1.1.2.2011Mémoire et attention

Bien que le concept d'attention recouvre une réalité complexe, il peut être défini globalement comme la fonction d'un système qui permet de sélectionner les éléments d'information pertinents pour réaliser une tâche et de contrôler les opérations effectuées sur l'information.

L'attention, comme la mémoire, est vue comme une construction multidimensionnelle. Dans ses diverses acceptions théoriques, l'idée d'attention est fortement liée à celle de mémorisation et peut-être encore plus à celle de conscience5.

Sans entrer ici dans le détail des théories, citons les principales caractéristiques de l'attention afin de les relier au problème de la mémoire. La première caractéristique concerne l'intensité ou le niveau d'activation : il existe en effet différents niveaux ou degrés d'attention ; ainsi, l'attention est au niveau minimum au cours du sommeil et atteint un niveau maximum lors de la focalisation (concentration). On peut supposer alors que les opérations cognitives réalisées à chaque niveau d'activation ne sont pas de même nature et entraînent des différences dans la qualité du traitement et dans la mémorisation des données. Une seconde caractéristique concerne l'origine de l'orientation attentionnelle ; celle-ci peut être externe, située dans l'environnement (cas où quelque chose attire l'attention) ou interne, découlant d'une décision volontaire du sujet dans le but de réaliser une tâche donnée. La troisième caractéristique, probablement la plus étudiée et peut-être la plus controversée (voir Allport, 1980a ; Kellogg, 1980) concerne la capacité limitée d'un système attentionnel général et a-spécifique.

Des différentes caractéristiques de l'attention, découlent quatre fonctions principales d'après Possamaï, Bonnel et Requin (1993). L'attention a tout d'abord une fonction de sélection ou de tri des informations de l'environnement et des réponses possibles (focalisation attentionnelle). Deuxièmement, l'attention permet de distribuer les différents traitements par une action de gestion des priorités (division ou partage attentionnels). Troisièmement, elle contribue à la régulation des phases plus ou moins intenses du comportement en fonction de diverses contraintes (intensité). Enfin, elle assure un rôle de contrôle en hiérarchisant les traitements et en différenciant les processus automatiques – rapides, parallèles, économiques, rigides, irrépressibles involontaires et inconscients – des processus contrôlés – lents, sériels, coûteux, souples, et potentiellement volontaires ou conscients.

L'idée admise d'une limitation des ressources attentionnelles provient du constat commun qu'on ne peut pas réaliser plusieurs actions ou se concentrer sur des stimuli d'origines multiples en même temps, d'où les fonctions de sélection, de distribution et de hiérarchie des traitements. Aussi, l'organisme a-t-il besoin d'une ou de plusieurs structures mnésiques (buffers) qui permettent le stockage temporaire des informations nécessaires à la réalisation de la tâche placée dans le focus attentionnel. Le point de vue connexionniste ne conçoit pas l'existence d'un système général attentionnel qui servirait à contrôler le déroulement des opérations mentales et qui pourrait être globalement saturé. Le contrôle serait plutôt effectué par l'ensemble du système et dépendrait de la nature des activités et de leurs contraintes respectives (Richard, 1990c). La limitation attentionnelle ne dépend pas alors de la quantité d'informations à traiter mais de la présence de configurations spécifiques d'activité dans le système et de l'existence de structures spécifiques préalablement établies en mémoire qui peuvent résonner avec ces configurations (Allport, 1980b, p.32). La mémoire serait alors inséparable de la capacité de traitement (les mêmes unités neuronales servent à traiter et à stocker les informations) et distribuée dans l'ensemble du système nerveux.

Quel que soit le point de vue adopté, le rapport entre mémoire et attention paraît indiscutable mais doit être précisé à plusieurs égards : lien entre attention et mémoire de travail (§ 1.3.3.), mécanismes attentionnels de recherche en mémoire à long terme (§ 1.4.1.3), distinction processus automatiques / contrôlés dans la mémorisation (§ 1.4.3.1.2),...

Notes
5.

Damasio (1999) distingue conscience et attention, les définit toutes deux en termes de niveaux et envisage l'existence d'une influence mutuelle : un faible niveau d'attention déclenche les processus d'une forme de conscience (conscience-noyau), qui, à leur tour, aboutissent à l'attention soutenue.