2.3.3.5011Conclusion sur les dimensions de la métamémoire : nécessité de prendre en compte la conation et l'affect

L'analyse des questionnaires d'auto-évaluation de la mémoire quotidienne débouche sur une conclusion unanime : la métamémoire est une construction multidimensionnelle. Il semblerait que les principales dimensions de la métamémoire soient la connaissance que possède le sujet sur le fonctionnement général de la mémoire, les croyances d'auto-efficacité personnelle et les dimensions affectives liées à l'utilisation de la mémoire (avec moins de support pour cette troisième dimension). La seconde dimension, l'auto-efficacité, mérite une attention particulière.

  1. Elle permet de souligner que les représentations naïves ne correspondent pas nécessairement aux connaissances – connaissances qui par ailleurs sont établies par la recherche scientifique ; les croyances font néanmoins partie du stock de connaissances emmagasinées en mémoire à long terme et revêtent un caractère de vérité pour le sujet. Ainsi, les sujets ne seraient pas nécessairement conscients du fonctionnement réel de leur mémoire. Cela permet de comprendre pourquoi, dans la pratique, il est très difficile de trouver des relations fortes entre métamémoire et performance. En effet, si les outils d'évaluation permettent de mesurer des croyances éventuellement erronées, les chances sont faibles de trouver des corrélations entre les réponses aux questionnaires et les performances mnésiques.

  2. Cette dimension permet aussi de concevoir les interactions entre cognition et conation dans la détermination des comportements mnésiques. La notion d'auto-efficacité est en effet primordiale pour expliquer les comportements effectifs. Si je me crois capable de réaliser une tâche donnée, alors je déploierai les efforts nécessaires pour aboutir. Par contre, si je me sens incapable d'atteindre un certain objectif, ma motivation, mon engagement et mes efforts ne seront pas optimaux (Bandura, 1986, 1989). La performance mnésique, et plus généralement cognitive, est associée à d'autres dimensions du psychisme dont la personnalité, la motivation, les affects.

  3. L'existence de croyances sur le fonctionnement du système pose le problème de leur origine et de leur exactitude (Hertzog et Dixon, 1994). Si la connaissance de la mémoire peut se construire à travers l'observation de régularités et l'expérience acquise au fil des situations mnémoniques, qu'en est-il des croyances ? Une diversité de phénomènes peut influencer leur construction : les stéréotypes sociaux, l'importance accordée à certains événements (échecs et réussites) qui pourrait contribuer à augmenter leur fréquence subjective, certains facteurs de personnalité, certains contextes affectifs, l'image de soi renvoyée par autrui... et la survenue réelle de difficultés... Il faut effectivement noter que les croyances d'auto-efficacité peuvent se révéler exactes ou réalistes.

L'inconvénient des recherches portant exclusivement sur la mise en évidence des dimensions de la métamémoire, ou, si l'on préfère, des représentations de la mémoire (conscience systématique de Cavanaugh, 1989) est qu'elles ne nous renseignent pas sur la validité prédictive des données obtenues. La question est alors de savoir si les auto-évaluations sont conformes à la réalité et si elles sont associées à la performance des sujets. Il devient alors nécessaire de s'intéresser à la pertinence de la connaissance face à la performance réelle. Dans les paragraphes suivants, nous aborderons successivement différentes recherches qui tentent de spécifier et/ou de modéliser les relations entre mémoire et métamémoire :