1.5.2.4011Les variables intra-individuelles

Comme nous l'avons souligné précédemment en décrivant les théories, il semble que la mémoire ne puisse pas être considérée comme un système unitaire, mais plutôt comme un ensemble de sous-systèmes interdépendants. Un argument de poids contre le point de vue unitaire est donné par une recherche de Underwood et al. (1978) où ils ont fait passer trente-trois tests de mémoire à deux cents personnes. Les corrélations entre tests sont bien trop faibles, voire négatives, pour envisager l'existence d'une seule et même structure impliquée dans les diverses épreuves. De plus, une analyse factorielle fait émerger des dimensions calquées sur les tâches, ce qui tend à prouver que la mémoire est spécifique à la tâche et aux contraintes exercées par les conditions de récupération.

Deux classes d'explications de cette faible relation entre performances lors de plusieurs tests de mémoire peuvent être proposées :

Les différences intra-individuelles semblent tout aussi importantes que les différences interindividuelles même si, théoriquement, elles devraient être plus simples à appréhender à cause du nombre restreint de sources de variation. En effet, en considérant un même sujet réalisant la même tâche, on écarte l'effet de nombreuses dimensions liées aux caractéristiques stables du sujet et de la tâche. Par contre, surgit la difficulté majeure et parfois incontournable provenant de la répétition d'expériences identiques chez les mêmes sujets (effet d'apprentissage, effet de la première expérience sur les expériences ultérieures).

L'étude des différences intra-individuelles permet d'identifier les dimensions responsables des modifications de performance dans une même tâche ou une tâche de même nature. Ces dimensions peuvent tenir à l'environnement extérieur (e.g., moment de la journée, contexte physique), à l'environnement interne physique (e.g., prise de médicament) ou à l'environnement interne mental du sujet (e.g., événement personnel). L'effet de ces dimensions peut être :

Ces facteurs intra-sujets peuvent agir sur la performance en modifiant le fonctionnement structurel (e.g., prise d'un excitant) ou le fonctionnement stratégique (e.g., changement d'humeur).

Pour illustrer les facteurs environnementaux qui ont une influence contrastée sur la performance mnésique, Gaonac'h (1990) et Leconte (1989) citent les travaux de Folkard (Folkard, 1979, Folkard, Monk, Bradbury et Rosenthall, 1977) concernant le rôle du moment de la journée sur l'apprentissage. Ce facteur retentit sur la performance mnésique à travers un effet sur le niveau de vigilance du sujet et sur les stratégies mises en jeu pour traiter le matériel. Les données sur le moment de la journée montrent que :

Ainsi, le matin, les sujets développeraient plutôt des stratégies de maintien et d'apprentissage par coeur (MCT) alors que les stratégies de l'après-midi seraient plus dirigées vers la compréhension (MLT).

Ces données ne prennent pas en compte la dimension de matinalité / vespéralité qui permet de différencier des sujets plus efficaces le matin et des sujets plus efficaces le soir (Lancry, 1986 ; Bruni, 1997). Cette dimension pourrait interagir avec le moment de la journée sur le type de stratégie déployée et le niveau de performance.