2.4.2.1011La plainte mnésique du sujet âgé

La plainte mnésique est fréquente chez les sujets âgés de plus de 60 ans, voire même 50 ans (Derouesné et al., 1989 ; Giurgea, 1993 ; Roberts, 1983). Effectivement, il n'est pas rare d'entendre les gens se plaindre de leur mémoire, plus ou moins sérieusement, et d'y associer automatiquement le vieillissement comme cause. Face à la perspective angoissante de la maladie d'Alzheimer, certains sont tentés d'obtenir un avis médical et une évaluation de leur capacité mnésique. Le problème de l'évaluateur sera précisément de déterminer si les troubles ressentis sont l'effet du vieillissement normal ou la manifestation d'une détérioration plus profonde, présage d'une démence véritablement invalidante.

Une difficulté supplémentaire se présente dans la mesure où la plainte mnésique peut également être signe de dépression. Il convient donc de distinguer les troubles mnésiques provenant d'un manque de motivation lié à un état dépressif de ceux qui témoignent d'une réelle désorganisation de la fonction mnésique. D'après l'étude de Poitrenaud et al. (1989), une tâche de rappel libre (liste de 10 éléments appris en trois essais) ne permet pas de distinguer la mémoire de sujets âgés présentant une DSTA (démence sénile de type Alzheimer) avec troubles légers de celle de patients déprimés. Cependant, une tâche de reconnaissance mène à des patrons de réponse distincts, avec plus de fausses alarmes chez les patients déments, même légers.

La plainte mnésique occupe une place centrale dans la problématique de la métamémoire car elle reflète la perception qu'a le sujet de son propre fonctionnement. Cette perception affecte nécessairement le comportement (Chaffin et Herrmann, 1983). Les questions particulièrement pertinentes qui se posent reflètent les différentes dimensions de la métamémoire que nous avons précédemment abordées :

  • la plainte est-elle fondée, objective ? Le sujet a-t-il une juste vision de ses capacités ?

  • reflète-t-elle un stéréotype social, une croyance socialement partagée ? il est normal et inévitable de perdre la mémoire en vieillissant ;

  • traduit-elle un mal-être du sujet, une angoisse face au vieillissement et/ou au changement de rythme de vie, une dépression ?