2.3.3.4011Des méta-dimensions

Dixon et ses collègues se sont particulièrement intéressés à la possibilité d'identifier, au sein du MIA une structure factorielle permettant de regrouper les différentes dimensions (ou échelles) construites a priori sur la base de considérations théoriques et intuitives.

Hertzog, Dixon, Schulenberg et Hultsch (1987) ont conduit une vaste étude dans ce but en prenant les données obtenues au cours de six études antérieures. La moitié des données ont été réservées pour tester le modèle qui émergerait d'une première phase exploratoire. Cette recherche dévoile l'existence d'au moins deux facteurs d'ordre supérieur dans le MIA :

Les auteurs ne parviennent pas à identifier un facteur qui regrouperait les trois échelles « conatives» de l'outil : motivation, locus et anxiété (affect lié à la mémoire). Ces trois échelles sont associées aux deux facteurs principaux et une relation spécifique est trouvée entre l'anxiété et la motivation (dans un premier modèle uniquement). Ainsi, les aspects affectifs liés à la métamémoire impliqueraient aussi bien des connaissances sur son fonctionnement que des croyances issues de l'auto-efficacité.

De leur côté, Gilewski, Zelinski et Schaie (1990) ont effectué un travail similaire sur le MQ avec deux intentions : dégager la structure factorielle de l'outil et éliminer les items ou échelles moins pertinents. Les résultats de leur étude indiquent l'existence de quatre facteurs dans le MFQ (version réduite de 64 items ; Tableau II. 6) :

Tableau II. 6 : Résultats de l'analyse factorielle sur les MQ ; entre parenthèses, le rang des poids factoriels ; en gras, les items maintenus dans le MFQ (Gilewski et al., 1990).
Echelles
Nombre d'items
F1 :
fréquence d'oubli
F2 :
gravité de
l'oubli
F3 :
fonctionnement rétrospectif
F4 :
utilisation de stratégies
Evaluation Générale 1 1 (.37) 0 0 0
Confiance 5 0 0 2 (.36/.39) 0
Fonctionnement rétrospectif 6 0 0 5 (-.43/-.80) 0
Fréquence d'oubli 18 18 (.35/.61) 0 0 0
Fréq. Oubli (lecture) 10 10 (.63/.84) 0 0 0
Se souvenir des événements 6 4 (.48/.64) 0 0 0
Gravité de l'oubli 18 0 18 (-.47/-.80) 0 0
Utilisation de stratégies 10 0 0 0 8 (.48/.67)
Effort pour se souvenir 18 10 (.37/.60) 0 0 0

L'équipe de Dixon a mis en place une nouvelle étude visant à vérifier plus encore la consistance des facteurs de haut niveau, en examinant la validité de convergence de deux questionnaires fréquemment utilisés dans le domaine du vieillissement : le MIA et le MFQ. Ils ont émis l'hypothèse que leurs facteurs respectifs pourraient refléter des dimensions théoriques identiques (Hertzog, Hultsch et Dixon, 1989) : plus précisément la dimension croyance d'auto-efficacité et la dimension fréquence d'oubli pourraient traduire une seule et même dimension d'auto-efficacité. Les auteurs trouvent une similitude dans la structure des deux outils : un facteur d'efficacité, un facteur de stratégie et un facteur de changement. Ce résultat de validation soutien l'approche multidimensionnelle de la métamémoire et permet de proposer au moins deux dimensions de la métamémoire révélée par les questionnaires actuels : la connaissance et l'auto-efficacité.

D'autres études montrent en effet que l'auto-perception de la mémoire est fortement reliée à des dimensions de personnalité. Les auto-évaluations de la mémoire sont significativement reliées aux facteurs affectifs de dépression et d'anxiété alors qu'elle ne trouvent généralement pas de confirmation dans les résultats à des tests objectifs mesurant la capacité mnésique (Derouesné, Alperovitch, Arvay, Migeon, Moulin, Vollant, Rapin et Le Poncin, 1989 ; Broadbent et al., 1982 ; Lieury, Lecorvic, Mahe, Le Guern, Sauvage, Leroy, Van Acker, Raoul, Gandon, Danjou et Allain, 1994). Il faut cependant préciser que Derouesné et al. ne trouvent pas de corrélation entre la performance globale obtenue à une batterie de tests et une échelle d'auto-évaluation comportant plusieurs items, alors que cette même performance est différente selon que la plainte mnésique est auto-évaluée comme mineure ou majeure. Dans l'étude de Lieury et al. (1994) l'auto-évaluation de la mémoire (Autoqestionnaire de McNair et Kahn, 1984) n'est pas fortement liée à la performance à différents tests (-.01 pour reconnaissance de visages à .27 pour reconnaissance de mots79). Un contraste net apparaît pour les mesures de personnalité (MMPI de Hataway et McKinley, 1940, échelle d'Anxiété de Cattell, 1956 et Inventaire de Personnalité de Eysenck, 1956) qui sont assez fortement corrélées avec l'auto-évaluation de la mémoire80 et pas du tout reliées à la performance réelle. Ainsi les questionnaires de métamémoire seraient plus des tests servant à mesurer l'anxiété ou la dépression que la mémoire elle-même. Ces résultats laissent dire aux auteurs que les sujets ne connaissent rien du fonctionnement de leur mémoire et que seule la recherche expérimentale est capable de l'évaluer objectivement.

Notes
79.

Leur étude portant sur 151 sujets, les corrélations de .23 et .27 sont significatives à .01 bien que faibles. Elles concernent la reconnaissance de dessins et la reconnaissance de mots.

80.

Corrélations les plus fortes pour la psychasthénie (MMPI) : -.62, la schizophrénie (MMPI) : -.58, la dépression (MMPI) : -.56, l'anxiété (Cattell) : -.53, l'introversion sociale (MMPI) : -.53, l'hypochondrie (MMPI) : -.53, l'hystérie (MMPI) : -.49 et l'anxiété (MMPI) : -.48