- enfant, doivent être mises en oeuvre des activités de coopération et de négociation avec les pairs. Les savoir-faire acquis dans le contexte adulte-enfant peuvent alors se révéler inappropriés, ce qui conduira éventuellement le sujet à réaliser de nouvelles adaptations en particulier afin d’apprendre à coopérer avec ses pairs d’âge en vue de la réalisation d’un objectif commun.62

Selon Cartron et Winnykammen,63 les relations entre pairs sont précoces et s’organisent à partir des conduites d’observation et d’imitation de l’autre et l’objet est le médiateur de ces interactions précoces : il permet une attention conjointe entre deux partenaires qui font également attention l’un à l’autre. L’objet est aussi à l’origine de beaucoup des conduites d’affiliation jusqu’à l’âge scolaire.

Les travaux de Doise et Mugny, dont nous parlerons plus en détail dans la suite de l’exposé, mettent en évidence la notion de « marquage social » et de « conflit socio-cognitif ».

Notes
59.

op cit. , p 9

60.

ibidem

61.

MONTAGNER H., L’attachement, les débuts de la tendresse, O. Jacob, 1999.

62.

CARTRON A., WINNYKAMMEN F. , Les relations sociales chez l’enfant - Genèse, développement, fonctions, A. Colin, 1995, p 37.

63.

Idem, p58